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Pêche maritime : Qui veut saboter le Plan Halieutis?

À chaque réforme, ses poches de résistance. Celle qui concerne la pêche fait face à des lobbies  qui ne pensent qu’à leurs propres intérêts au détriment de la protection et la reproduction des ressources halieutiques. Ces lobbies qui voient leurs intérêts menacés montent au créneau pour faire échouer les démarches entreprises par le ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime dans le cadre de la mise en œuvre du Plan Halieutis. Une stratégie de développement intégré du secteur halieutique qui a pour ambition d’atteindre un PIB de près de 21 milliards DH à l’horizon 2020, de passer, à la même échéance, de 61.650 emplois actuellement à 115.000. Les lobbies du secteur de la pêche, qui voient d’un mauvais œil ces réformes, veulent, à tout prix, freiner le processus pour maintenir le statu quo actuel et faire perdurer des pratiques malsaines qui servent directement leurs intérêts au détriment de l’intérêt général. Ces parties, qui ne veulent ou ne peuvent pas s’adapter avec les changements profonds que connaît le Maroc notamment en matière de démocratisation et de redistribution des richesses, déploient toutes les manœuvres irresponsables pour que le champ de profit en matière de pêche maritime reste limité. C’est contre cette logique de stagnation que s’inscrit la marche des marins-pêcheurs qui doit avoir lieu ce lundi 9 mai au port d’Agadir. Cette marche est destinée à exprimer des revendications purement sociales des marins : des armateurs qui payent en retard, qui privent les marins de leurs droits les plus élémentaires telle que la protection sociale… Des revendications légitimes que certaines parties, hostiles au changement et à la modernisation du secteur, exploitent pour atteindre leur objectif. Celui de maintenir le statu quo faisant fi de toutes mesures visant la protection et la reproduction des ressources halieutiques. Ces lobbies  détournent ainsi cette marche de son objectif initial pour créer les conditions d’un climat social tendu et servir les intérêts d’une campagne anti-Halieutis dans le seul dessein de faire tomber à l’eau toutes tentatives de modernisation. Deux volets majeurs de la réforme ne plaisent pas aux lobbies des armateurs, à savoir le principe du zoning relatif à la zone «C» entre Boujdour et Cap Blanc, près des frontières avec la Mauritanie et le cahier des charges relatif à l’utilisation des caisses en plastique pour le débarquement des captures. Le ministère de tutelle n’a pas de doute à propos de ses obligations en matière de préservation des ressources halieutiques du pays. La délimitation du stock «C» porte sur la région la plus importante en termes de réserves avec un stock évalué à 6 millions de tonnes de petits pélagiques et dont les prises ont été fixées à 1,09 million de tonnes par an. Dans le cadre de la mise en application de ce principe, les armateurs refusent catégoriquement qu’on leur impose des systèmes de surveillance des navires par satellite qui ont coûté à l’Etat près de 82 millions de DH. Où, quand et combien les bateaux de pêche capturent de poissons? Ce sont-là des questions auxquelles certains armateurs ne désirent pas apporter des réponses pour échapper à tout contrôle des quantités des prises. Or, dans un souci de durabilité, les périodes de pêche sont appelées naturellement à être organisées pour assurer la pérennité de la ressource pour les générations futures. Mieux encore, il faut rappeler que le Code de bonne conduite halieutique, mis en place par la FAO, stipule expressément que les Etats qui ne mettent pas des mesures concrètes pour la protection de leurs ressources halieutiques risquent d’être privés de leur droit à l’exportation. Donc, avec le maintien des méthodes de pêche irrationnelles qui servent les intérêts des armateurs, le Maroc risque non seulement l’effondrement de ses ressources halieutiques mais aussi de perdre sa licence d’exportation des produits de la pêche. A noter que les revenus résultant de ces exportations sont estimés à 13 milliards DH par an. L’autre point qui ne plaît guère à ces lobbies anti-réforme est l’obligation d’utiliser des caisses en plastique pour les débarquements des prises. Cette mesure a pour objectif d’améliorer les revenus des pêcheurs via une meilleure valorisation des prises. Pour comprendre la raison pour laquelle certains armateurs refusent cette mesure, il suffit de remonter la filière du lobby anti-modernisation de la pêche. Il est de l’intérêt de certains armateurs qui opèrent dans la production de la farine de poisson de brûler la protéine. L’activité de ces derniers est basée sur la prise anarchique de poisson. C’est uniquement ce mode de pêche qui leur permet d’avoir du poisson abîmé, donc de la matière première pour leur industrie. A noter que le Code de bonne conduite de la FAO exige des Etats une destination valorisante des ressources halieutiques. Au-delà de la convergence des intérêts corporatistes des uns et des autres et des ambitions du Plan Halieutis, il convient de rappeler que le fait d’œuvrer pour faire tomber à l’eau ce plan, qui a pour ambition de réformer et de moderniser le secteur de la pêche, traduit une opposition claire et nette à un plan qui a été présenté à SM le Roi Mohammed VI le 29 septembre 2009 et qui avait reçu, à cette occasion, la bénédiction et le soutien royal.

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