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Séducteur intégraliste

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Il est charismatique. Un souéternel aux lèvres. Le regard reflète une intelligence à toute épreuve. Le visage est lumineux et la barbe, finement ciselée, ne fait qu’ajouter à l’éclat du minois. Le verbe est là pour couronner l’attrait que ceux qui le croisent ressentent pour lui, bon gré mal gré. Nous ne sommes pas devant un play-boy sorti droit des écrans de cinéma. Mais devant l’un des plus populaires philosophes et/ou prédicateurs musulmans. A l’âge de 41 ans, plus ou moins, Tarik Ramadan aura tout connu. De l’adhésion à la moindre de ses réflexions au mépris total du consensus à la controverse. Le tout est alimenté par ce que les uns, charmés, appellent «mystère» et les autres, sceptiques, taxent de zones d’ombre. Il n’en a pas moins réussi à bâtir une notoriété à l’échelle internationale, notamment en Europe et dans le monde arabe. Mais l’ombre des paradoxes et de la confusion dans le discours semble le guetter sans cesse. Un retour en arrière s’impose. Né en 1962, cet intellectuel, dont les racines islamistes jurent avec la formation occidentale, n’est autre que le petit-fils de Hassan El Banna, fondateur à la fin du 19ème siècle déjà du mouvement salafiste «Les Frères musulmans». Il est le cadet des six enfants (cinq garçons, une fille) de Wafa al-Banna, fille aînée du leader de cette formation, aussi islamiste que réformiste, la première de l’histoire contemporaine des pays arabes à avoir cherché à introduire l’Islam sur la scène politique. Son père est Saïd Ramadan, le disciple préféré d’Al Banna, exilé par Nasser en 1954. Installé en Suisse, Saïd Ramadan crée en 1961 le Centre islamique de Genève. Reconnaissant que son père était le responsable des Frères musulmans à l’étranger jusqu’aux années 70, Tarik Ramadan n’en dément pas moins tout lien avec les Frères. Une appartenance également démentie par les responsables de ce mouvement. Au goût de ces responsables, cités dans l’édition du 22 décembre du journal français Le Monde, Tarik Ramadan va trop vite et trop loin. La perspective dans laquelle l’homme s’inscrit n’est tout simplement pas celle des Frères. Toujours est-il que parmi les membres de sa famille, certains semblent constituer pour lui un véritable fardeau. A commencer par son frère Hani, dont le discours et les fonctions en font un frère encombrant. Hani dirige le Centre islamique de Genève, visé par une plainte déposée aux Etats-Unis par les familles des victimes du 11 septembre contre les soutiens et les financiers des réseaux terroristes d’Al Qaïda. Tarik souligne qu’il a cessé d’y collaborer à partir de 1994. Mais, au même titre que le reste de la famille, il figure toujours au Conseil d’administration du centre. Actif dans les milieux associatifs, Tarik Ramadan s’est fait des ailes à travers les réseaux des associations de jeunes et d’étudiants musulmans en France. Ancien militant tiers-mondiste, Ramadan participe au Forum altermondialiste de Porto-Alegre en 2001. Il noue également des relations avec des personnalités emblématiques de ce mouvement comme José Bové et rencontre Bernard Cassen, d’Attac. Les ressources financières du penseur s’inscrivent dans le clean. Tarik Ramadan est professeur de philosophie au lycée de Saussure, à Genève, et professeur d’islamologie à l’université de Fribourg. Et ce n’est pas tout. Ces conférences, qui dépassent les murs des universités font un tabac : quelque 50 000 cassettes audio les reprenant sont vendues par an. Ses déplacements sont payés par les structures invitantes. «Les interventions sont payantes, de 3 à 5 euros l’entrée», relate Le Monde. Bien qu’étant Suisse de nationalité, l’intellectuel a réussi à se frayer son chemin en France. Pour Le Monde, «son dialogue en direct avec Nicolas Sarkozy, sa participation au Forum social européen (Saint-Denis) l’ont imposé comme la personnalité médiatique centrale de l’Islam de France. Taxé d’antisémitisme après sa tribune sur des intellectuels juifs, il défraye également la chronique avec ses déclarations sur le statut des femmes, notamment après sa formule en faveur d’un «moratoire» sur la lapidation. Sur le plan des idées, Tarik Ramadan est qualifié d’intégraliste. Pour lui, l’Islam est un englobant : «L’islam, dans son essence, dépasse le domaine de définition du mot religion, écrit-il. L’Islam investit le champ social et l’influence de façon conséquente». Une conception qui lui a attiré bien des foudres. Tout simplement parce que, sous couvert de modernisme, son discours crée de la séparation dans la société. Dire que toutes les valeurs sont contenues dans l’Islam, signifie qu’il n’y a pas d’autres valeurs précédant ou succédant à l’Islam.

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