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Senghor le politique-poète

Si le nom de Leopold Sedar Senghor est indissociable du Sénégal aux destinées duquel il a présidé avec brio pendant vingt années et de la théorie de la négritude qu’il avait inventée avec l’Antillais Aimé Césaire et dont il s’etait fait le chantre respecté, il l’est encore plus de l’image du poète, homme de lettres et francophile célébré partout dans le monde et honoré par des universités prestigieuses. L’ancien président sénégalais, décédé jeudi à l’âge de 95 ans, avait cette facilité de voguer d’un pan à l’autre de sa « triple vie » sans jamais faire de remous. Politique fin et stratège redoutable, il mettait le même souci du détail et la même fougue tranquille dans ses écrits, en homme pour qui la culture était « le fondement et le but ultime de la politique». A travers ses poèmes, Léopold Sédar Senghor, qui fut le premier agrégé africain en grammaire de l’Université de Paris en 1935, réussissait à refléter ce métissage délicat de négritude et de francophonie, dont il avait fait l’oeuvre majeure de sa vie. Il savait mieux que personne faire briller «les mille feux» de la langue française qu’il avait «goûtée, mâchée, enseignée», sans sacrifier pour autant ce «halo de sève» où baignaient, «naturellement nimbés» les mots de son enfance. «Nous sommes des lamantins qui, selon le mythe africain, vont boire à la source comme jadis lorsqu’ils étaient quadrupèdes ou hommes», se plaisait-il à dire. Cette source, Léopold Sedar Senghor en était un habitué, depuis ses premiers poèmes composés à 17 ans sous influences de Victor Hugo, Lamartine et Chateaubriand. Son premier recueil « Chants d’ombre », publié en 1945, fut abreuvé, ventilé de page en page d’une poésie lyrique, tour à tour plainte de l’exilé solitaire, nostalgie de l’éternel amoureux du pays noir, langueur du chantre de la femme … Senghor se fit aussi poète-historien. Dans son recueil «Hosties noires», sorti en 1948, il chanta en griot des temps modernes le combat des tirailleurs sénégalais morts pour la France. Suivirent d’autres recueils « Ethiopiques » en 1956, «Nocturnes» en 1961, «Elégies majeures», en 1979, autant de chroniques lyriques et lucides du monde de Senghor où Habib Bourguiba côtoyait Martin Luther King. Un mode d’emploi du brassage culturel pilier de la paix, véritable testament d’un politique poète qui aura légué au monde la quintessence de sa vision dans les cinq volumes de son ouvrage «Liberté».

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