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Textile : 50.000 emplois condamnés

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La fin des quotas imposés aux importations textiles inquiète beaucoup les industriels des pays en développement. Depuis le premier janvier 2005, les produits provenant de la Chine et de l’Inde peuvent désormais entrer en Europe et en Amérique sans restriction. Déjà soumis à forte pression par les produits asiatiques, le secteur du textile et de l’habillement au Maroc ne pourra plus compter sur les contingents accordés par l’OMC. Jusque-là et depuis dix ans, ce sont ces dispositifs qui garantissaient aux produits des pays du Sud de pénétrer dans les grands marchés. Les pays concernés jouissaient d’un accès préférentiel aux marchés des pays riches grâce aux quotas. Mais, estiment les analystes, ils risquent de voir leur avantage compétitif anéanti par la concurrence de la Chine et de l’Inde, qui disposent à la fois des matières premières et d’une puissante industrie textile. La fin de ce régime spécial ferme-t-elle la porte des marchés américains et européens aux produits du Sud ?
Cela est sûr, d’après la Confédération internationale des Syndicats libres. La disparition du système des quotas rendra le marché des USA hors de la portée des pays du Sud à cause, notamment, des avantages comparatifs dont jouit nettement l’Asie. A titre d’exemple, la part de la Chine dans le marché US passera de 16% en 2002 à 50% en milieu de l’année 2005.
Selon un rapport de l’OMC, la part de la Chine dans les importations de vêtements aux Etats-Unis devrait ainsi bondir de 16% actuellement à 50% après la suppression des quotas, et celle de l’Inde de 4% à 15%. Celle des pays sud-américains devrait chuter de 16% à 5%, ce qui est assez inquiétant.
Pour cette instance mondiale du commerce, il n’est point question de fixer un nouveau moratoire. Les différents pays doivent compter sur des accords bilatéraux et sur les grands ensembles pour protéger leurs industries. Mais les jeux sont déjà faits. Pour les économistes, la fin des quotas profite à la Chine et à l’Inde, et défavorise les pays les plus pauvres. L’Europe, soulignent plusieurs études, a déjà parachevé ses ajustements et ses réformes. Impact sera donc moins dur pour la France et l’Italie qui est bien positionnée dans les grandes marques et la distribution.
C’est surtout la revalorisation du SMIG, qui devait, à cette date, passer à un taux horaire de 8,78 à 9,66 dirhams, qui inquiète les opérateurs. De quoi creuser encore les avantages comparatifs largement favorables à la Chine et à l’Inde. Le SMIG marocain est dix fois plus élevé que la plupart des salaires versés dans certaines usines de ces deux pays. Face à ces écarts, seules la montée en gamme et la mutation du semi-fini vers le fini sont capables de sauver le secteur.
Selon les projections, plus d’un tiers des emplois sont menacés à terme. S’ajoute à cela le marasme du secteur qui a beaucoup de mal à capter les investissements nécessaires pour une mise à niveau et pour une intégration plus en aval dans la chaîne de production. La dernière note conjoncturelle plaçait le Textile aux côtés de la chimie et de la Parachimie, responsables du ralentissement industriel observé en 2004.
La campagne d’assainissement de 1996, la fin de certaines incitations fiscales, suivie depuis 2000 de la montée en puissance des marchés de l’Est ont hâté le déclin du secteur. «Nous sommes trop chers à cause des coûts de l’énergie, de la main-d’oeuvre et de la suspicion qui entoure les régimes économiques sous douane comme les Admissions temporaires», explique un industriel dont l’usine, qui employait 2.500 personne en 1999, tourne aujourd’hui avec à peine 500 emplois. 200.000 emplois se sont ainsi volatisés.
Selon une source issue du tribunal de commerce de Casablanca, le nombre d’entreprises actuellement en redressement judiciaire serait de 2.600. Le Maroc, l’ïle Maurice et le Bangladesh sont les pays qui auront le plus à souffrir de la fin de ces quotas, selon une récente étude de l’OCDE.
L’Union européenne, qui a déjà perdu 4 millions d’emplois ces dernières années en raison de la concurrence chinoise, pourrait encore perdre 15% de ses emplois actuels. La commission européenne a d’ailleurs mis en place un système de surveillance des importations chinoises. Le rapport de l’OCDE conseille aux pays aspirant encore à exporter des produits textiles d’investir dans la valeur ajoutée. Le design, le contrôle de qualité, la logistique et la distribution sont les meilleures pistes d’évolution des industries du Sud, note l’étude.
La mise à niveau reste cependant une simple injonction au Maroc où la politique de mise à niveau traîne toujours. Le fonds Fortex mis en place n’a pas encore eu les effets escomptés. L’OCDE recommande aussi une simplification des réglementations douanières archaïques, afin de réduire le temps d’accès aux marchés. Sans doute une piste à creuser pour la Douane marocaine.

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