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Un boulevard devant le PJD

À l’approche des élections communales prévues pour juin prochain, l’inquiétude assaille les candidats des partis classiques. Ces derniers ne sont plus sûrs d’eux-mêmes, mesurant pour la première fois la difficulté de la tâche (électorale) qui les attend. Origine de ce doute presque existentiel, le rouleau compresseur islamiste que rien ne semble pouvoir arrêter. En effet, ils sont partout les amis de Ramid, visibles sur tous les fronts : parlementaire, médiatique, politique, social, culturel…Faisant feu de tout bois pourvu que ça fasse parler d’eux. La dernière manifestation en date à Mégarama (Casablanca) participe de la même stratégie. Et ça marche comme sur des roulettes.
Profitant au maximum du vent de liberté qui souffle depuis quelque temps sur le pays, dopés par le silence assourdissant des partis politiques dits démocratiques ou libéraux, les islamistes du PJD surfent sur une vague dont ils maîtrisent tous les mouvements. Il ne suffit pas de les diaboliser par les mots pour changer la réalité. Tout à leur assurance, ils occupent un terrain déserté par les autres formations qui sont comme tétanisées, incapables de réagir. Tout se passe comme si personne ne pouvait leur apporter la contradiction. La résignation des perdants ?
S’offrant une communication à zéro dirham sur toutes leurs sorties bruyantes, bénéficiant du discrédit qui frappe les autres structures partisanes, labourant la société comme un champ fertile, ils n’ont que des atouts en main, engrangeant bénéfice sur bénéfice. La guerre en Irak ne leur ferait que du bien puisqu’elle leur permettra éventuellement de battre le rappel des troupes et de susciter de nouvelles sympathies dans l’opinion.
Et puis, on ne tombe pas dans leurs bras pour ce qu’ils expriment mais pour exprimer son mécontentement envers les politiques au pouvoir. Le pouvoir ! Sous couvert de religion et de morale, c’est ce qui fait vibrer les islamistes, c’est la finalité de leur action multiforme. Tout est fait, pensé en fonction de ça. Après avoir amélioré de manière substantielle leur présence au Parlement à l’issue des législatives de septembre 2002 (38 députés contre une dizaine en 1997), les voilà qui partent, fort de cet exploit, à l’assaut des communes du pays qu’ils sont décidés à contrôler grâce au matelas électoral dont ils disposent déjà.
Fidèles en cela à leur politique des petits pas qui consiste à aller par étapes vers la conquête du pouvoir, ils attendaient depuis longtemps l’occasion de prendre pied dans la démocratie locale pour ce qu’elle représente pour eux : un édifice institutionnel stratégique plus porteur que le Parlement où ils pourront, à visage découvert cette fois-ci, être en contact permanent avec la population en investissant, par la force du suffrage universel, chaque quartier, chaque rue, chaque bidonville… Ce travail, le PJD le fait déjà par le truchement du MUR (mouvement Unicité et Réforme) qui joue le rôle de grosse ONG agissant dans l’ombre pour faire des obligés parmi l’armée des défavorisés et des laissés-pour-compte. Avec les communes, ils légitimeraient non seulement les années d’activisme social antérieur, mais se serviront d’elles, grâce au budget qui leur est dévolu, pour développer et affiner au grand jour leur stratégie de pénétration de la société. Le rendez-vous de juin prochain serait pour eux une occasion inespérée pour montrer à des citoyens désespérés qu’ils peuvent, eux les islamistes contrairement aux autres, faire mieux en matière de gestion de la chose locale. Pour les prochaines communales, les candidats PJD ont un boulevard devant eux, essentiellement à cause de l’impéritie qui a marqué la gestion des collectivités locales au Maroc et de l’absence d’adversaires politiques capables d’incarner une alternative crédible.
Les électeurs pourraient être tentés, histoire de les essayer, de donner massivement leurs voix aux représentants PJD. Une question taraude cependant les esprits : et si les islamistes réussissaient dans le cadre d’un raz de marée à prendre les grandes villes du pays comme Casablanca, Fès ou Agadir ? Faut-il craindre ce scénario ou s’en réjouir ?
Une chose est sûre : les conséquences d’un tel événement ne sont pas négligeables. Imaginons un instant son impact à l’extérieur: les islamistes prennent le pouvoir communal au Maroc. Pays connu pour son ouverture et sa tolérance, le Royaume verrait son image passablement brouillée et le tourisme, principal secteur de l’économie, risquerait d’en pâtir sérieusement.

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