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Une crise salvatrice

A quelque chose malheur est bon, dit l’adage. Encore faut-il que le malheur ne soit pas synonyme de catastrophe. La crise entre le Maroc et l’Espagne est l’un de ses malheurs qui aura permis de voir plus clair dans les relations bilatérales et par-delà de mettre au goût du jour des dossiers depuis des lustres voués aux oubliettes. On discutera forcément des contentieux autour de Sebta et Melillia, en plus des îles toujours sous contrôle ibérique et d’ailleurs le communiqué publié à l’issue de la rencontre Benaissa-Palacio le signale sans ambages.
Cette crise a mis à nu également les véritables desseins de l’Algérie et montré quel point elle voue une animosité sans retenue à l’égard du Maroc et ses intérêts les plus élémentaires. Elle a aussi mis à nu les faiblesses de la diplomatie européenne qui pour une fois s’est trouvée confrontée à un problème mettant en danger ses relations avec un pays tiers, a donné l’image d’un cafouillage terrible. La présidence tournante est pour beaucoup. Malgré les dénégations espagnoles, les faits sont têtus. Plus têtus que le plus fort des toréadors.
Le secrétaire d’Etat américain, Colin Powell, a joué les médiateurs, permettant aux parties de conclure un accord, samedi, sur le retour au statu quo ante sur l’îlot. Washington est intervenu alors que les quinze peinaient pour trouver une position commune. La France, l’autre ex-puissance coloniale du Maroc, manifestait notamment quelques réserves sur l’opération militaire lancée par Madrid.La négation madrilène des faiblesses de la diplomatie européenne a eu un démenti sans équivoque de la même commission. Sa présidence s’est, en effet, empressée de remercier les Etats unis pour son rôle dans le règlement de la crise. Le porte-parole du président de la commission européenne Romano Prodi a souligné qu’«il y a eu de nombreux contacts avec les Européens, les Espagnols, les Marocains et aussi les Etats-Unis. Nous remercions les Etats-Unis pour leur rôle et sommes satisfaits que ces contacts aient permis de résoudre le différend». Le porte-parole, a répété que l’accord était une «excellente nouvelle pour les deux pays et pour l’Europe. Nous pouvons maintenant aller de l’avant et consolider nos relations avec un pays ami et voisin aussi important que le Maroc», a-t-il ajouté. Ceci étant, il y a lieu de rappeler la position qu’à la faveur de cette crise, le front intérieur est apparu plus soudé qu’on ne le laissent deviner les analystes algériens. Toute la classe politique, sans exception aucune, a appelé à la mobilisation pour faire face à l’agression espagnole. Ceux qui ont légitimement critiqué l’action gouvernementale l’ont toutefois fait dans un souci de préserver l’intégrité territoriale du pays par tous les moyens.
Après le dénouement de la crise, les dirigeants politiques marocains ont maintenu un ton à même de pousser l’Espagne à revoir ses positions à l’égard du Maroc. Khalid Alioua, membre du Bureau politique de l’Union socialiste des forces populaires (USFP), a déclaré à l’AFP que le Maroc «devrait maintenant aborder avec son voisin ibérique le dossier des deux villes marocaines de Sebta et Melilla».
M. Alioua a estimé que l’accord sur le rocher contesté est « le point de départ pour une normalisation des relations entre le Maroc et l’Espagne». Quant à Mustapha Ramid, député du Parti de la justice et du développement (PJD), il a qualifié cet accord de « pas positif», estimant qu’il permettra par la suite au Maroc de «libérer les deux villes marocaines de Sebta et Melilla et les ÃŽles Zaffarines sous contrôle espagnol». Il a appelé les Marocains à «visiter leur île» puisqu’il s’agit, selon lui, d’une «partie incontestée du territoire national marocain». «Les marocains doivent s’y rendre d’une manière spontanée, comme ils le font pour aller vers les autres régions du royaume», a-t-il ajouté. «Cet accord est un acte positif», a estimé pour sa part Mustapha Miftah, membre du Conseil de la présidence du parti de la Gauche socialiste unifiée (GSU). «Le Maroc doit maintenant entamer des discussions avec l’Espagne pour qu’il puisse exercer sa souveraineté sur toutes ses terres », a-t-il ajouté, en allusion à Sebta, Melilla et aux ÃŽles Zaffarines. Certes, on ne peut pas crier victoire. On ne peut pas non plus faire valoir un quelconque triomphalisme. Mais une chose est sure : la crise Leila a eu l’effet d’un traitement de choc. Ni la cellule de réflexion proposée par feu Hassan II n’a pas pour autant poussé les ibères à prendre le train des négociations. Maintenant que Leila a placé au devant de la scène non pas uniquement la situation du rocher, petit qu’il est, mais de toute la perception démocratique de l’Espagne et ses résistances colonialistes, la rétrocession des deux présides et des îles est devenue plus que jamais d’actualité. Ce constat n’a pas échappé à nos confrères tunisiens Tunis-Hebdo. Cet hebdomadaire a écrit dans son édition d’hier que le différend entre le Maroc et l’Espagne quant à l’îlot Leïla aura «au moins permis aux marocains de poser un problème essentiel, celui de sa souveraineté sur plusieurs parcelles de son territoire occupées par l’Espagne depuis 1668».
L’hebdomadaire tunisien de langue française relève que depuis plusieurs mois déjà, les relations «n’étaient pas tout à fait normales entre Rabat et Madrid. Au refus du Maroc-et c’est son plein droit -d’accorder à l’Union européenne ce dont profite à gogo l’Espagne, des concessions de pêche à vil prix dans ses eaux territoriales (est venu récemment s’ajouter) le compromis trouvé entre l’Angleterre et l’Espagne à propos du partage de la souveraineté sur Gibraltar, ce grand caillou qui surveille l’entrée de la méditerranée».

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