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Une Zaouia nommée Al Adl Wal Ihsane

© D.R

Abdeslam Yassine, inconnu au bataillon des islamistes avant 1970, commença à faire parler de lui lorsqu’il quitta avec fracas la Zaouia Boutchichia. Pour le Cheikh visionnaire, cette zaouia, qu’il a intégrée en 1965, commençait à s’écarter de l’Islam.
En 1968 déjà, Yassine est suspendu de ses fonctions au ministère de l’Education nationale. Le fils de pauvres paysans de la famille des Aït Baha aura ainsi largement le temps de préparer sa guerre contre le régime marocain. Et une succession d’associations jamais reconnues, de «Oussrat Al Jamaâ» à «Al Adl WaL Ihsane» en passant par « Al Jamaâ Al Khayriyah».
Avant de passer à cette étape qu’il qualifie de « Jihad structuré », il se fend, en 1974, de la célèbre lettre (L’Islam ou le déluge) adressée à Feu Hassan II et qui lui vaudra trois ans et demi d’internement. Interdit de prêche en 1978, il tente le coup avec la revue «Al Jamaâ», interdite après quelques numéros. En décembre 1983, il récidive avec «Parole et acte» qu’il voulait comme réplique aux propos de SM le roi Hassan II à l’occasion du 15ème siècle de l’Hégire. Et récolte deux ans de prison.
L’appellation «Al Adl Wal Ihsane» est adoptée en septembre 1987. Près de deux ans après, le Cheikh est assigné à la résidence surveillée. Un véritable fonds de commerce pour la Jamaâ et son chef : les médias étrangers n’ont de plumes ou de caméras que pour le reclus de Salé.
Le 28 janvier 2000, il retente un autre numéro de l’un de ses sports favoris et écrit à Sa Majesté le Roi Mohammed VI une lettre intitulée «Mémorandum à qui de droit».
En mai de la même année, il fait une tournée à travers le pays. Délire dans les rangs de ses adeptes dont certains s’arrachent les graines de terre que les pieds du Cheikh ont foulées. L’on s’aperçoit soudain que la Jamaâ, qualifiée de secte aussi, a des foules derrière elle, alimentées de prêches et de visions de Yassine, l’ex-inspecteur de l’enseignement secondaire devenu super-star.
Ce sont ces mêmes foules qui viendront grossir diverses manifestations et qui se démarqueront par une organisation stricte que d’aucuns qualifient de «stalinienne» pour une association qui fait de la prédication, du renouveau religieux, de l’éducation et de la bienfaisance ses mots d’ordre. Avec le souci politique qui fait partie intégrante de la pensée d’Al Adl, lit-on dans la littérature de la Jamaâ de Yassine qui s’était d’ailleurs toujours interdite d’intégrer le jeu politique. Allant jusqu’à tirer à boulets rouges sur les autres mouvances islamistes (PJD notamment) «domestiquées» par le pouvoir. Pour les listes, pas de quartier: l’Islam est le salut de l’être et de la communauté. La justice et la bienfaisance sont des finalités, mais sans violence.
En 1990, Al Adl officialise l’existence d’un Cercle politique chapeautant les autres structures. Mission, parmi d’autres figurant au programme, «la préparation effective de l’Etat islamique».
En attendant, quartiers populaires, carrément tous les espaces publics et surtout les très «rentables» campus universitaires sont envahis par les listes. Quand ce n’est pas le caritatif lors des fêtes religieuses ou la rentrée scolaire, ce sont de longues missions de prédication accomplies par groupes. Un travail de mobilisation sans relâche pour préparer le «grand soir» ou ce que Cheikh Yassine appelle la qawma (soulèvement général).
Les adlistes ne s’en cachent pas et Nadia Yassine la première quand elle affirme que Al Adl arrive et que la monarchie vivrait ses derniers moments. Un délire qui lui vaut un procès en justice et dont elle profite pour livrer un show 100 % adlistes, avec leur invocation, religieuse, mais lourde de significations. L’internaute qui se serait aventuré sur le site Web de Cheikh Yassine ne manquera d’ailleurs pas de relever cette autre citation, figurant en une place de choix de jeudi 30 juin. Tout un «programme» : «nous disons aux gouvernants que s’ils essaient de résister, ils récolteront des tempêtes». La même phrase-avertissement est contenue dans un prêche enregistré sur cassette audio datant d’avril 1982…
La même chose revient sur la langue des adeptes du cheikh, comme une épée de Damoclès. Où Al Adl, association toujours non reconnue, en veut-elle venir?

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