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Villes-Campagnes : Le grand écart

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Le Maroc reste globalement un bon élève. C’est en gros ce qui ressort du rapport national du HCP (Haut-Commissariat au Plan) sur les OMD (Objectifs du millénaire pour le développement). Des progrès importants ont été atteints dans la majorité des secteurs couverts par les OMD mais bien évidemment de nombreuses difficultés persistent encore. Des difficultés qui sont majoritairement dues aux inégalités encore béantes qui existent entre le milieu urbain et le monde rural. C’est le cas notamment pour le premier Objectif du millénaire qui vise à réduire la pauvreté extrême et la faim à l’horizon 2015.

Sur ce plan, le Royaume peut déjà se targuer d’avoir atteint cet objectif avant deadline prévue dans deux ans. En effet, le Maroc a réduit le taux de la pauvreté, mesurée à 1 dollar US par jour et par personne, de 3,5% en 1985 à moins de 0,3% en 2011, contre une valeur cible de 1,8% à l’horizon 2015 des OMD. Le pays a pratiquement mis fin à la pauvreté absolue et réduit, dans de fortes proportions, la pauvreté relative. Au total, en 2011, 6,3 millions de Marocains étaient en situation de pauvreté (2,0 millions) ou de vulnérabilité (4,3 millions). La majorité des pauvres sont des ruraux puisque le milieu rural regroupe 67,5% des pauvres et 58,8% des vulnérables. «Bien que ces écarts soient encore notables, ils observent une réduction soutenue depuis 1990, devant être nécessairement activée dans les années à venir», expliquent les auteurs du rapport.

Santé et éducation, le talon d’Achille

Les écarts sont plus criants entre le monde rural et l’urbain dans les domaines de la santé et de l’éducation. Mais encore fois, cela ne devrait pas du tout occulter les efforts déployés par le Maroc dans ces deux domaines. En effet, le Royaume a fait des pas de géant dans le secteur de l’enseignement ces vingt dernières années dans la scolarisation et la lutte contre l’analphabétisme. Mais de grands efforts restent à faire, en l’occurrence dans le préscolaire où encore fois les inégalités se font ressentir. «L’examen de l’évolution des effectifs des enfants préscolarisés,  entre 2008-2009 et 2011-2012, a fait ressortir  une tendance à la baisse de 5,4% pour toute la période. Par sexe, la même tendance a été relevée, chez les filles, avec un fléchissement de l’ordre de 5,0% durant cette période. En milieu rural, cette tendance a beaucoup plus été accentuée durant la période 2009-2012, avec une régression des effectifs de l’ordre de 8,9%», lit-on dans le rapport du HCP.

Cette évolution lente est due, selon les auteurs du rapport, à la qualité de l’enseignement dispensé, sa couverture spatiale et son caractère privé qui contraint les parents à s’acquitter des droits d’accès. La pauvreté qui sévit en milieu rural handicape  la promotion de l’enseignement préscolaire. Dans la santé, notamment juvénile et maternelle, le principal défi était de réduire la mortalité des mamans à l’accouchement et les bébés à la naissance. Dans ce sens, le taux de mortalité infanto-juvénile, au Maroc a fortement diminué durant les trois dernières décennies pour atteindre 30,5 pour chaque mille naissances vivantes (NV) en 2007-2011. Le pays reste proche de l’Objectif du millénaire et vise à atteindre 25 décès pour 1000 NV en 2015. Un effort devra être fait (encore) en milieu rural où l’accès aux soins infanto-juvéniles est plus difficile. Pour la mortalité matrenelle, le taux a diminué de près de 66% en vingt ans, passant de 332 décès maternels pour 100.000 NV en 1992 à 112 en 2010. Sachant que l’objectif 5 du millénaire pour le Maroc est d’atteindre 83 décès pour 100.000 naissances vivantes.

Encore une fois, le taux de mortalité maternelle en milieu rural est deux fois plus important qu’en milieu urbain (148 contre 73 décès pour 100.000 NV) avec un taux d’accouchement en milieu surveillé ne dépassant guère les 55%. Si les femmes, notamment rurales, accèdent moins facilement aux soins, elles deviennent, tout comme les citadines plus autonomes dans la vie de tous les jours.

Plus ou moins de parité
 
Cela est plus vrai dans l’enseignement où l’indice de parité entre les sexes au niveau national, mesuré par le rapport du taux des filles à celui des garçons dans l’enseignement, a atteint en 2011-2012, 94% au primaire, 78% au secondaire collégial, 92% au secondaire qualifiant et 91% au supérieur. «En milieu rural, cet indice a plus que doublé dans l’enseignement primaire en passant de 42% en 1991 à 99% en 2012», disent les responsables du HCP. En revanche, l’accès à l’emploi reste plus difficile pour la gent féminine. «L’analyse de l’évolution de la participation de la femme à travers les taux d’activité montre que l’implication des femmes dans l’activité économique reste limitée. En effet, au niveau national le taux d’activité des femmes en 2012 était de 24,7% contre 73,6% pour les hommes», révèle le rapport. Le pays travaille cependant à renforcer la parité dans son arsenal juridique.

Le rapport revient sur le processus de réformes de l’arsenal juridique par l’amendement de plusieurs lois (code de la famille, code pénal, code du travail, code de la nationalité, code électoral, la charte communale,…). «Ce processus a été couronné par une nouvelle Constitution adoptée en juillet 2011. La nouvelle Constitution de 2011 stipule que la femme jouit, sur un pied d’égalité avec l’homme, de tous les droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social et environnemental», lit-on dans le document du HCP. A noter qu’un plan gouvernemental pour l’égalité (2012-2016) «ICRAM», a été lancé pour atteindre une convergence des diverses initiatives prises en vue d’intégrer la dimension genre dans les politiques publiques et les programmes de développement.

Faible prévalence

S’agissant de la lutte contre certaines maladies comme le VIH-Sida, des progrès ont été réalisés. Bien évidemment, la prévalence de cette maladie reste relativement faible au Maroc. Cela dit, la dynamique locale de l’épidémie continue à prévaloir. Ainsi, au cours de la période 2008 à 2012, la région du Sous-Massa-Drâa a regroupé près de 25% des cas notifiés, talonnée de près par la région de Marrakech-Tensift-Al Haouz avec 21% des cas et la région du Grand Casablanca 11%. Ces trois régions englobent à elles seules plus de la moitié des cas notifiés au Maroc au cours des cinq dernières années. «L’incidence des IST reste élevée. Elles figurent parmi les principales causes de consultation au niveau des établissements de Soins de santé de base (SSB). Depuis 2001, plus de 350.000 nouveaux cas d’IST sont annuellement notifiés. En 2012, ont été notifiés 439.000 cas d’IST», lit-on dans le rapport. En matière de prévention, les programmes de prévention auprès des populations les plus exposées aux risques d’infection et population vulnérables ont été étendus. «En 2012, il était prévu de couvrir : 60.000 personnes parmi les populations les plus exposées aux risques d’infection et 80.000 personnes vulnérables dont les jeunes et les femmes. D’autres populations vulnérables, 15.000 migrants, 10.000 prisonniers, 27.000 routiers et 18.000 ouvriers et ouvrières, ont également été touchés», ajoute le rapport.

Le défi vert

Dans le domaine du développement durable, une volonté politique existe pour préserver l’environnement et rationaliser l’exploitation des ressources naturelles. Mais le pays fait face à plusieurs défis sur ce niveau. En 2011, la superficie forestière est évaluée à 9,7 millions ha. Si l’on considère uniquement la superficie des formations forestières (non compris l’alfa) qui est de  près de 6,4 millions ha, le taux moyen de boisement du pays est de l’ordre de 9%, ce qui est en deçà du taux optimal (15 à 20%) nécessaire à l’équilibre écologique environnemental. De même, la dégradation de la qualité de l’air dans les grandes agglomérations urbaines devient un problème préoccupant qui pèse sur la santé publique.

«L’air est de plus en plus pollué, surtout  au niveau des grandes agglomérations qui regroupent à la fois des sources mobiles, en l’occurrence le transport urbain et des sources fixes de pollution, notamment les installations industrielles, énergétiques et artisanales. Le parc automobile marocain est responsable de 50 à 60% de la pollution», note le rapport. Mais le Maroc, animé par une volonté politique au plus haut niveau de l’Etat et renforcé par l’engagement de la société civile et du secteur privé, est résolument décidé à atteindre le septième objectif dans le classement des OMD. Une charte nationale de l’environnement et du développement durable, adoptée en 2011, constitue désormais un référentiel global et structurant pour les politiques publiques sectorielles.

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