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Alain Juppé, un ministrable en devenir

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Quelle est la meilleure recette d’un homme politique, dont l’étoile est en train de pâlir, de dire qu’il existe encore et qu’il est disponible pour le service ? C’est celle qui consiste à publier un livre, à s’assurer une tournée de promotion en vue de glisser de temps à autre des petites phrases qui en disent long sur la vivacité de son appétit politique. C’est ce qui vient d’arriver à Alain Juppé, ancien Premier ministre de Jacques Chirac et actuel maire de Bordeaux. Il publie cette semaine un livre de confessions politiques au titre gastronomique avec des relents écologiques : «Je ne mangerai plus de cerises en hiver» aux éditions Plon.
Après avoir été qualifié par Jacques Chirac de «meilleur d’entre nous», une suprême distinction qui l’a plus plombé que servi, Alain Juppé a vécu une puissante déflagration au crépuscule de l’ère Sarkozy. De retour du Canada où il était parti cuver ses défaites et ses ennuis judicaires dans l’affaire des emplois fictifs du RPR de Paris qui lui avait valu une lourde sentence d’inéligibilité, Alain Juppé avait occupé le haut du pavé du premier gouvernement de François Fillon dans un ministère qui en disait plus sur l’importance du périmètre politique du personnage que de son rayon d’action. Au bout de quelques jours seulement, la mort dans l’âme, Alain Juppé a dû quitter ce gouvernement.
C’est qu’entre-temps, il avait trébuché lors des législatives de 2007. Les Bordelais ne l’ont pas jugé apte pour les représenter au Palais Bourbon.
Un violent déracinement qui venait exacerber une blessure déjà béante du statut du «mal aimé» sur qui le sort semble impitoyablement s’acharner. Devant les soupirs moqueurs des ses anciens amis et les quolibets sadiques de ses adversaires, Alain Juppé dut avaler toute sa fierté et son amour propre de personnage à épaisseur nationale réduit au rang  d’un agent local sans réel pourvoir ni vraie aura. Cette grande traversée de l’amertume dura jusqu’aux municipales de 2008 où la mairie de Bordeaux ouvrit grands ses portes à son conquérant. Alain Juppé, la renaissance. Alain Juppé pourra toujours ressasser «la leçon de ses maîtres : En politique, on ne disparaît que quand on est mort physiquement».
Depuis cette victoire, il ne se passe pas une rumeur de remaniement sans que les échotiers annoncent le retour probable d’Alain Juppé au devant de la scène nationale. Et la meilleure preuve que le rapprochement entre les frères ennemis d’hier est à l’œuvre et à trouver dans l’insistance d’Alain Juppé de prendre un distance publique à l’égard de la gouvernance de Nicolas Sarkozy en se permettant même le luxe de l’écorcher. Sur le concept cher au président de la République «la rupture», et qui a été le signe le plus distinctif de sa démarche, Alain Juppé le balaie d’un revers de manche : «Je ne crois pas qu’on fasse table rase (…) Un pays a son histoire, ses résistances au changement. Il faut en tenir compte et d’ailleurs c’est ce qu’on fait quand on diffère la réforme des lycées ou qu’on remet en chantier le décret sur les enseignants-chercheurs». Et d’insister au cas où le message ne serait pas bien saisi : «Je n’aime pas beaucoup l’idée selon laquelle nous sommes en situation de rupture totale par rapport à tout ce qui a existé auparavant».
Alain Juppé analyse les difficultés que rencontre Nicolas Sarkozy et croit avoir identifié le mécanisme qui engendre ses blocages. Pour lui, Nicolas Sarkozy «s’est attaqué à tous les dossiers, et sur tous les fronts. C’est peut-être cela le problème».
 Et s’inspirant de sa propres expérience, il argumente son analyse: «En 1995, j’ai fait l’erreur de lancer trop de chantiers en même temps (…) Il y a un peu de cela aujourd’hui. Il faut changer, mais sans trop perturber (…) le corps social, surtout en situation de crise».
Après avoir bien marqué le terrain de son action et décrit le profil de sa possible contribution, Alain Juppé exprime sa totale disponibilité à rejoindre l’équipe Sarkozy : «Je souhaite que Nicolas Sarkozy réussisse et je le lui ai dit. Si je peux l’aider je le ferai bien volontiers. Cela dit, je garde ma liberté entière de jugement. Quand j’ai envie de dire des choses qui ne se résument pas à un amen, je le dis». Alain Juppé décrit même les conditions de son retour probable au gouvernement : «S’il faut un grand rassemblement autour du président pour faire face à une crise majeure, ça peut être une hypothèse».

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