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La busherie de Falloujah

© D.R

La situation était chaotique à Falloujah, après l’offensive lancée conjointement par les Forces de l’occupation américaine et les éléments de la Garde nationale irakienne. La prise de l’hôpital de la ville avait précédé cet assaut brutal, qui n’épargne ni les lieux de culte ni les dispensaires ou autres centres de santé.
En effet, une clinique a été durement bombardée et le sort de ses occupants demeurait inconnu hier. Ce genre d’exaction n’est pas insolite car, depuis l’invasion de l’Irak, l’armée américaine n’hésitait jamais à pilonner des mosquées ou autres lieux sacrés. Inutile de s’attarder sur la profondeur de la sacralité d’un lieu où l’on prodigue les premiers soins, où l’on opère des blessés écrasés sous le feu américain, où l’on sauve des vies…
Mais, il n’y a pas de crainte à se faire, comme l’a subtilement souligné Donald Rumsfeld, fort de ses arguments et nanti d’une assurance qui laisse de marbre. Le secrétaire d’Etat à la Défense a été on ne peut plus clair sur la question : « Il n’y aura pas beaucoup de morts parmi les civils (…) en tout cas les Américains n’en feront pas et ne toucheront aucun lieu sensible ou sacré ».
Rumsfeld a justifié la dextérité de ses boys par les entraînements qu’ils ont suivis et leur capacité à effectuer des interventions militaires chirurgicales. Très chirurgicales, même, au point de ne pas se rater mutuellement lors des célèbres bavures qu’ils ont à leur actif. On s’en souvient.
Ainsi, devrait-on conclure que les armes américaines sont spécialement conçues pour buter du terroriste, en épargnant les civils et les innocents. Déjà que le concept de terroriste est fatalement détourné de son essence pour qualifier « tout ce que nous autres Américains ne sentons pas ». Sachant que le quart de la population civile est toujours assiégé à Falloujah, outre les valeureux résistants irakiens qui ont fait le choix de mourir, c’est à un triste sort auquel seront livrés ces civils, sacrifiés par les leurs sur l’autel de l’individualisme.
Cette offensive qui écrase, dans le tas, femmes, enfants et résistants, a suscité l’indignation de l’ensemble de la communauté irakienne. À commencer par les plus hauts dignitaires musulmans, ceux-ci se sont dit outrés par cette odieuse exaction.
Le secrétaire général de l’Instance des Ouléma musulmans, en Irak, n’a pas mâché ses mots en se prononçant sur le sujet. «Nous avions de tout temps reconnu que les éléments de la Garde nationale et de la police irakienne étaient là pour défendre les valeurs de l’Irak et des Irakiens et qu’il ne fallait aucunement s’en prendre à eux. Là qu’ils se retrouvent associés à l’occupant pour massacrer les Irakiens et les Irakiennes de Falloujah, ils auront ainsi choisi leur camp (…) Nous les avons exhortés de se retirer et de ne pas s’associer à cette entreprise aussi odieuse que meurtrière », a-t-il déclaré en substance à la télévision qatariote Al-Jazeera.
À Bagdad, un important parti politique sunnite, le Parti islamique irakien, a quitté le gouvernement de transition pour protester contre l’attaque de Falloudjah, « dont est victime la population », selon l’un de ses hauts responsables, Mohsen Abdoul Hamid. Parmi la population, le même son de cloche est perceptible dans les quatre coins d’Irak. « Les forces irakiennes tuent leurs frères et soeurs pour faire plaisir aux Américains », laisse-t-on entendre.
Il faudrait avoir le courage de reconnaître que même durant les pires crises de tyrannie qu’il pouvait avoir, Saddam Hussein n’a jamais usé de moyens de cette envergure pour écraser une quelconque rébellion. Iyad Allaoui et ceux qui représentent l’autorité irakienne doivent, certainement, avoir la mémoire courte. En tout cas, ce n’est le culot qui leur fait défaut.
La condamnation est, ainsi et sur toutes les langues, sans appel. Reste à savoir quel avenir aura cette force irakienne qui est d’ores et déjà assimilée à l’occupant et qualifiée de collaboratrice. Même au cas où les dirigeants en place arrivent à instaurer un certain calme, ils l’auront réalisé de façon absolutiste. Une dictature succède à une autre. Le bout du tunnel semble loin, très loin.

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