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La France redessine la laïcité

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M. Chirac devait se prononcer comme atten-du en faveur d’une mesure législative pour interdire le port ostensible de signes religieux ou politique à l’école, comme le recommande la Commission Stasi sur le respect de la laïcité. On admet cependant que cette approche ne règle pas tous les problèmes, comme ceux posés par les horaires spécifiques pour les femmes dans les piscines municipales ou le port de signes religieux par des fonctionnaires, par exemple. C’est sur fond d’une Europe marquée par une recrudescence des tensions intercommunautaires, du racis-me, des mouvements populistes et nationalistes, que la France est à l’heure des choix : dans un contexte socio-politique enflammé, Jacques Chirac devait se décider pour ou contre une loi qui redessine les contours de la laïcité et détermine les nouvelles orientations de la politique d’intégration de l’Hexagone. Le problème du voile, que la majorité des pays de l’UE se contente de traiter au niveau des écoles, a atteint en France des dimensions « constitutionnelles ». La question du port du voile islamique par des jeunes filles, qui a relancé ces derniers mois le débat sur la laïcité en France, a en effet largement débordé le cadre de l’école pour toucher celui de la fonction publique au sens large. Depuis 1905, une loi consacre la séparation de l’Église et de l’État, et l’un de ses effets directs est la neutralité de l’enseignement public. Le Conseil d’État, chargé d’arbitrer les contentieux entre l’Administration et les particuliers, avait émis en son temps un avis qui est jusqu’à ce jour la seule référence en matière juridique : il est interdit d’interdire par principe le port de signes religieux quels qu’ils soient, sauf en cas de manquement aux règles fondamentales de l’enseignement, d’atteinte à l’ordre public ou de prosélytisme. Conséquence : un foulard, une kippa ou une croix ne sont jamais des signes ostentatoires en soi, et l’appréciation devra se faire au cas par cas, au regard des circonstances. La polémique atteint rapidement le microcosme politique, et l’idée d’une loi fait peu à peu son chemin. Le débat se déplace du contexte politico-social pour entrer dans la sphère du Législatif. En avril, la grande question est enfin posée : faut-il une loi pour interdire le voile ? En fait, la nécessité d’imposer des restrictions au port d’insignes religieux à l’école emporte l’adhésion de la majorité des ministres, parlementaires et responsables concernés. La polémique se situe surtout au niveau de la nécessité et de l’opportunité de légiférer. Les tenants de l’instauration d’une loi s’attachent d’abord à protéger la laïcité. Les opposants contestent l’opportunité d’une loi qui risque au contraire de marginaliser encore plus ces communautés, d’entraver leur intégration déjà problématique par son caractère exclusif et de paver ainsi la voie aux mouvements islamistes qui proposeraient une fausse identité de substitution à des jeunes sans repères définis. Mais au-delà du débat socio-législatif, ce sont deux valeurs constitutionnelles, en apparence contradictoires, qui sont en jeu : le principe de la laïcité de l’enseignement et le principe de liberté de conscience, également constitutionnel, consacré par la convention européenne des droits de l’homme. Mais, placer le débat sous l’angle d’un affrontement entre deux principes serait néanmoins s’engager dans la mauvaise voie. Il faudrait plutôt considérer ces deux valeurs comme étant complémentaires : la notion de laïcité, en instaurant la neutralité, contribue à protéger la liberté de conscience, en empêchant une religion d’acquérir plus d’importance qu’une autre. La laïcité n’est pas la négation des croyances mais leur seul moyen de coexistence pacifique. C’est sans doute le sens à donner aux prises de positions du président Chirac : le chef de l’Etat français, devant 400 personnes –responsables politiques, religieux, syndicaux, associations – a prononcé un discours qui devait traiter de la laïcité « dans un cadre plus large » que celui d’un débat étriqué. Ce devait être l’occasion pour lui de parler de la France, des « valeurs de la France et des fondamentaux de la République », précisent des sources proches de l’Elysée. Elles affirment aussi que M. Chirac devait également écarter l’idée avancée par la Commission Stasi, de faire de l’Aïd el-Kébir et du Kippour juif des jours fériés dans les écoles.

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