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Meurtre de Hariri : Le double langage du gouvernement libanais

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Le Premier ministre libanais Najib Mikati a promis de coopérer avec le tribunal de l’ONU sur l’assassinat du dirigeant Rafic Hariri mais devra différer les décisions liées à cette instance honnie par le Hezbollah, poids lourd de son gouvernement. Le puissant parti armé, majoritaire avec ses alliés au sein du gouvernement, rejette toute décision émanant du Tribunal spécial pour le Liban (TSL), qui a rendu fin juin quatre mandats d’arrêt visant des membres du Hezbollah. Pomme de discorde dans le pays, ce tribunal chargé de poursuivre les auteurs de l’assassinat en 2005 de l’ex-Premier ministre Rafic Hariri est considéré par le parti chiite comme un «complot israélo-américain» visant à le détruire en lui faisant endosser le meurtre de ce dirigeant sunnite populaire. Côté discours, le contraste est clair entre la position du Hezbollah, qui a exclu l’arrestation de ses membres, et celle de M. Mikati, pour qui Beyrouth ne doit pas renier ses engagements internationaux. «La position du nouveau gouvernement est délibérément vague et ambiguë car il est nécessaire d’être flexible pour traiter des dossiers aussi explosifs», explique Imad Salameh, professeur de sciences politiques à l’Université libano-américaine Officiellement, «M. Mikati soutient le tribunal. Une partie de son gouvernement peut s’y opposer, une autre peut le soutenir», dit-il. «Ainsi, il ne sera pas tenu pour personnellement responsable par l’opposition» pro-occidentale, qui accuse le Hezbollah de dicter sa volonté sur le Liban. Le Premier ministre est toutefois conscient que sa marge de manœuvre est très étroite, soulignent les analystes. «Le gouvernement libanais ne peut pas faire grand-chose pour aider vraiment le tribunal», affirme Hilal Khashan, professeur de sciences politiques à l’Université américaine de Beyrouth. Moustafa Badreddine, Salim Ayyash, Assad Sabra et Hussein Anaissi, tous membres du Hezbollah, sont accusés d’avoir d’«avoir tué Rafic Hariri ainsi que 21 autres personnes en usant d’explosifs», selon un haut responsable des services de sécurité libanais. Beyrouth dispose de 30 jours ouvrables pour les arrêter à compter de la date de la remise de l’acte d’accusation. «Quand ces 30 jours se seront écoulés, le gouvernement informera le tribunal qu’ils sont introuvables», explique M. Khashan. «Techniquement, c’est tout ce qui lui est demandé». Autre dossier crucial: le financement de ce tribunal international auquel Beyrouth participe à hauteur de 49%. «Le Premier ministre peut se dérober en évitant par exemple d’évoquer cette question, d’autant plus que l’opposition n’est pas représentée au gouvernement», estime M. Khashan. Le Liban n’avait déjà pas payé sa part pour 2011, le Hezbollah et ses alliés s’étant opposés à la clause concernant ce financement lors du débat au Parlement sur le budget. M. Mikati peut différer la question du financement «en ne la mettant pas à l’ordre du jour du Conseil des ministres», selon Jean Azizi, analyste politique. «Et si la question du financement est soulevée dans le cadre du débat sur le budget, le Hezbollah et ses alliés peuvent bloquer la discussion soit au sein du gouvernement, soit au Parlement». Le TSL est à l’origine de la crise qui a fait tomber en janvier le gouvernement d’union du pro-occidental Saâd Hariri, fils de Rafic, après la démission des ministres du camp du Hezbollah, qui avait tenté en vain de pousser M. Hariri à désavouer le tribunal.

  Natacha Yazbeck (AFP)

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