Politique

Ismaïl Alaoui : «Il faut accélérer le rythme des réformes»

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ALM : Dans votre programme électoral, vous endossez l’expérience et le bilan des gouvernements de 1998 et 2002. En êtes-vous totalement satisfaits ?
Ismaïl Alaoui : Nous sommes un parti responsable et nous assumons tous nos choix. Nous avons participé à l’ouverture de 1998 qui a mis fin à des décennies de luttes stériles par certains de leurs aspects, tout en estimant que la solution de 1998 et le gouvernement d’alternance consensuelle qui en a résulté étaient les fruits de ces décennies de lutte.
Nous avons toutes les raisons d’être fiers des acquis historiques (c’est le mot qui convient) qui ont été réalisés au cours des 9 dernières années sur les plans politique, économique, social et culturel. Mais, tout en étant fiers de ces acquis qui ne sont pas tombés du ciel mais qui sont le résultat de luttes et de convergence heureuses entre les options du mouvement démocratique national et celles de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, nous considérons qu’il reste beaucoup à faire. Il reste beaucoup à faire car le déficit est énorme, car les attentes légitimes de notre peuple, dans un monde en perpétuels mutations et progrès, sont à l’aune du déficit accumulé pendant des décennies. Nous ne sommes donc pas entièrement satisfaits.

Justement, quels sont ces secteurs ?
Il y a, comme nous l’avons signalé dans le préambule de notre projet de programme, présenté à la presse mardi 3 juillet, de nombreux déficits qui perdurent. Dans le domaine de l’Education où les objectifs fixés en matière de généralisation de l’enseignement, de mise en œuvre de la loi sur la scolarisation obligatoire jusqu’à 16 ans, de promotion de la qualité, de décentralisation véritable et efficiente et la liste n’est pas close, hélas, n’ont pas été atteints.
Dans le domaine de la moralisation de la vie publique et des relations entre l’Administration et les citoyens, rien de fondamental n’a été réalisé. Dans le cas de la réforme et de la modernisation du système judiciaire, le manque de moyens, les lacunes en termes de ressources humaines n’ont pas permis l’adéquation entre les avancées législatives (justice économique et code de la famille, particulièrement) et la réalité concrète. C’est aussi le cas en matière sociale où les efforts entrepris pèchent par le manque de détermination et de volonté d’aboutir vite. C’est donc un problème de pilotage général des réformes et du rythme du changement. Nous sommes pour une accélération de ce rythme et un pilotage encore plus efficace.

Vous axez une bonne partie de ce programme sur le monde rural. Peut-on dire que ce dernier devient une priorité pour vous ?
Le monde rural a toujours été une priorité pour notre parti. Cela remonte aux années 1950 avec Maâti Yousfi et Ahmed El Madi dans le Tadla et aux années 1960 et 1970 pour le Gharb et le Haouz pour me limiter à ces 3 régions. Nous estimons que le règlement des problèmes que connaît le monde rural est vital pour l’avenir de notre pays. Cette réalité s’impose encore plus cette année où nous commençons, en ce début d’été, de vivre les difficultés supplémentaires qu’occasionne la sécheresse dans la plupart des régions du pays.
Nous tirons la sonnette d’alarme et nous estimons que la solution des difficultés du monde rural et de l’agriculture devra être le problème numéro un de la décennie 2007-2017 et pas seulement de la période 2007-2012. Les retards enregistrés dans ces domaines seront lourds de conséquences si l’on n’y prend pas garde.

Vous êtes pour une réforme constitutionnelle alors qu’au sein de la Koutla une telle revendication semble avoir été mise en veilleuse. Qu’en est-il exactement ?
Vous vous méprenez. La Koutla demande une réforme constitutionnelle. Cette revendication sera au-devant de la scène après les élections, sachant que les partis de la Koutla n’envisagent pas de réforme constitutionnelle en dehors de la convergence qui existe entre elle et Sa Majesté le Roi.

Vous semblez vous adresser essentiellement aux femmes et aux jeunes. Pourquoi ?
Nous nous adressons aux femmes et aux jeunes car ils ont été et sont encore marginalisés. Or, les premières représentent la moitié de la société marocaine et les seconds son avenir en plus du fait que démographiquement ils en représentent une bonne portion. Les motiver, les impliquer dans la vie nationale, la vie politique est une assurance pour le Maroc du progrès, de la démocratisation, de la justice sociale, de la modernité, c’est-à-dire du Maroc que nous voulons au PPS.

Que répondrez-vous à ceux qui affirment que les programmes des partis se ressemblent ? 
Il faut préciser tout d’abord que rares sont les partis qui, à ce jour ont présenté un programme électoral. Si les partis du mouvement démocratique présentent des programmes qui, peu ou prou, sont proches, c’est que l’étape historique que traverse notre peuple l’exige et c’est tant mieux. Ils pourront ainsi se mettre d’accord sur un programme commun d’action sinon de gouvernement, tout en gardant chacun sa spécificité. Dire qu’il n’y a rien à attendre des programmes des partis parce qu’ils se ressembleraient est une aberration d’une superficialité effarante.

Quelles sont en général vos ambitions pour le 7 septembre 2007 ?
Nos ambitions pour le 7 septembre 2007 est que la démocratisation de notre vie nationale se renforce et, à titre partisan propre au PPS, que les urnes, c’est-à-dire le vote de nos concitoyennes et concitoyens, nous octroient suffisamment de force pour imposer une accélération du rythme des réformes et que nous puissions mieux répondre aux desiderata de nos masses et de notre peuple.

Chef d’un parti moderniste et progressiste, trouvez-vous normal qu’on vous confie, à vous seul, le soin d’établir la liste nationale de votre parti ?
Formulée comme vous la formulez, la question laisserait entendre que je serais la réincarnation de Staline ! Non, loin de nous cette idée. En tant que «coordonnateur», on m’a demandé, au Bureau Politique, de résoudre une certaine quadrature de cercle. Je m’y suis efforcé en impliquant directement celles de nos camarades candidates à la liste nationale auxquelles j’ai demandé de me fournir chacune son classement. Serait-ce anti-démocratique ? Non, je trouve que c’est là une formule de démocratie participative.
Je donnerai les résultats aux intéressées elles-mêmes et au Bureau politique, même si mes camarades du B.P. ont décidé d’accepter mon arbitrage sans barguigner.

Certains de vos camarades redoutent les retombées de l’ouverture sur de nouvelles figures ayant pris beaucoup de poids au PPS. Qu’en pensez-vous ?
Vous savez, l’angoisse est inhérente à la condition humaine. Il faut savoir la dominer comme on peut arriver à dominer la peur. 


Ismaïl Alaoui, itinéraire d’un militant

Ismaïl Alaoui, secrétaire général du Parti du progrès et du socialisme (PPS) est né le 11 mars 1940 à Salé. Ce père de trois enfants commence sa carrière professionnelle, à l’âge de 25 ans, en tant que maître-assistant pour finir, quelques années plus tard, maître de conférence à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’Université Mohammed V (Rabat) et chef du Département de Géographie en 1970 au sein de la même Faculté. Expert en géographie rurale, il a participé à plusieurs travaux de recherche liés à ce domaine. Parallèlement à sa carrière professionnelle et ses recherches, Ismaïl Alaoui s’engage dans les rangs des communistes au sein du Parti communiste marocain (PCM) qui, deviendra, au fil des décennies, l’actuel PPS. Député sous les couleurs de ce même parti jusqu’en 2002, Ismaïl Alaoui assure les fonctions de secrétaire général depuis 1997. Poste où ses camarades l’ont confirmé lors du septième congrès national, en avril 2006.  M. Alaoui fait d’ailleurs partie de l’équipe de Abderrahman Youssoufi, en 1998, en tant que ministre de l’Education nationale (1998-2000), puis comme ministre de l’Agriculture, du Développement rural et des Eaux et forêts (2000-2002). Ismaïl Alaoui est également très engagé dans le milieu associatif. Il préside, entre autres, l’Association de développement du monde rural (ADMR) et l’Association Salé Almoustakbal. Il est titulaire du Ouissam du Trône au grade de Chevalier.

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