Politique

L’Egypte soutiendra toujours la marocanité du Sahara

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ALM : Le Maroc et l’Egypte ont toujours entretenu des relations de coopération solides. Comment comptez-vous renforcer ces relations ?

Ahmed Ehab Gamal El Din : Depuis mon arrivée il y a un an déjà, j’avais constaté que l’Egypte et le Maroc entretenaient des relations étroites à tous les niveaux, marquées par l’existence de liens culturels et civilisationnels. Cette relation, rarissime dans notre monde arabe, représente pour nous une source de bonheur et de fierté. Dès lors, nous avons énormément d’estime et de respect pour le Royaume du Maroc et pour Sa Majesté le Roi Mohammed VI. En revenant aux relations historiques qui existent entre les deux pays, nous constatons qu’elles ne datent pas d’aujourd’hui, mais qu’elles ont des racines anciennes et étendues avec une portée multidimensionnelle se manifestant aux niveaux arabe, islamique et africain.

La révolution en Egypte a-t-elle consolidé cette union ?

Les grands changements politiques et structurels que connaît aujourd’hui l’Egypte ne peuvent qu’aller de façon plus profonde dans une direction positive. Car, il faut le dire, personne ne peut nier les relations anciennes qui existent entre notre pays et le Roi Mohammed V et le Roi Hassan II. Permettez-moi de souligner toute l’ampleur du soutien et de l’amitié apportés par ces deux leaders à l’Égypte et aux Égyptiens. Notre pays ne peut oublier tous ces Marocains qui avaient participé à nos côtés en tant que frères d’armes durant la guerre d’Octobre. Tout cela ne peut que consolider les relations entre nos deux pays. Dans ce sens le terrain reste fertile pour développer au plus profond les relations entre les deux nations dans tous les domaines. Nous ne pouvons oublier que le Maroc et le Roi Mohammed VI furent parmi les premiers à soutenir l’Egypte et les aspirations et les choix des Egyptiens après la révolution du 30 juin 2013.

Des visites sont-elles actuellement programmées pour pérenniser davantage ces liens historiques ?

Le ministre égyptien des affaires étrangères se rendra prochainement au Royaume du Maroc porteur d’un message du président Al Sissi à Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Il s’entretiendra aussi avec son homologue Salaheddine Mezouar pour entamer les préparatifs pour la prochaine réunion de la Haute commission mixte maroco-égyptienne. Pour rappel, cette dernière aura lieu en Égypte sous la présidence de SM le Roi Mohammed VI et le président Abdelfattah Al Sissi.

Quels sont les projets en cours entre les deux pays ?

On ne peut pas énumérer le nombre de projets qui vont être réalisés entre les deux nations et les partenariats qui vont être signés entre les deux gouvernements dans plusieurs secteurs, à savoir dans les domaines politique, scientifique, économique, religieux, culturel et sur bien d’autres secteurs. Je tiens à vous signaler que le Maroc et l’Egypte se sont mis d’accord sur la réalisation de 15 projets de recherche sur un total de 48 projets proposés. Ces projets portent sur la biotechnologie et ses applications dans l’agriculture, les énergies nouvelles et renouvelables, l’assainissement et le traitement des eaux usées, les nouveaux outils pour détecter et traiter les cancers et les sciences de la Terre.

Il faut également signaler que le gouvernement égyptien tente avec ses moyens de renforcer la coopération bilatérale dans le domaine religieux, de coordonner les efforts et de développer la coopération dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme. Ainsi dernièrement le Maroc a signé, au Caire, un accord de coopération religieuse avec l’Egypte. Cet accord permettra de mettre en œuvre la coopération religieuse entre les deux pays en 2014, 2015 et 2016. Dans le domaine culturel, plusieurs conventions vont être signées a l’occasion de la prochaine visite du ministre marocain de la culture en Egypte. Dans ce sens une semaine culturelle marocaine va être organisée en 2015 en Egypte ainsi qu’une semaine du film marocain. Elles seront l’occasion de présenter le Maroc et sa riche diversité et patrimoine culturel au peuple égyptien.

A quel niveau souhaitez-vous que la coopération se développe davantage ?

Je souhaiterais qu’elle soit axée plus profondément sur la réalisation de grands projets d’investissement surtout dans le domaine économique. L’idéal serait de parvenir à multiplier au moins par deux le volume des échanges commerciaux qui s’élève à 700 millions de dollars en 2014. Je pense que les deux pays peuvent le faire vu leur complémentarité, leurs capacités, leurs ressources et leur emplacement stratégique qui attirent les investissements. Je tiens à vous dire que dernièrement, je me suis réuni avec Mme Miriem Bensalah pour discuter des projets de haut calibre et préparer une rencontre entre les hommes d’affaires égyptiens et marocains. Objectif: réaliser davantage d’échanges commerciaux et revoir la composition sectorielle de la coopération industrielle entre les deux pays en vue de dégager une valeur ajoutée pour nos deux nations.

Concrètement, quelle est la position de l’Egypte vis-à-vis du Sahara marocain ?

L’Egypte appuie fortement les efforts des Nations Unies pour aboutir à une solution juste et durable pour cette question très importante avec les parties concernées. L’Egypte a toujours souligné son attachement au principe de ne pas toucher aux frontières héritées des puissances coloniales en Afrique.

Comme je l’ai fait récemment à travers un communiqué de presse de l’ambassade, je tiens à réaffirmer que toute personne qui visite les camps de Tindouf ne représente qu’elle-même et ne représente ni l’Égypte ni les Égyptiens. Effectivement, comme tout le monde le sait, l’Egypte ne reconnaît pas le front Polisario et il n’existe aucun lien entre l’Etat égyptien et ce mouvement.

L’Egypte s’apprête à lancer un chantier gigantesque qui consiste en la construction d’un nouveau Canal de Suez. Que pouvez-vous nous dire sur ce mégaprojet et son financement ?

Effectivement, il s’agit d’un important projet qui représente également un passage vers une nouvelle ère. Il a pour but d’élargir l’étendue des services du Canal de Suez et de créer de nouvelles villes et zones industrielles. Ce projet est également destiné à soutenir le développement du trafic et des échanges commerciaux entre l’Europe et l’Asie. Le nouvel ouvrage devra constituer une manne financière supplémentaire: l’actuel Canal de Suez, vieux de 145 ans, rapporte 5 milliards de dollars annuels à l’État égyptien.

Le nouveau canal sera construit juste à côté de l’actuel canal et accueillera trois fois plus de bateaux tout en fournissant de meilleurs services. La construction s’achèvera au bout d’un an en août 2015 et les analystes prévoient un revenu annuel de 5 à 13 milliards de dollars. La première phase de construction du canal coûtera 10 milliards de dollars. Le gouvernement ne possède pas cet argent, mais son financement se tournera vers le peuple. C’est donc lui qui financera ce mégaprojet et non pas une autre personne étrangère. Le chantier se fera de fait sans générer aucun type d’endettement vis-à-vis de l’extérieur. Le canal sera bâti et appartiendra aux Égyptiens.

Quelle est votre lecture de la situation dans le monde arabe à la lumière des développements post Printemps arabe ?

Il faut bien admettre que l’histoire et les réalités politiques, économiques, sociales et culturelles sont différentes d’un pays à l’autre. C’est un peu le contexte propre à chaque pays qui s’impose. Je ne peux pas donc me prononcer que sur la situation dans mon propre pays. L’Egypte a vécu deux révolutions en l’espace de quelques années: la révolution du 25 janvier 2011 et celle du 30 juin 2013. Le pays traverse donc une période de transformation sociétale très importante dont l’objectif est de réaliser les revendications et aspirations du peuple égyptien pour un Etat de liberté, de justice sociale et de dignité humaine.

Nous voulons ériger un Etat moderne qui soit en harmonie avec le 21ème siècle. Le gouvernement égyptien est déterminé à remettre sur les rails les institutions politiques et réhabiliter les mécanismes de l’Etat et relancer l’économie tout en réalisant plus de justice sociale dans un contexte de bonne gouvernance. Sur le plan sécuritaire, la vigilance est aussi une priorité surtout à la lumière des défis du terrorisme aveugle et sanguinaire que traverse malheureusement toute la région.

Quel commentaire faites-vous sur les déclarations de certains acteurs et journalistes égyptiens sur le Maroc ?

Si vous faites n’importe quel sondage dans n’importe quelle rue en Egypte vous saurez tout de suite l’amitié et les étroites relations humaines et spirituelles entre les peuples égyptien et marocain. Vous allez trouver la même chose au Maroc. Je peux vous confirmer que les mesures nécessaires ont été prises pour éviter que de tels dérapages désolants se répètent à l’avenir. Le président Abdelfattah Al Sissi, le gouvernement et le peuple égyptien sont «fiers» des liens et des relations excellentes qui existent entre les deux pays, et respectueux envers le Roi Mohammed VI, le gouvernement et le peuple marocain. Tout autre propos ayant émané de certaines personnes récemment doit être écarté car elles ne représentent qu’elles-mêmes. Toute atteinte au Maroc et aux Marocains est une atteinte aux Egyptiens et vice versa. Toute insulte est inacceptable et est condamnée par les deux peuples.

Quelle lecture pouvez-vous nous fournir au sujet du mouvement Daesh?

Comme tout le monde le sait, Daesh est un groupe barbare et violent, qui ne représente ni l’Islam, ni les musulmans, ni les valeurs les plus fondamentales de l’humanité. Daesh compte, en effet, dans ses rangs pas moins de 80 nationalités différentes. Ce à quoi nous sommes confrontés ne consiste pas seulement en une organisation terroriste, mais bien en l’incarnation d’une idéologie malveillante, qu’il nous faut combattre sur le plan intellectuel.

Nous avons vu comment le Maroc avait dénoncé fermement l’attaque terroriste perpétrée récemment au nord du Sinaï et qui avait fait plusieurs victimes innocentes. Le Royaume n’a pas tardé à exprimer sa solidarité avec la République Arabe d’Égypte. C’est pour cela que nous avons souligné l’importance de multiplier les efforts internationaux en vue de lutter contre le terrorisme ignoble et œuvrons avec détermination afin de faire face à ce phénomène dangereux qui menace la sécurité et la paix internationales.

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