Société

Algérie : L’opposition dans un contexte régional de soif démocratique

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La marche de l’opposition en Algérie pour un changement du système politique s’est heurtée, samedi, à un formidable dispositif de sécurité mais elle s’inscrit dans un contexte régional de soif de démocratie qui a déjà vaincu les régimes jusque-là immuables d’Egypte et de Tunisie et en menace d’autres. Hasard de l’Histoire, cette manifestation annoncée le 21 janvier lors de la création d’un large mouvement d’opposition, la Coordination nationale pour la démocratie et le changement (CNCD), s’est tenue au lendemain de la chute du président égyptien Hosni Moubarak, après 29 ans de pouvoir sans partage. Et si le mouvement à Alger, le plus important dans le pays, n’a rassemblé que quelques centaines de manifestants, il n’en a pas moins été historique, a relevé la presse: «C’est parti pour le changement», titrait le quotidien libéral Liberté. Le quotidien gouvernemental El Moudjahid a consacré, comme il ne le fait jamais pour la contestation, sa Une à l’évènement mais pour le qualifier de «manifestation à faible écho». La marche prévue sur environ 4 km dans le centre-ville n’a pu avoir lieu, tout comme une première manifestation du RCD le 22 janvier à Alger, en raison d’un interdit datant de 2001. Les contestataires ont été bloqués par quelque 30.000 policiers déployés pour l’occasion dans la capitale. Mais «ce n’est qu’un début», a assuré Fodil Boumala, l’un des fondateurs de la CNCD née dans la foulée de revendications exponentielles. Depuis des mois, de petites manifestations et émeutes émaillent ce pays richissime en hydrocarbures et aux réserves bancaires évaluées officiellement à 155 milliards de dollars. Les lycéens réfutent un programme scolaire trop chargé, les universitaires un enseignement inadapté à l’évolution technologique, des milliers de familles crient leur mal-logement, les jeunes réclament du travail car, diplômés ou non, plus de 20% d’entre eux sont chômeurs, tandis que les employés veulent des augmentations pour faire face à la flambée des prix. Dans ce concert d’exigences, les policiers quelque 160.0000 hommes et femmes ont été augmentés début février de 50% avec effet rétro-actif au 1er janvier 2008. Cette mesure avait été annoncée fin décembre, à quelques jours des émeutes de janvier qui ont fait cinq morts, plus de 800 blessés, des dommages importants et des centaines d’arrestations. Et ces émeutes de cinq jours ont cessé dès l’annonce gouvernementale de mesures pour juguler la flambée des prix des produits de première nécessité. Le 3 février, à huit jours de la manifestation de samedi, dont l’un des slogans était la levée de l’état d’urgence en vigueur depuis 19 ans, un communiqué du Conseil des ministres annonçait son abandon prochain et une série de mesures de libéralisation décidées par le président Abdelaziz Bouteflika. Pour la première fois, ce dernier s’exprimait sur les émeutes, évoquant des «dépassements regrettables» et s’inclinait à la mémoire des victimes. L’appel à manifester le 12 février a été maintenu, mais nombre d’organisations ou partis avaient décidé de ne pas s’y joindre. La prochaine manche n’a pas encore été définie, mais elle s’inscrit dans un environnement peu propice aux vieux régimes, après le renversement le 14 janvier du Tunisien Zine El Abidine Ben Ali, après 23 ans de pouvoir, suivie de celle de Moubarak. En Algérie, les contestataires insistent plus sur le «changement de système» que sur le départ du président Bouteflika, au pouvoir depuis 12 ans. L’Algérie est gouvernée depuis l’indépendance en 1962 par un régime largement soutenu par les militaires malgré de timides ouvertures à une démocratisation. Et les Algériens restent par-dessus tout traumatisés par plus de dix ans de violences islamiques qui ont fait plus de 150.000 morts. Mais, comme le souligne au quotidien Algérie News le président d’honneur de la Ligue algérienne des droits de l’Homme Abdenour Ali-Yahia, «les Algériens renouent progressivement avec les actions de revendication pacifique».

  Béatrice Khadige (AFP)

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