Les méthodes traditionnelles de plus en plus sollicitées
L’Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin (AMLAC) organisera un sit-in le mardi 25 juin à 15 h devant le Parlement afin de faire activer l’adoption du projet de loi sur l’avortement au Parlement. Rappelons que le texte en question avait été adopté en mars 2016 par le Conseil de gouvernement. Actuellement le texte est en discussion au Parlement. Le président de l’AMLAC, Chafik Chraibi, signale avoir adressé cette année même une lettre au chef de gouvernement pour faire accélérer son adoption.
«M. El Otmani m’avait alors répondu en précisant que ce projet de loi n’est pas oublié et qu’il sera discuté au niveau de la commission de la justice, de la législation et des droits de l’Homme à la Chambre des représentants», précise-t-il. M. Chraibi déplore le fait que ce projet soit discuté à la commission de la justice au lieu de la commission de la santé. Ce qui pose problème dans la mesure où l’avortement sera toujours criminalisé et ne prendra pas en compte la santé de la femme. Après avoir été discuté en commission au Parlement, il devra passer à un vote en plénière à la Chambre des représentants, puis, enfin, à la Chambre des conseillers pour être adopté de manière définitive. A travers ce sit-in pro avortement, le président de l’association espère rassembler au minimum une centaine de personnes. Les manifestants devront apporter une poupée ou un poupon, nu, sans habit, sur lequel sera écrit au marqueur Article 453. «Les poupées seront déposées par terre dans la rue devant le Parlement pour symboliser ce qui se passe quand ces femmes sont réduites à vivre ce cauchemar d’abandonner un enfant», indique M. Chraibi.
5.000 à 15.000 DH pour se faire avorter
Selon le Pr Chafik Chraibi, les Marocaines ont de plus en plus recours aux avortements traditionnels. Les méthodes traditionnelles utilisées, à savoir le recours aux plantes, l’introduction d’objets pointus ou brûlants dans l’utérus, les coups sur l’abdomen… sont très dangereux pour la santé de la mère (hémorragie, perforation du col, infection généralisée, stérilité…) et ne garantissent pas un avortement systématique. Ce recours aux avortements traditionnels s’explique par le fait que la justice est intransigeante envers les médecins qui pratiquent ces actes. «Certains médecins qui ont pratiqué des avortements sont actuellement en prison. Beaucoup de médecins ont décidé de faire marche arrière et ne veulent plus pratiquer des avortements.
Le prix de l’avortement a par conséquent explosé. Il faut compter 5.000 DH au minimum et jusqu’à 15.000 DH pour se faire avorter. La demande ne cesse d’augmenter alors que les médecins sont peu nombreux à le faire», explique-t-il. Pour celles qui ont décidé de ne pas se faire avorter, bon nombre d’entre elles abandonnent leur enfant dans la rue, voire dans une poubelle. Dans le cadre de la prévention, l’association mène chaque année une campagne nationale pour sensibiliser les femmes à l’importance de la prise de la pilule du lendemain.
Signalons que cette méthode contraceptive de rattrapage consiste en la prise d’un comprimé, le plus rapidement possible, après un rapport sexuel, non protégé et supposé fécondant. Deux types sont en vente libre en pharmacie : la pilule Norlevo et la pilule EllaOne. Rappelons que le projet de loi autorise les avortements dans des cas bien précis : pour les victimes de viol ou d’inceste, en cas de troubles mentaux de la mère ou de malformation fœtale.