Société

Elle tue par peur d’être répudiée

Chtouka . Mardi 30 janvier 2002. Vingt-deux heures. Lorsque Mohamed retourne chez lui, il trouve sa femme seule dans la chambre à coucher. Leur fils dort dans l’autre chambre. Ce n’est pas la première fois que Mohamed rentre à cette heure tardive. Il a l’habitude de passer chez ses amis et voisins du douar presque chaque soir après le travail pour discuter.
Ce mardi soir, quand Mohamed rentre, sa femme Zahra vient lui servir le dîner puis le thé, et retourne dans la chambre à coucher. Comme d’habitude, le couple n’échange aucune parole. Mohamed regarde un peu la télévision puis va se coucher alors que sa femme fait la vaisselle. Quand Zahra retourne enfin dans la chambre, son mari l’attend, dénudé. Il lui sourit. Elle fait mine de ne rien comprendre et revêt sa chemise de nuit. Sous le regard de son mari, elle se couche, tire le drap sur elle et ferme aussitôt les yeux. Mohamed la touche, la prend dans ses bras. Elle feint de dormir et lui tourne le dos. Il ne dit rien et continue de l’embrasser.
Zahra s’énerve alors et le repousse violemment. Mohamed saute aussitôt du lit et lui demande ce qui se passe. «Je suis malade» lui répond-elle. Hors de lui, il crie: «Je sais que tu n’es pas malade, que tu es en bonne santé et que tu ne veux plus de moi…» Elle ne lui dit rien. Il finit par l’insulter et la menacer : «Je vais te mettre dehors comme une chienne demain Incha Allah». Zahra fond en larmes tandis que Mohamed continue ses injures. Il ne s’endort qu’une heure plus tard. Elle, non. Les mots que son mari vient de prononcer hantent son esprit. Alors que tout le monde dort, Zahra fait les cent pas dans la chambre. Son mari exécutera-t-il vraiment ses menaces ? Cette nuit-là, Zahra ressent pour la première fois de la haine envers Mohamed. Prise de folie, elle sort de la chambre et se dirige vers la cuisine. Pour y faire quoi ?
Zahra a trente ans. Elle est originaire de Sebt Ouled Nemma. Son premier mariage n’a pas duré longtemps puisqu’elle a très vite été rejetée par son époux. La répudiation représentant une malédiction pour une fille, seul le remariage pouvait réconcilier Zahra avec la société. Mohamed, quarante-six ans, fellah de son état, l’a rencontrée un jour au souk. Il a tenté de l’approcher et l’a suivie. «Je veux te demander en mariage pas plus… », lui a-t-il lancé sans la moindre hésitation. Elle lui a souri et répondu : «Tu connais mon père. Il faut s’adresser à lui pour me demander au mariage, je ne peux rien te répondre sans son avis… » Rien qu’à l’idée qu’elle allait se remarier, Zahra était déjà très contente et fière. Le mariage est par la suite arrivé. Puis un petit enfant. Leur relation a ensuite commencé à se dégrader sans qu’aucun des deux n’arrive à se l’expliquer. Jusqu’à cette nuit dramatique du 30 janvier 2002.
Quand Zahra rentre à la cuisine ce soir-là, c’est pour saisir un couteau. Elle retourne à la chambre et assène un premier coup dans le dos de Mohamed. Il se réveille en criant de douleur. Elle lui donne deux autres coups au niveau du coeur. La scène est horrible et Zahra semble dans un état second. Mohamed succombe rapidement à ses blessures. Sa femme jette alors froidement un regard sur le cadavre avant de retourner à la cuisine et de prendre un grand seau en plastique. Elle commence à découper le corps de son mari. Elle lui enlève la tête, découpe sa chair en morceaux qu’elles jette dans les toilettes. Zahra met ensuite les membres, la tête et les os dans des sacs en plastique et sort pour s’en débarrasser. Elle enterre enfin ses vêtements pleins de sang, les marteaux et le couteau qu’elle a utilisés. La jeune femme retourne finalement chez elle comme si rien ne s’était passé.
Seulement, quelques jours plus tard, quelqu’un découvre les morceaux du cadavre qui est identifié. Et Zahra ne met pas longtemps à dire la vérité. «C’est moi qui l’ai tué…J’avais peur qu’il me répudie», déclare-t-elle aux enquêteurs. Aveu qu’elle répète lors de son procès devant la Cour qui l’a condamnée à vingt ans de réclusion criminelle.

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