Société

Enfants : Les droits inviolables

ALM : De plus en plus de personnes s`inquiètent du sort des enfants qui travaillent, notamment après le drame de Fès. Comment peut-on réduire le phénomène ?
Youssef Madad : Bien qu’il faut reconnaître que l’intérêt pour ce volet est à ses débuts chez nous, il faut néanmoins saluer les efforts entrepris dans ce sens par les responsables et par la société civile pour faire face à ce danger qui anéanti l’avenir de toute une génération condamnée toute sa vie à payer la facture de nos échecs.
Quelles sont les causes qui sont derrière ce phénomène ?
Le phénomène du travail des enfants prend, de plus en plus, des allures très graves dans le monde entier, mais surtout dans les pays pauvres. Il constitue une main d’oeuvre docile. Selon le rapport du BIT (2001), dans le groupe des enfants de 5 à 17 ans, un sur six, soit 246 millions, est astreint au travail. Plus préoccupant encore, un sur huit, soit 179 millions d’enfants, est encore assujetti aux pires formes de travail, celles qui mettent en danger sa santé physique ou mentale ou sa moralité.
Le Maroc a ratifié la Convention Internationale des Droits de l’Enfant de 1989, mais l’OIT estime que le Maroc comme la Chine et l’Inde est un des pays qui fait face aux pires formes de travail des enfants, car malgré une nouvelle loi qui rend l’enseignement scolaire obligatoire, le Maroc admet qu’il existe 538.000 enfants travailleurs au Maroc qui ont moins de 13 ans, et d’ajouter que l’effectif est beaucoup plus grand. Les statistiques n’ont pas compté de milliers de jeunes filles qui ont été vendues par leurs parents à la compagne pour travailler dans les villes comme domestiques.
Bien qu’il n’existe pas de chiffres exhaustifs, nous pouvons avancer quelques éléments indicateurs, comme ceux, issus de l’étude nationale, sur le travail des enfants commandée, par le Ministère du Travail, et menée au Maroc en 1998-99, Il ressort des 3.500 enquêtes effectuées que plus de 80 % des enfants travailleurs ont entre 10 et 14 ans et ne sont pas scolarisés, que plus d’un enfant sur deux est exposé à des maladies ou accidents graves, a une durée de travail hebdomadaire supérieure à 50 heures avec des salaires dérisoires, et subit des contraintes et discriminations verbales ou physiques. Les filles se retrouvent majoritairement dans la confection, la fabrication de tapis et le textile ainsi que dans les travaux domestiques.
Selon le Bureau International du Travail (BIT), 80 % des 250 millions d’enfants au travail n’ont ni congé ni temps libre, et jusqu’à 50 % connaissent des conditions de travail épouvantables (locaux insalubres, mauvais traitements, demande de rendement excessive, etc.).
Au Maroc, une enquête auprès d’un échantillon de 450 enfants domestiques a révélé que 72 % de ces enfants commençaient à travailler avant 7 heures du matin et que 65 % ne se couchaient pas avant 11h30 du soir. Beaucoup subissent de mauvais traitements physiques et psychologiques. Les coups, les injures, les punitions sous forme de privation de nourriture et les sévices sexuels sont monnaie courante. Il n’est pas rare, dans ces conditions, que les fillettes domestiques s’enfuient du domicile de leurs patrons pour échapper à de tels traitements. On les retrouve souvent dans la prostitution.
À quelles activités s’adonnent ces enfants qui travaillent ?
Les secteurs d’activité qui favorisent l’exploitation des enfants sont connus, et je citerai d’abord l’agriculture ou l’élevage, le textile, l’artisanat, les petits boulots et les travaux domestiques et tout genre de petits services décadents…..
On ne pourra jamais en finir avec le travail des enfants tant qu`il y aura encore des parents pauvres et analphabètes ? Qu’en pensez-vous ?
La lutte contre ce fléau doit, obligatoirement, s’inscrire dans une vision de la société et du développement, et nécessite une stratégie de longue haleine impliquant les décideurs comme les partenaires politiques et sociaux ; mais aujourd’hui, et vue l’ampleur catastrophique du problème, la priorité est donnée aux efforts de la soustraction des enfants aux pires formes du travail. La Convention sur les pires formes du travail des enfants de Genève du 17 juin 1999 met l’accent là-dessus. Dans son article 6 : « Tout Membre doit élaborer et mettre en oeuvre des programmes d’action en vue d’éliminer en priorité les pires formes de travail des enfants ».
Donc toute action immédiate doit passer par la protection des enfants de toutes les tâches dangereuses, le renforcement et l’élargissement de la protection légale des enfants et l’obligation de la scolarisation et le soutien du foyer familial.

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