Société

Insertion : L’enfance dévoyée

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A Hay Sidi Othmane, au quartier Afriquia de Casablanca, se trouve le centre Abdesslam Bennani, pour la détention et la réinsertion des filles mineures. C’est l’un des rares centres pour filles parmi les 16 centres dédiés à la protection de l’enfance. Ce centre a été créé en 1988. L’âge des enfants ne dépasse pas les 18 ans. Ces filles viennent de pratiquement toutes les villes du Royaume.
Prises en flagrant délit, ces filles sont arrêtées et condamnées dans les tribunaux de première instance. Elles échappent à l’emprisonnement dans les centres de détention grâce à leur âge. «Les 286 filles que nous avons au centre Abdesslam Bennani appartiennent à des milieux très défavorisés. La nature des délits est variable d’un cas à l’autre», nous dit Saïd Houbal Directeur du Centre. « La prostitution et le vol peuvent être considérés comme les délits les plus répandus chez ces filles », continue-t-il. Toutefois, chaque fille est un cas à part. « Je volais parce que ma mère me le demandait. Nous n’avons rien à manger ! », se justifie Fatima, une jeune fille de 12 ans, qui s’adonnait au vol en compagnie de sa mère au quartier marchand de Derb Soltane.
Depuis quelques jours, elle a rejoint les filles du centre alors que sa mère est emprisonnée au centre de détention Oukacha. «Notre centre se donne comme vocation la rééducation de ces filles afin de permettre leur réinsertion sociale. Le problème c’est que le centre abrite en plus des délinquantes, des filles SDF (sans domicile fixe)», fait remarquer le Directeur du centre. Et d’expliquer : «ainsi des victimes et des coupables sont mises dans le même sac. Nous sommes tenus de nous adapter à chacun de ces cas. Il faut rééduquer les premières et protéger les secondes ». En effet, le centre offre un toit aussi à des petites bonnes en fuite, d’autant plus s’il s’avère qu’elles sont enceintes. Ces dernières sont arrêtées pour des délits tels que l’errance ou encore de la mendicité. En général, elles ne retournent pas chez elles de peur de leurs familles.
Elles subissent donc doublement l’injustice. «Les grossesses de ces filles sont souvent dues à des viols. Malgré cela, elles n’osent pas retourner chez elles», fait remarquer le Directeur du Centre. Ces mêmes filles vivent en communauté avec d’autres montrant des signes de délinquance grave. «Nous avons des fillettes qui dirigent des petits réseaux de drogues, de prostitution et de mendicité. Nous avons aussi des criminelles comme Nezha. Cette gamine a tué son bébé né après une grossesse dans le cadre de la prostitution»,ajoute Saïd Houbal.
Autre difficulté que vit le centre Abdesslam Bennani : la faiblesse des moyens humains et matériels. «Le compte est géré par moins de 10 cadres. Les bâtiments et les lits sont en état de délabrement. Grâce au Conseil de la Région, nous venons de bénéficier d’un don de 2,5 millions de DH pour restaurer le centre», informe Saïd Houbal. S’agissant du suivi médical et psychologique des fillettes, ce n’est que récemment que le centre profite du coup de main donné par quelques bénévoles. «Nous avons souvent des cas d’accouchement en pleine nuit. Les filles, dans ces cas, sont livrées pratiquement à elles-mêmes puisque nous n’avons pas de médecin», révèle le Directeur du Centre. «Nous essayons d’établir des liens de collaboration avec les autres départements ministériels, les fondations et les associations pour conjuguer les efforts», continue-t-il.
En effet, dans cette optique, le centre collabore déjà avec la Fondation Mohammed V et le ministère de l’Education nationale ainsi que l’OFPPT. L’Office est intervenu pour l’équipement des ateliers de couture et de broderie. Le ministère de l’Education nationale a équipé quelques salles des cours d’alphabétisation (60% des filles accueillies par le centre sont analphabètes). Toutefois beaucoup reste à faire !

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