Société

«La pédophilie est en nette recrudescence»

© D.R

ALM : Comment votre association porte-t-elle assistance aux enfants victimes de pédophilie ?
Rachida Bellebah : Je dois tout d’abord préciser que la pédophilie est un phénomène social et international très ancien et en nette recrudescence. Les gens avaient l’habitude de traiter ces affaires entre eux, en famille, de peur de salir leur réputation. Ce n’est que récemment que les familles et les proches des enfants victimes d’abus et d’exploitation sexuels commencent à contacter les associations spécialisées ou intenter des actions en justice. Nous constatons que les Marocains ont mis beaucoup de temps pour se libérer du poids des tabous…
En plus de l’aide qu’apporte l’association Amna aux femmes victimes de la violence, il y a aussi, depuis février 2005, des actions de protection des enfants abusés sexuellement, et ce, en partenariat avec « Save The Children », une association internationale. Nous constituons ainsi un réseau avec le ministère de la Santé, le département de la Jeunesse et la police judiciaire. Nous avons pour mission de fournir une assistance sociale aux enfants victimes d’abus sexuels. Nous aidons aussi leurs familles dans les démarches juridiques. Nous sommes deux avocates, Hind El Adlouni et moi-même, chargées d’accompagner les victimes devant le procureur du Roi et de les défendre par la suite devant le tribunal. Nous faisons de notre mieux pour préparer ces enfants à s’en sortir et à affronter la vie après le traumatisme de l’agression sexuelle.

Pouvez-vous évoquer des cas précis ?
Depuis que nous sommes engagés à traiter les cas d’enfants victimes de pédophilie, nous avons traité des dizaines des cas. Les victimes que nous recevons sont des enfants âgés de quatre ans à dix-sept ans. Ils sont généralement victimes de proches : leurs parents, des membres de leurs familles, des voisins, des tenants d’épiceries, de télé-boutiques… Nous suivons plusieurs dossiers en justice dont deux concernant des mis en cause qui sont en fuite. Nous traitons actuellement le dossier d’une fille de 14 ans qui a été violée par son voisin. Elle est enceinte de quatre mois mais toujours vierge. Le coupable est un homme d’une cinquantaine d’années qui habite à côté de la demeure de la famille de la victime.

Le développement touristique que connaît Tanger, risque-t-il d’amplifier le fléau de pédophilie ?
Il est hélas vrai que Tanger connaît, ces derniers temps, un grand développement touristique, mais ne dispose pas d’une grande infrastructure touristique. C’est pourquoi elle est moins fréquentée par les touristes étrangers que Marrakech et Agadir. A Tanger, nous traitons rarement la pédophilie commise par les étrangers pendant leur séjour touristique. Nous assistons généralement à des cas d’inceste et des cas de pédophilie commis par les proches et les voisins. Le Maroc est un pays émergent dont l’économie repose sur plusieurs atouts dont le tourisme. Pourtant, nous ne serons jamais considérés comme un paradis sexuel. C’est vrai, le Maroc a fait un peu parler de lui ces derniers temps. Mais dans la plupart des cas, il y a beaucoup d’exagération et de mise en scène. Prenez par exemple l’affaire de la chaîne espagnole « Cadena 3 » dont trois journalistes se sont fait passer pour des touristes étrangers à la recherche de chair fraîche à Marrakech et à Tanger pour les besoins de leur émission sur le tourisme sexuel au Maroc. 

Aider les femmes et les enfants

L’association Amna a été créée en 1998 à Tanger pour la lutte contre la violence des femmes. Son projet englobera depuis février 2005 le dossier des enfants victimes des abus et des exploitations sexuelles des enfants, et ce, en partenariat avec l’ONG internationale Save The Children.
L’association apporte un soutien moral et psychologique aussi bien aux femmes violentées et aux enfants victimes d’abus et d’exploitation sexuels. Elle les aide dans leurs démarches juridiques ou dans leur traitement médical.
L’association organise plusieurs campagnes de sensibilisation au profit de la femme et de l’enfant et des tables rondes avec les acteurs sociaux, des juges et des policiers. Elle envisage la création d’un centre d’accueil destiné à héberger 20 jeunes filles victimes d’exploitation sexuelle.

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