Société

Mustapha Rassi : «Je suis contre la pornographie dans le couple»

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ALM: Est-ce que la pornographie stimule le désir au sein du couple ?
Mustapha Rassi : Certaines études ont montré que regarder des films pornographiques en couple n’est pas néfaste. Bien au contraire, ce genre de films peut constituer un piment dans la vie sexuelle du couple. Le film X est un stimulant, c’est-à-dire qu’il peut augmenter le désir chez le couple. Autrement dit, les images pornographiques peuvent provoquer l’excitation et créer de l’intensité dans la sexualité. Les films porno sont considérés comme des aphrodisiaques. Personnellement, je ne partage pas cette idée.

Est-ce que le film X est une affaire de couple ?
Je suis contre la pornographie dans le couple. Quant à savoir si les couples marocains y ont recours, j’avoue ne jamais avoir posé la question à mes patients. Cela dit, je pense que peu de couples osent regarder des films X ensemble. C’est un phénomène assez rare dans notre société. Par contre, l’homme peut regarder un film porno avec sa maîtresse ou une prostituée. En Occident, on remarque que c’est une pratique assez fréquente. Dans ces pays, les femmes regardent les films X avec leur conjoint plutôt par curiosité. Contrairement aux hommes, les femmes ne sont pas accro aux films porno.

La pornographie est-elle néfaste ?
La pornographie peut détruire le couple. J’ai vu plusieurs couples qui ont éclaté à cause des films X. En visionnant ces films de manière régulière, l’homme devient de plus en plus exigeant envers son épouse. Dans les films X, on constate à chaque fois qu’il y a des actes répétitifs : fellation, cunnilingus, sodomie, double pénétration…Ces actes envahissent le désir chez l’homme. Il souhaite reproduire les mêmes actes. Il demande à chaque fois plus à son épouse et elle a du mal à le suivre, à combler ses désirs. Dans la pornographie, la dimension relationnelle est absente. La femme est considérée comme un simple objet sexuel. La sexualité devient complètement séparée de la relation amoureuse, l’impression de n’être qu’un accessoire prend place. La pornographie entraîne une diminution des liens affectifs avec la conjointe. Durant l’acte sexuel, l’homme est rarement en lien amoureux avec sa partenaire. Au lieu d’être dans la relation, il vit dans son univers fantasmatique qui est envahi par la pornographie. L’autre danger est l’addiction. La personne a un besoin quotidien de regarder des scènes pornographiques pour calmer ses besoins sexuels. Elle est toujours à la recherche de nouvelles images pornographiques. L’autre point à mentionner est que la pornographie peut conduire à l’homosexualité. Dans les films porno, les femmes ne sont que des objets sexuels. Certains hommes commencent à les détester en les considérant comme des salopes, des prostituées. En regardant les films, ils aperçoivent également des corps d’hommes nus. L’homme peut alors devenir un objet de désir sexuel. Une homosexualité refoulée peut surgir. Pour toutes ces raisons, la pornographie est à consommer avec modération.


Trop de sexe tue le sexe
Les films X ne sont pas sans conséquence sur la sexualité du couple. La dépendance est l’un des principaux dangers. En devenant accro au sexe, le risque est de ne plus apprécier le sexe. Trop de sexe tue le sexe. En regardant régulièrement des films porno, l’excitation a besoin de stimulants de plus en plus forts pour se déclencher. Ainsi, une personne qui a l’habitude de regarder en grande quantité des films «soft» finira par trouver cela insuffisamment excitant et sera amené à regarder des films « hard », plus violents voire même sanglants. Ce glissement est dangereux et ce pour deux raisons. La personne peut devenir violente. L’autre risque est qu’elle sera extrêmement exigeant sur le plan sexuel. Au lieu d’être dans la relation, dans l’amour réel, elle vivra dans le fantasme excitant et passera à côté de l’amour. Des chercheurs américains ont démontré que regarder des films X rendrait la vie sexuelle décevante. Cette étude scientifique a été menée en prenant deux groupes d’hommes et de femmes. Le premier groupe visionne une heure par semaine des vidéos X. Le second groupe regarde des sitcoms. En interrogeant ces personnes, celles du groupe A ont déclaré être beaucoup moins satisfaites de leur sexualité que celles du groupe B. Cette insatisfaction s’explique non pas par un manque de confiance en soi, mais par un jugement négatif du partenaire. Le ou la partenaire n’est pas à la hauteur.


 La pornodépendance
La pornodépendance est le fait de ne plus pouvoir se passer de la consommation de pornographie. Celle-ci devient une véritable drogue. La pornographie peut avoir des conséquences néfastes tels que l’isolement social, l’altération de la perception de la sexualité ou des troubles physiologiques. Il existe trois types de dépendance : la recherche de contenu pornographique, la recherche non assumée d’interactions, la recherche assumée d’interactions. Concernant le premier type, le dépendant visionne des films pornographiques en se masturbant. Il y passe un temps toujours plus important. Il projette de la pornographie sur les individus du sexe opposé, sans pouvoir contrôler le flux des images de son inconscient. Le dépendant ne peut arrêter de consommer sans ressentir une sensation de manque. La consommation du dépendant garde un caractère passif, puisqu’elle n’entraîne aucune forme d’interaction. Le dépendant consomme seul, et fait en sorte que son addiction soit indétectable. La majorité des dépendants sont des dépendants de type 1. Dans le second cas, le dépendant cherche à entrer en contact virtuellement avec des individus du sexe opposé. Il fréquente des sites, mais ne rencontre jamais en réel les personnes avec qui il discute. Il attend de l’autre qu’il érotise son corps pour lui, en exigeant de sa part des photos, des films, ou en demandant à ce qu’on l’excite au téléphone ou par messagerie. Le dépendant est entré dans une forme de passage à l’acte, car il entretient une relation directe avec la personne. Cependant, par manque de confiance ou souci de confidentialité, il cherche à ce que cette dernière ne puisse pas «déborder» dans le «monde réel». Dans le troisième cas, le dépendant ne se satisfait plus des interactions virtuelles. Il ressent le besoin de concrétiser ses pulsions dans le monde réel. Pour cela, il va chercher à entrer en contact avec le sexe opposé. Il passe de la consommation du corps pornographique au corps physique. Dans la majorité des cas, il va chercher à multiplier les partenaires. La plupart des dépendants engagés dans de tels processus ressentent un dégoût assez prononcé de leur pratique, de par le fait qu’ils ont l’impression d’abuser du corps de l’autre.

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