Société

Perpétuité pour le kidnappeur

© D.R

Chambre criminelle près la Cour d’appel d’Agadir. La salle d’audience est archicomble. Abdelhafid, la trentaine, est au banc des accusés. Il ne tourne sa tête ni à gauche ni à droite. Il fixe les cinq magistrats de la cour.
Le président, qui feuillette le dossier de l’affaire, le regarde de temps en temps avant de le surprendre par l’accusation : «tu es accusé de constitution d’une association de malfaiteurs, d’enlèvement de mineur, séquestration et torture dans le but d’obtenir une rançon, vol de voitures, vols qualifiés, usurpation d’identité et coups et blessures contre des fonctionnaires dans l’exercice de leur fonction».
Les yeux hagards, Abdelhafid garde le mutisme, ne répond pas. Le président l’interroge une fois encore sur les accusations qui lui sont attribuées. Il garde toujours le silence. Le président lui demande une fois encore de lui répondre. Abdelhafid commence à balbutier des mots incompréhensibles. Il n’arrive pas à articuler une phrase. Pourquoi ? Ce n’est pas la première fois qu’il s’est comporté ainsi. C’est la énième fois qu’il s’est comporté comme un aliéné mental, irresponsable de ses actes et de son comportement. Est-il vraiment aliéné mental ? Etait-il dans un état de démence lorsqu’il a perpétré ses forfaits ? Un fou peut-il commettre les crimes qui sont reprochés à Abdelhafid ?
Le président de la cour commence à lire les faits des accusations qui lui sont attribuées et consignées dans le procès-verbal. Abdelhafid feint de ne rien comprendre. Il fixe les magistrats de ses yeux avant de lever la tête et de fixer le plafond comme pour le contempler.
Le président lui rappelle qu’il a agressé plusieurs personnes, cambriolé de nombreux locaux commerciaux, volé six voitures et les avoir démontées avant de les revendre en pièces détachées, avoir mis la main sur une grande somme d’argent au casino Mirage, à Agadir, avoir perpétré un hold-up dans l’agence de la Western Union, située au quartier Dakhla et y avoir subtilisé une somme de douze mille dirhams et enfin avoir enlevé un enfant âgé de onze ans, Amine, fils d’une famille aisée. Pour cette dernière affaire, il est arrivé à amasser toutes les informations concernant la famille d’Amine avant de passer à l’action.
En utilisant sa voiture, il est arrivé à l’enlever et le conduire vers un local qu’il avait acheté après l’opération du casino. Là, il lui a enchaîné les mains et les pieds et l’a gardé dans une grande niche pour chien.
Après quoi, il a téléphoné à ses parents pour leur demander une rançon de 200 mille dirhams pour le libérer. Sinon, il le liquiderait, les a-t-il menacés. Sans répondre à ses désirs, la famille d’Amine s’est adressée directement à la police judiciaire pour déposer plainte. Des investigations ont été effectuées 24 heures sur 24 et se sont soldées par le repérage de la voiture utilisée pour le rapt. Le véhicule était garé dans un coin du quartier Talborjte. Il a été remarqué par l’un des voisins de la famille d’Amine, qui avait vu un jeune homme en descendre, appeler Amine et lui demander d’y monter avant de démarrer à toute vitesse. C’était la première piste à la disposition des limiers.
D’habitude, il commettait son forfait et disparaissait sans laisser de trace. La surveillance menée autour du véhicule leur a permis d’en identifier le propriétaire. Ils ont suivi ses pas jusqu’au local où Amine est séquestré.
Là, ils ont essayé de l’appréhender. Mais il a manifesté une résistance farouche en brandissant un couteau. Seulement, ils sont arrivés à l’immobiliser et à libérer l’enfant qui n’avait pratiquement rien mangé depuis deux jours.
L’auteur de tous ces crimes est-il vraiment aliéné mental ? Lorsqu’il a commencé à répondre aux questions de la cour, il ne disait qu’une seule phrase : « Je ne me souviens plus de rien ». Souffre-t-il de schizophrénie ? Pour répondre à cette interrogation, la cour avait ordonné auparavant une expertise médicale. La conclusion était sans équivoque : il ne souffre ni de schizophrénie, ni d’aliénation mentale. Il était responsable lors de ses crimes. Et pourtant, Abdelhafid a continué à faire le comédien devant la cour. Celle-ci a décidé enfin de convoquer à la même audience les gardiens de la prison et ceux qui se chargeaient de son transport depuis la prison jusqu’au siège de la cour d’appel et vice-versa.
«Il se comportait normalement. Il parlait aux autres détenus et aux gardiens et personne n’a remarqué aucune manifestation d’aliénation mentale », ont-il affirmé à la cour qui s’est dite convaincue qu’Abdelhafid est sain d’esprit et avait commis ses crimes en toute connaissance de cause. En d’autres termes, il était responsable de ses actes criminels. Résultat des courses : la cour l’a condamné à la perpétuité.

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