Société

Safi : Maroc Phosphore sur la sellette

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Il y a quelques jours, la Fédération démocratique du Travail (FDT) a tiré la sonnette d’alarme au sujet des nuisances des unités de Maroc Phosphore sur l’environnement et sur la santé des habitants de Safi.
La FDT a même exhorté la direction de Maroc Phosphore à publier « les résultats d’une enquête ayant révélé l’existence de symptômes de maladies professionnelles chez certains ouvriers ». Maroc Phosphore I et II, deux sites de valorisation appartenant au groupe OCP, produisent annuellement plus d’un million et demi de tonnes de deux produits chimiques: l’acide phosphorique et le phosphate monoammonique.
Au cours de leurs activités, les deux sites manipulent également d’innombrables produits dangereux pour la santé et l’environnement. La société Maroc Phosphore a réalisé trois études sur cette question. La première, en mai 1997, a porté sur les impacts de l’activité de Maroc Phosphore sur un périmètre de 20 km. En septembre de la même année, un congrès international à El Jadida s’est penché sur le traitement des déchets industriels et le développement durable. Et entre 1998 et 2002, le groupe OCP a financé, à hauteur de 100 millions de DH, une étude portant sur les procédures de mise à niveau de ses installations.
Les résultats de ces trois enquêtes sont restés classés « top secret ». Au début de l’année 2004, une cellule informelle au sein de la faculté des sciences d’El Jadida a effectué une étude sérieuse et poussée sur les effets de l’activité de Maroc Phosphore sur la santé des ouvriers, des habitants et sur l’environnement. « Nous avons constaté une grave dégradation de l’écosystème et des effets désastreux sur la santé des personnes », assure Chbiki Noureddine, membre du Bureau national de la FDT. Le but de cette enquête, réalisée par des professeurs universitaires, était de mettre en exergue ses dangers, et partant, d’entamer une discussion sérieuse avec Maroc Phosphore pour trouver des solutions adéquates à ces problèmes. « Toutefois, les responsables de ces unités n’ont rien voulu entendre », souligne Chbiki.
Pourtant, l’enquête a levé le voile sur des dangers réels et graves sur la santé des populations locales et sur l’environnement marin, dus aux rejets de produits hautement toxiques. C’est ainsi que les enquêteurs ont recensé une trentaine de maladies professionnelles.
C’est le cas du « syndrome de Raynaud », un trouble de la circulation sanguine dans les doigts, ce qui leur donne un aspect pâle, cireux ou bleuté. A Safi, cette affection est due aux vibrations subies aux mains et aux bras des ouvriers.
Le fluor et l’acide fluorique ont causé aux employés des maladies dermiques, des brûlures chimiques et des lésions respiratoires. On a même enregistré des morts au cours des derniers mois. Une surexploitation à la poussière acyclique est responsable de pathologies graves, telles que la talcose et la pneumonie. L’arsenic et ses composantes minérales, qui apparaissent à la suite de réactions chimiques et qui sont déversés dans la mer, causent des perturbations de la circulation sanguine, des vomissements, sans compter les maladies du foie et la maladie de Bowen (lésions dermiques). Les produits chimiques organiques liquides utilisés en laboratoires, comme la chlorure de méthyle et l’éther, sont responsables de la prolifération d’eczémas divers, d’asthme, des états d’ivresse qui peuvent entraîner le coma, la fatigue et le délire.
« En fait, la liste des pathologies est très longue », assure Chbiki. Les enquêteurs de la faculté des sciences d’El Jadida ont réalisé des tests médicaux pour savoir si ces maladies peuvent se se transmettre génétiquement. « C’est une option que nous prenons très au sérieux et qui n’est pas du tout à écarter, car à Safi, nous avons trouvé des animaux qui ont transmis génétiquement leurs maladies, puisque certaines bêtes sont nées avec cinq pattes », conclut Chbiki. Affaire à suivre.

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