Société

Saïd Masrour : «Le 20 juin est mon combat»

© D.R

Aujourd’hui Le Maroc : Cinq mois après sa constitution, quel est le bilan de l’Association 20 juin ?
Saïd Masrour : Un bilan globalement négatif. Nous avons certes organisé un après-midi de distraction pour les enfants des familles de victimes, fêté avec éclat la commémoration du 25e anniversaire des événements du 20 juin et envoyé 25 enfants en colonies de vacances dans le cadre d’une initiative du Conseil consultatif des droits de l’Homme, mais l’énorme effort consenti pour faire connaître notre Association n’a pas porté ses fruits. Le siège de l’Association n’a pas été validé, notre récépissé nous est toujours refusé et, de ce fait, nous ne pouvons prétendre à aucun financement. Dans ces conditions, il est difficile d’agir, impossible d’avancer.

Le Conseil consultatif des droits de l’Homme vous avait pourtant assuré de son soutien ?
Les recommandations de l’IER en matière de soutien aux associations de victimes des «années de plomb» nous ont en effet poussés à nous tourner vers le CCDH pour assurer le dédommagement moral et matériel des victimes des événements du 20 juin 1981 et de leurs familles. L’allocution prononcée par M. Bouderka, au nom du CCDH, lors de notre assemblée constitutive, nous avait rempli, d’optimisme.
Mais jusqu’à aujourd’hui, nous n’avons rien eu d’autre que des promesses. Pas de local, pas de subvention. Quant à l’opération «Colonies de vacances», le CCDH s’était engagé à faire bénéficier 50 de nos enfants, or seuls 25 en ont profité.
Début juillet, nous avons pris acte de l’accord entre la primature et le CCDH destiné à mettre en œuvre les recommandations de l’IER par le biais d’une action intergouvernementale.
Mais pour ce qui est des dédommagements promis par le CCDH, ils ont été repoussés de mois en mois, de juin jusqu’à août. Et tout dernièrement, Mme Khadija Rouissi, membre du CCDH, nous a promis que cela se débloquera en décembre. En attendant, force est de constater que le CCDH entre en contact avec les familles sans passer par l’Association, ce qui porte un grave préjudice à notre légitimité.

Cela tendrait donc aujourd’hui à vous rapprocher du Forum Vérité et Justice, dont vous sembliez vous être démarqués à l’époque de votre création ?
Le très faible soutien du CCDH nous a effectivement conduits récemment à envisager de dissoudre notre association et rejoindre les rangs du Forum Vérité et Justice afin de faire aboutir les revendications des victimes et des familles de victimes des événements du 20 juin 1981.
J’en profite d’ailleurs, en ma qualité de membre du conseil national du FVJ, pour préciser un point important. Ceux qui ont prétendu que la création de notre association était téléguidée par le CCDH pour affaiblir la position du FVJ à la veille de la tenue de son congrès national les 10, 11 et 12 mars dernier, ont la preuve désormais que leurs soupçons étaient infondés : si tel était le cas, le CCDH aurait tenu ses promesses. La vérité est que seul le CCDH avait répondu à l’invitation qui lui avait été faite, de même qu’à d’autres instances, notamment le FVJ et l’AMDH, de parrainer la constitution de notre association.
Concrètement, aujourd’hui, nous nous acheminons vers une refondation de notre association sur la base d’une nouvelle domiciliation ; l’actuelle étant contestée par l’administration. Cela nous permettra d’obtenir notre récépissé et d’accéder enfin aux financements qui nous permettront d’agir efficacement.

Quelles sont aujourd’hui, pour les victimes et leurs familles, les urgences les plus criantes ?
Il y a d’abord les blessés par balles, dont certains cas sont extrêmement préoccupants. Il y a ensuite le cas des dossiers constitués après l’expiration du délai, qui doivent être pris en considération. Avec, bien entendu, le problème de l’identification des dépouilles et la remise aux familles des certificats de décès. De façon générale, nous revendiquons un dédommagement équitable des familles et des victimes d’emprisonnements arbitraires.
Quant à la couverture médicale et à l’intégration sociale, nous estimons que tout reste à faire et que la promesse de l’AMO vaut à peine mieux à nos yeux que les prestations garanties sur la base d’un certificat d’indigence…

Votre association est-elle vouée à se dissoudre lorsque tous les dossiers dont elle a la charge auront été traités ?
Non, car nous avons également pour objet d’entretenir le souvenir de ces événements, afin qu’ils ne se reproduisent plus jamais. Autrement dit, nous voulons faire du 20 juin le symbole d’une refondation du pacte social entre l’Etat et les citoyens, et contribuer, sur le terrain, à faire renaître l’espoir dans les cœurs.

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