Société

Sexe, mensonge et… vidéo

Vendredi 3 mai. Dans l’après-midi. La salle n°4 de la Chambre Correctionnelle près le Tribunal de Première Instance de Casablanca-Anfa. Najib est au box des accusés. Ses yeux fixent ceux des trois magistrats.
…Oui, c’est ma femme et je l’ai filmée dans des positions pornographiques avec Mustapha…Non, non…c’est simplement une question de vengeance contre elle parce qu’elle me trompait…». Najib débite cette affirmation avec une grande confiance en soi, comme s’il était convaincu de la justesse de son acte.
Natif de Casablanca en 1973, il n’a pu suivre ses études au delà de la septième année de l’enseignement fondamental. Il a rejoint une usine de fabrication de chaussures. En 1990, il émigre en Libye où il devient commerçant. Été 1994. Quatre ans ont passé en un clin d’oeil. Il regagne sa ville natale, rend visite à sa famille, sort pour bavarder, rigoler. A la plage Tamaris, il rencontre une fille ; Wafaa. Divorcée, elle est son aînée de trois ans. Il tombe amoureux d’elle. Ils vivent en concubinage. Aucun d’entre eux n’a pensé au mariage. Mais une année plus tard, le sixième sens de Wafaa lui dit que son amant va tenter de la laisser tomber.
-Je suis enceinte de quatre mois, lui annonce-t-elle. -Mais on doit attendre que je rentre de Libye pour établir un acte de mariage, lui répond-il.
-Je ne veux pas attendre. Et si tu ne veux pas contracter maintenant un acte de mariage avec moi, je vais recourir à la justice, le menace-t-elle. La grossesse de Wafaa lui fait un choc et c’est une véritable épée de Damoclès qui le place entre la liberté et la prison. Il n’a d’autre choix que de céder à ses menaces et d’établir un acte adoulaire de mariage avec Wafaa. Une année plus tard, une petite fille naît de cette relation. Najib finit par emmener sa femme et leur fille avec lui en Libye.
Mais au bout d’un certain temps, excédé par sa jalousie, il décide de la faire revenir à Casablanca. Il lui loue un appartement à Derb Milan. Il vient chez elle de temps en temps, passe quelques jours et retourne en Libye.
-«Ta femme te trompe», lui dit un jour une femme de sa connaissance. Une information qui le bouleverse, qui l’empêche de dormir.
-«Je retourne demain en Libye», dit-il à sa femme. Le lendemain matin, il fait ses valises, quitte la maison.
L’après-midi. Sa femme entend des coups à la porte, ouvre.
-«Najib !», s’exclame-t-elle, perturbée. Najib entre chez lui, se dirige vers la chambre à coucher, trouve un homme. Ils se bagarrent. L’homme arrive à s’enfuir.
Najib s’adresse à la police, dépose une plainte. Wafaa est convoquée, arrêtée. Elle nie l’accusation d’adultère et elle est libérée pour absence de preuves et de témoins. Il ne l’a pas répudiée. Il retourne en Libye pour gagner sa vie. Là, il rencontre un Italien.
-«Le commerce des cassettes-vidéo de films pornographiques rapporte gros. Si tu veux qu’on travaille ensemble, ce sera une bonne chose…Toi tu filmes et moi je me charge de les vendre en Chine…, lui propose l’Italien. Sans trop réfléchir, Najib accepte la proposition, retourne à Casablanca, converse avec sa femme à propos du projet:
-«Je vais faire des films pornographiques et si tu veux m’aider, je crois qu’on deviendra riches…Je vais te verser ta commission, bien sûr…».
Mi-avril. Najib est arrêté. Les éléments de la deuxième brigade criminelle se chargent de l’affaire.
«…Oui, je l’ai filmée avec Mustapha le fou…parce qu’elle me trompait avec un homme que je n’arrive pas à arrêter…», déclare-t-il aux enquêteurs. Alors que Wafaa ne cesse de leur répéter : «…Il ment, il m’a obligé d’être filmée dans des positions érotiques et pornographiques avec Mustapha…Il vend les cassettes-vidéo à un étranger qui les revend en Chine…C’est ce qu’il m’a expliqué…et bien qu’il m’ait promis de me verser ma commission, il ne m’a rien donné jusqu’à aujourd’hui…». Devant le tribunal, Najib a nié avoir des relations avec un certain Italien ou qu’il vendait les cassettes-vidéo pornographiques filmant sa femme et Mustapha. «C’était uniquement pour me venger d’elle», affirme-t-il au tribunal. Mais le tribunal a les cassettes-vidéos saisies entre ses mains pour le juger coupable et le condamner à six ans de prison ferme. Une histoire et des faits inimaginables, mais qui ont bel et bien été exposés dernièrement devant la justice à Casablanca.

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