Société

Souffrances au féminin

© D.R

Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle Moudawana, plusieurs affaires de divorce se sont dénouées grâce à l’entrée en vigueur du divorce «Chikak». C’est une variante de divorce qui peut émaner de l’épouse. Le divorce peut être prononcé sans qu’elle ait à justifier quoi que ce soit. Mis à part cette grande nouveauté, l’apport concret du nouveau code de la famille demeure surdimensionné dans les esprits. Comme le fait remarquer clairement Zhor El Horr, présidente du Tribunal de Derb Soltane el-Fida : «Au Maroc, les familles souffrent de plusieurs problèmes. Le code de la famille n’est pas la baguette magique qui va tout résoudre». A considérer certains cas vécus d’affaires de divorce, qui ne sont en fait que la tête de l’iceberg des problèmes des familles marocaines, d’autres réalités surgissent.
Ce sont des problèmes matériels et des défaillances au niveau de l’éducation. «Dans le cadre de mon travail au sein de l’association, je reçois des femmes venues dans 67% des cas de milieux très défavorisés. Elles sont en général violentées. Plus d’une femme sur deux change d’avis avant de déposer plainte. D’autres le font alors que l’affaire est en cours au Tribunal, souvent sans même nous avertir», déclare Maître Aïcha Lakhmass, secrétaire général de l’association Union de l’Action féminine. Il ne faut pas aller chercher loin l’explication de ce revirement. Ces femmes n’ont qu’une hantise : se retrouver sans ressources. Durant la période que dure l’affaire au Tribunal, la femme peut rester dans le foyer conjugal comme elle peut avoir une dotation pour le logement. Le montant est calculé sur la base du revenu de l’époux. «La dotation va de 300 à 600 DH pour ces femmes. Comment peut-on louer avec un montant aussi bas tout en ayant 2 à trois enfants à charge ?!», dénonce Aïcha Lakhmass. Encore faut-il l’avoir. Selon elle, c’est la croix et la bannière pour arriver à pousser le mari à payer.
De peur de se retrouver dans la rue et de se retrouver sans rien, la femme baisse les bras et accepte son triste sort sans broncher. Outre le problème matériel, la famille marocaine souffre des conséquences de l’éducation reçue. «Dans la famille marocaine, pendant toujours, l’homme a eu tous les droits alors que la femme n’a fait que s’aligner. Ceci est ancré dans nos traditions», explique Aïcha Lakhmass. Et de continuer : «Une femme qui se montre insatisfaite est une femme qui sort de la normalité vis-à-vis de la société». Depuis son jeune âge, la femme est dressée par ses parents de telle sorte qu’elle se mette au service de son père, de son frère et pour finir de son époux. La société marocaine, alors qu’elle est très permissive pour l’homme, exige de la femme des sacrifices continuellement.  Une épouse qui s’émancipe et essaie de recouvrer ses droits est une épouse qui «veut détruire son couple et cherche des problèmes».
S.Amina est une mère de 2 enfants qui se conforme parfaitement au moule. Elle est enseignante dans un collège privé alors que son époux est maître dans une école primaire. Depuis son mariage, le couple habite dans un appartement dont le propriétaire est le père de l’épouse. La voiture de la famille achetée par le couple est au nom du mari. Ayant un compte bancaire joint, l’époux maîtrise complètement les ressources de la famille. L’époux vit sa vie en délaissant et femme et enfants. C’est son épouse qui assume toutes les charges familiales.
«Je ne veux pas divorcer. Je veux juste que mon époux m’honore et s’occupe de ses enfants», se confie S.Amina. L’association a orienté cette épouse vers la consultation psychologique. «Certaines femmes vulnérables perdent toute présence au sein du couple. Elles ont besoin de séances psychothérapeutiques pour retrouver confiance en elles», explique la Secrétaire général de l’association.
La société marocaine a encore besoin de temps pour venir à bout de ses problèmes. Tant mieux s’il y a une nouvelle Moudawana, toutefois la société civile a encore du pain sur la planche en termes de sensibilisation. 

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