Société

Talmest : fin d’une injustice

© D.R

Question à mille dirhams : qui sait où se trouve Sebt Talmest? Peu de monde à part les natifs et les automédons.
Située à 60 km au nord d’Essaouira et à 366 km de Rabat, cette localité de 4133 habitants a toujours préféré la discrétion aux feux de la rampe. Peu d’évènements rythment son quotidien : les passages de véhicule par la RP n°1, le souk du samedi, les rentrées scolaires, les changements de saisons et les pérégrinations des cigognes blanches. A dire vrai, peu d’habitants savent que cette municipalité figure sur le recensement officiel des zones traversées par cet oiseau symbole de l’Alsace qui a d’abord habillé les étiquettes des bières marocaines avant de venir hiverner au Maroc aux lieux et places de ses traditionnelles destinations que sont le Mali, le Niger et le Sénégal. Mais ce n’est point là la seule chose qu’ils ignorent. En effet, ni les efforts que le centre des travaux agricoles déploie pour améliorer les rendements des cultures et des races bovines, ni ceux des enseignants pour venir en aide à leurs prochains, ne peuplent leurs discussions. A preuve, «La Vallée verte», association locale dont ils constituent l’épine dorsale est plus présente sur Internet que dans les interminables logorrhées des terrasses de cafés. A Sebt Talmest, il n’existe nul autre lieu pour faire et défaire le monde au gré des journaux d’Al Jazeera et des séries télévisées à l’eau de rose. Aussi ne peut-on que s’étonner d’y voir encore discuter de la décision du pacha ordonnant la fermeture de l’une des deux pharmacies de ce village paisible sur ordre du gouverneur de la province. L’histoire a «fait des vagues». Elle a même donné lieu à une manifestation de soutien conduite par le président du Centre marocain des droits de l’Homme et comprenant des représentants de l’Alliance nationale des pharmaciens du Parti de l’Istiqlal et des membres du Conseil régional des pharmaciens du nord dont un ex-président. Une première ! De mémoire de résident, jamais on n’avait vu une telle levée de boucliers. Comment en est-on arrivé à ce point de non-retour ? Flash-back. En juin dernier, Abdelaziz Mahi, propriétaire de la pharmacie Talmest depuis 1999, adresse un avis d’absence à la Direction du médicament et de la pharmacie auprès du ministère de la Santé publique. Conformément à la loi, il le fait via une lettre recommandée avec accusé de réception et en dépose une copie auprès de l’autorité locale. Sa demande indique que son absence aura lieu du10 au 30 juin et précise que son remplaçant sera le patron d’une autre pharmacie située à Aït Daoud.
A ses employés, il donnera les consignes d’usage en précisant qu’il ira passer quelques jours de vacances à Lyon en compagnie des membres de sa famille. Sitôt arrivé en France, quelle ne fut sa surprise de se voir appeler par l’un de ces derniers. Les nouvelles étaient mauvaises : le pacha est venu leur signifier sa décision de fermer l’officine sur instruction du gouverneur.
Mahi n’eut donc d’autres alternatives que de retourner à Essaouira avec diligence pour voir de quoi il en retournait. Trop tard. Ce qui devait arriver advint : la décision était irrévocable et face à son insistance de n’en permettre l’exécution que si elle est motivée par un écrit, le pacha a délivré une lettre manuscrite mais portant sa signature et son tampon.
Non seulement il lui ferme son officine, mais il met en faction devant elle un agent des forces auxiliaires avec instruction de ne laisser personne y entrer ou en sortir. Le Rubicon est franchi. «Mais je ne me suis pas laissé faire. J’ai fait faire constater cet état de fait par un huissier de justice, puis j’en ai saisi notre conseil de l’Ordre et introduit un recours en référé auprès du tribunal administratif de Marrakech». Pour Abdelaziz Mahi, l’affaire était trop grave pour qu’il se taise. Grand bien lui en fit, puisque dans son jugement en date du 26 juillet, le tribunal administratif de Marrakech lui donne entièrement raison.
Dans son dispositif, ce jugement atteste du caractère illégal de la décision de l’autorité locale et ordonne de « mettre un terme » à ce qu’il a qualifié d’ « agression physique consistant en la fermeture de la pharmacie du plaignant et le retour à la situation antérieure »… Une première qui fera jurisprudence!

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