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Thami Khyari : « Jettou en veut au FFD »

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ALM : Considérez-vous le projet de loi sur les partis politiques comme dangereux pour l’avenir du FFD?
Thami Khyari : Absolument pas. Je ne pense pas que ce texte, dont je ne connais pas encore les détails, puisse comporter un quelconque danger pour le FFD. Au contraire, nous avons été les premiers à demander l’élaboration d’une telle loi pour que les partis politiques ne soient plus considérés comme de simples associations.
Généralement, les partis politiques refusent d’ouvrir leurs comptes financiers…
Ce n’est pas le cas du FFD. Nous ne bénéficions d’aucun financement occulte. Nos moyens, malheureusement très limités, sont connus de tous. Ils sont constitués essentiellement des subventions étatiques et de l’apport de nos députés.
Certains estiment que le FFD tirait sa force de l’ancien système. Qu’en pensez-vous?
Tout d’abord, le FFD n’a pas fonctionné avec l’ancien système. Nous avons créé le parti en 1997, deux ans seulement avant l’arrivée de SM Mohammed VI au pouvoir.
Comment se fait-il que vous avez perdu plusieurs élus dès que vous avez quitté le gouvernement?
Effectivement, il y a un certain nombre d’élus qui ont quitté le parti. En fait, en 1998, un an après la création de notre parti, nous avons eu l’honneur de participer à un gouvernement de transition. C’est ce qui a attiré vers le FFD un certain nombre d’opportunistes qui ont tablé sur notre présence au gouvernement pour assouvir leurs ambitions personnelles. Une fois à l’opposition, ils ont tout simplement quitté le FFD.
Pourquoi ne pas avoir soutenu le gouvernement Jettou?
Les partis qui ont soutenu un gouvernement sans y participer ont toujours perdu leur âme. En démocrate que je suis, j’estime qu’un parti qui n’est pas au gouvernement, par la force des choses, doit passer à l’opposition. Malheureusement, tout le monde ne comprend pas cette position.
De qui parlez-vous? Du Premier ministre?
Certains s’attendaient à ce que le FFD fasse comme d’autres partis politiques. Nous ne jouerons pas à ce jeu. Effectivement, j’ai l’impression que le comportement du Premier ministre à l’égard du FFD montre qu’il n’est pas content que nous ayons choisi l’opposition. Personnellement, j’ai vécu des périodes beaucoup plus difficiles et ce n’est pas aujourd’hui que je me laisserais intimider.
Qui vous a intimidé?
Vous avez parlé du départ de plusieurs élus, certaines rumeurs parlent de l’intervention de tel ou tel autre pour affaiblir le FFD. On nous a assurés du contraire. Mais comme dit l’adage: il n’y a pas de fumée sans feu.
Dans les partis d’opposition, les médias semblent être intéressés uniquement par le PJD. Comment vivez-vous cela?
Effectivement, au niveau des médias publics, je vous assure qu’incessamment nous allons saisir la Haute autorité de la Communication Audiovisuelle de cette affaire. Depuis que nous avons quitté le gouvernement, nous n’avons eu aucun passage, ni sur la TVM, ni sur 2M. Cela dure deux ans. Peut-être que certains veulent présenter le PJD comme unique force d’opposition. Ce qui n’est pas le cas. L’opposition est diverse.
Pensez-vous que le ministre de la Communication a donné des instructions pour que le FFD soit boycotté?
Sincèrement je ne sais pas si le ministre de la Communication est derrière cela. J’ignore également si les patrons de ces deux chaînes font de l’autocensure pour ne pas déplaire au ministre. Ce qui est sûr, c’est que toute cette affaire n’est pas le fruit du hasard.
Quel regard portez-vous aujourd’hui sur le secteur de la pêche?
En tant que citoyen, je dirais: quel gâchis! Voilà un secteur qui était appelé à être l’une des locomotives du développement économique et social du pays. Aujourd’hui, il a totalement perdu son âme puisque même le ministère des Pêches a disparu. Après le départ de la flotte européenne, je ne comprends pas comment on pourrait expliquer la crise que connaît le secteur par l’augmentation de la pression d’exploitation.
Le départ des bateaux européens n’est pas une fin en soi. Ce n’était qu’un moyen de permettre au pays de pouvoir gérer lui-même ses ressources. Il y a actuellement 250 millions de DH déposés dans le Fonds Hassan II pour la construction de villages de pêcheurs. Cette somme n’a pas été utilisée.
Que faut-il faire pour sortir ce secteur du marasme?
Pour toute réforme, il faut avoir un ministre qui fasse preuve de courage politique pour imposer, par exemple, de nouvelles formules d’exploitation. Rien n’est au-dessus de l’intérêt public. Un homme politique qui dirige un secteur doit aller dans ce sens-là.
Jusqu’où devrait aller le ministre des Pêches?
S’il estime qu’il ne peut pas faire son travail convenablement, qu’il parte et puis c’est tout. Mais je vous garantis que lorsqu’on a le courage politique, on peut aller très loin. Mais encore faut-il supporter la pression des lobbies.
Que pensez-vous de l’idée de signer un nouvel accord de pêche avec l’Espagne?
A ma connaissance, les accords sont passés avec l’Union européenne et non pas avec les Etats membres. Avec l’Espagne, nous avons d’autres domaines de coopération, à part l’extraction. Si ces rumeurs se vérifient, ce serait une grave faute politique. Le problème est réglé et dépassé. Y revenir serait créer de nouvelles tensions entre l’Espagne et le Maroc.
Que pensez-vous, maintenant, du secteur de la santé?
J’ai été étonné de voir, à l’occasion de la visite de SM le Roi à Meknès, le ministère de la Santé présenter le Programme de Financement et de Gestion de la Santé (PFGS). C’est un programme financé par un crédit de la Banque mondiale qui fonctionne depuis 1999, à l’époque d’Abdelouahed El Fassi. A mon arrivée, j’ai diminué les charges superflus, qui coûtaient 65 millions de dollars, pour ne laisser que les réalisations physiques et concrètes du PFGS. L’actuel gouvernement a réintroduit les 65 millions de DH sachant que les crédits de la Banque mondiale coûtent très cher.
Pensez-vous que la couverture médicale, avec l’AMO et le Ramed, est réalisable d’ici janvier 2005?
Quand j’ai présenté le texte, pour la première fois, j’étais persuadé qu’il était réalisable. Il suffit de faire preuve d’imagination. Notre couverture ne doit absolument pas être selon les normes occidentales. Ce qui est sûr, c’est que pendant toute une année, le gouvernement n’a pas travaillé sur ce dossier. Je sais également que ce dernier échappe complètement au ministère de la Santé. Nous avions préparé un appel d’offres pour équiper 24 hôpitaux en scanners, sans aucune incidence financière sur les caisses de l’Etat. Le projet a été abandonné.
Pensez-vous qu’un Premier ministre politique aurait pu avoir un bilan plus positif?
Effectivement, l’action d’un Premier ministre doit être sanctionnée par les urnes. Ce qui ne peut pas être le cas pour Driss Jettou.
En fait, sa mission principale était de sauver l’économie. Mais personne, aujourd’hui, n’ose dire que c’était un succès.
Que fait Thami Khyari après avoir quitté le gouvernement?
Je suis enseignant-chercheur à l’Institut agronomique et vétérinaire Hassan II de Rabat. Mais cela fait deux ans que ma situation n’a pas été régularisée. Mon dossier traîne quelque part dans un ministère.
Vous n’avez pas contacté un de vos amis ministres pour un coup de pouce ?
Jamais je ne le ferais. Je suis un ancien ministre, certes, mais je me mets à la place du simple citoyen. Je veux voir jusqu’où la lenteur de l’administration peut aller.

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