Société

Un enfant dans un puits

«Ghizlane El Idrissi, 19 ans, employée de maison a disparu, lundi 18 mars vers 17h25mn avec l’enfant de ses employeurs, Hamza Gammi, cinq ans». C’est l’information reçue, ce matin du mardi 19 mars, par le chef de la PJ de Hay Mohammadi-Aïn Sebaâ. Il charge les éléments de la 4ème section judiciaire de tirer l’affaire au clair.
«On doit les retrouver le plus tôt possible… Ils ont peut-être été kidnappés…», se dit le chef de la PJ. Les investigations effectuées toute la journée du mardi ne permettent pas de localiser Hamza et la jeune fille.
Mercredi matin. La famille de Hamza reçoit un appel téléphonique. «Papa ! Papa !». C’est la voix de Hamza.
Sa maman qui était à l’appareil éclate en sanglots. L’appel permet à la police de localiser le lieu où se trouve Hamza. Il est à Salé et plus précisément au quartier Al Qaria. Les enquêteurs ne savent pas encore si Ghizlane est avec lui ou non. Des éléments de la P.J se dépêchent à Salé. Ils arrivent à repérer la famille chez laquelle Hamza a passé la nuit du mardi au mercredi.
«Ghizlane nous a présenté Hamza comme étant son neveu», affirme une femme à la police. L’après-midi du même jour, les parents angoissés du petit Hamza reçoivent un autre appel. Une fois encore, la voix de l’enfant appelle son papa, sans pouvoir ajouter autre chose. La nouveauté est que cet appel est émis de Khémisset. Les limiers de la 4ème section judiciaire de la PJ de Hay Mohammadi-Aïn Sebaâ se déplacent dans cette province. C’est la course contre la montre.
Ils sont désormais convaincus que la jeune employée est mêlée à cette histoire. «Espérons qu’elle n’ait pas fait de mal à l’enfant», dit le chef de la brigade à son collègue. Ils apprennent que les parents de Ghizlane demeurent au douar Lamaâzize. Mais quand ils y arrivent, elle n’est pas chez ses parents. Ces derniers affirment ne pas l’avoir vue depuis Aïd Al-Adha. Elle est l’aînée de ses deux frères. Son père est un marchand de pois-chiches. Les enquêteurs déploient leurs efforts pour retrouver l’enfant vivant. Une personne leur affirme qu’elle est chez une famille au centre ville de Khémisset. Les policiers effectuent une descente. Ils tombent sur Ghizlane. Sans l’enfant.
«Où est Hamza ?», lui demande le chef de la brigade. «Je ne sais pas. Nous avons été enlevés par une bande de malfaiteurs qui m’a relâché et a gardé Hamza».
«Tu mens ! Avoue que Hamza est mort, dis la vérité !…»
Ghizlane baisse la tête, n’ajoute pas un mot de plus.
«Allons, avoue !», lui demande une fois encore le chef de la brigade.
«Oui, Hamza est mort».
L’homme blêmit. En pensant aux parents du pauvre petit garçon, le courage lui manque d’aller informer son supérieur. Comment va-t-il leur annoncer cette nouvelle horrible ? Nul ne pourra remplacer Hamza, leur benjamin. «Pourquoi l’as-tu tué… Pourquoi ?». «Je voulais de l’argent…Sa mère a beaucoup d’argent…».
«Qui t’a dit ça ?, raconte-nous toute l’histoire».
Un an et demie auparavant, la mère de Hamza avait rencontré Ghizlane au hammam du quartier, à la route Oulad Ziane. La dame habite, pas loin, dans un appartement à la résidence Ouled Ziane, près de la gare routière. Les deux femmes discutent et, de fil en aiguille, Ghizlane qui travaillait chez une famille accepte de travailler chez la mère de Hamza pour la somme mensuelle de 500 dirhams. Les jours passent et Ghizlane devient quasiment un membre de cette famille. Le plus petit de cette famille, Hamza, est très attaché à elle. Avant Aïd Al Adha, elle entend son employeuse qui parle de la vente d’une partie de son héritage, un hammam, contre 450.000 dirhams.
«Jusqu’à quand vais-je continuer à me contenter de 500 malheureux dirhams, alors qu’eux, ils ont des millions». Une situation qui lui paraît aussi absurde qu’injuste. Elle ne veut plus rester entre le marteau de la misère et l’enclume de la pauvreté. «Je dois faire quelque chose pour avoir une partie de ces millions.
Au moins 20 millions…», se dit-elle. Elle passe l’Aïd chez sa famille au douar Lamaâziz, dans la province de Khémisset. Lorsqu’elle rejoint ses employeurs, son plan a déjà mûri dans sa tête. Elle va simuler le rapt du petit Hamza et prétendre qu’il a été effectué par une bande, pour obtenir par la suite une rançon. Elle prépare ses employeurs en leur disant que Hamza a été à plusieurs reprises l’objet de tentatives d’enlèvement.
Lundi 18 mars. Elle rejoint Hamza à la maternelle, le prend. Il est habitué à elle. Elle téléphone à son copain : «Je pars en voyage demain avec mon neveu, mais je veux que tu te débrouilles pour me trouver un endroit où passer cette nuit…». Son copain l’emmène chez un ami à lui au quartier Lamia, au Hay Mohammadi. Le lendemain, elle passe la nuit à Salé pour se rendre à Khémisset. Elle remarque que Hamza se souvient de tous les lieux et les maisons qu’ils ont fréquentés ces deux jours. Perturbée, elle ne sait plus quoi faire après s’être engagée dans cette histoire. «Je dois me débarrasser de lui, ni plus ni moins…», décide-t-elle.
Elle achète un petit flacon d’acide chlorhydrique, prend Hamza jusqu’au douar Labiratte, province de Khémisset, demande à une femme de lui donner un peu d’eau du puits. Elle s’assure que le puits est très profond. Et elle attend que la femme s’en aille, pour ressortir le flacon et donner une dose d’acide chlorhydrique à Hamza. L’enfant hurle, commence à vomir. Ghizlane le tient par la main, le dirige vers le puits et le pousse violemment. Elle s’en retourne comme si de rien n’était. Le pauvre petit Hamza a été enterré vendredi dernier alors que Ghizlane a été déférée hier devant le juge d’instruction près la Cour d’appel de Casablanca pour répondre de son horrible crime.

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