Société

Viol d’un mineur dans un mausolée

Mardi 23 avril 2002 dans l’après-midi. La salle d’audience près la chambre criminelle près la cour d’appel d’El Jadida est archicomble. Le magistrat accède à la salle avec ses quatre assesseurs, le représentant du ministère public et le greffier.
L’assistance se lève quand elle a entendu l’agent crier «Mahkama». Le président ouvre le premier dossier pour cette audience de l’après-midi. «Dossier n°98/2002…Le mis en cause Abderrahmane…La victime Soufiane et sa mère Samira…» appelle-t-il.
Abderrahmane se lève du banc des accusés. Il a trente ans. il est habillé en djellaba blanche et porte des babouches jaunes; son visage ovale représente des signes de tristesse et ses yeux hagards traduisent son égarement et son désarroi. Certes, ce n’est pas la première fois qu’il se trouve dans une telle situation. Il avait déjà purgé une peine de neuf mois de prison ferme pour violence contre ascendant. Et pourtant ses parents sont là, assistent à son procès et tentent de le soutenir au moins moralement. Ils savent qu’il est malade mental. Il suit, depuis quelques années un traitement médical.
Samira se lève elle aussi de sa place, traîne son enfant. Il est vêtu d’un tricot en laine gris et d’un pantalon en bleu-jean’s. Il ne sait rien de ce qui se passe devant lui. Innocence de l’enfance. L’assistance le suit des yeux jusqu’à devant la cour, juste à côté du mis en cause.
«je m’appelle Samira, mère de Soufiane. Il est âgé de quatre ans», confie-t-elle à la cour.
Le président lui demande de sortir et d’attendre hors de la salle d’audience. Samira, qui traîne son enfant, fait demi-tour et se dirige vers la porte de la salle. Les yeux de l’assistance ne quittent pas l’enfant.
«Tu es accusé, selon les dispositions de l’article 484 du code pénal, d’attentat à la pudeur sans violence sur un mineur. Qu’en dis-tu.» lance le magistrat à Abderrahmane. Abderrahmane garde le silence comme si le président ne lui a pas parlé ou comme s’il n’avait rien entendu. Le magistrat lui répète la question et lui demande une fois encore de répondre. Comme s’il se réveillait d’un profond sommeil, il ouvre la bouche et répond : «je n’ai rien fait…je l’ai embrassé comme tout autre enfant…»
«Dans le procès verbal, tu as déclaré avoir violé l’enfant au moment ou sa mère était en train de soutenir une femme possédée par les diables…», lui rappelle le président.
«Non, Mr le président…sa mère a menti…je suis innocent…je ne peux pas faire ça à l’intérieur du mausolée…», répond-il.
«Et tu peux le faire en dehors du mausolée ?», lui demande le juge.
Abderrahmane ne répond pas et se contente de baisser les yeux comme s’il était timide.
«La victime Soufiane et sa tutelle», appelle le juge. Samira rentre à la salle d’audience, saisit son enfant par la main. Elle avance avec des pas lents. Le juge demande à l’agent d’apporter une chaise sur laquelle l’enfant se mettra debout pour qu’il s’approche de lui. «Qu’est-ce qu’il t’a fait ce Monsieur ?», lui demande le juge.
L’enfant commence à répondre à voix basse.
L’assistance n’entend rien. L’enfant accuse Abderrahmane. Le juge appelle une fois encore ce dernier, lui demande de répondre aux déclarations de l’enfant. «Je n’ai rien entendu», répond-il. Le magistrat lui rappelle les aveux de l’enfant: «Samedi 20 avril 2002, dans l’après-midi, tu étais au mausolée Sidi Bennour, en ancienne médina à Ezemmour…tu étais assis près d’un f’kih qui psalmodiait le coran et des femmes s’essayaient devant vous…Soufiane était avec sa mère…Une fois sa mère sortie pour soutenir une femme malade, tu l’as appelé et tu l’as emmené dans un coin où tu as commencé à l’embrasser d’une façon anormale…après quoi tu as commencé à te frotter contre son corps au point que tu as éjaculé…à ce moment sa mère est venue le chercher et elle a remarqué que tu le violais sans pudeur…».
«Non, M.le président, c’est faux, c’est faux», réplique-t-il.
Le juge appelle la mère de Soufiane, lui demande de relater ce qu’elle avait vu. «J’ai trouvé mon enfant sur son sexe et tous ses vêtements étaient mouillés d’un liquide visqueux…», répond-elle.
Quand le représentant du ministère public a pris la parole, il s’est contenté de requérir la peine maximale selon l’article 484 qui stipule : «Est puni de l’emprisonnement de deux à cinq ans tout attentat à la pudeur consommé ou tenté sans violences sur la personne d’un mineur de quinze ans de l’un ou de l’autre sexe». Mais «pourquoi le parquet requiert-il la peine maximale alors qu’on ne peut pas qualifier le comportement d’Abderrahmane d’attentat à la pudeur…Car il s’est contenté de mettre Soufiane sur ses genoux comme nous faisons tous avec les petits enfants», réplique l’avocat, constitué dans le cadre de l’assistance judiciaire. «En plus, on ne dispose pas d’un certificat médical attestant que l’enfant était victime d’une violence sexuelle et nous réclamons, enfin, une expertise médicale parce que le mis en cause souffre d’une maladie mentale», ajoute-t-il. Seulement, la cour a jugé utile de mettre le dossier en délibération sans recourir à une expertise médicale sur Abderrahmane, pour le juger enfin coupable et le condamner à 4 ans de prison ferme.

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