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Le pouvoir des femmes (6)

© D.R

Le 10 octobre 2003, SM le Roi Mohammed VI amorce une nouvelle réforme et clôt un dossier qui traînait depuis de longues années. En annonçant les grandes lignes du nouveau code de la famille, le Souverain révolutionne les rapports entre les Marocaines et les Marocains : responsabilité égale des deux conjoints, polygamie quasiment interdite grâce à l’instauration de règles draconiennes, abolition de la tutelle pour les filles majeures qui le désirent, possibilité pour la femme de demander le divorce en cas de préjudice, répartition des biens acquis au cours du mariage. Les nouvelles dispositions marquent un tournant dans l’histoire du pays. Un tournant qui n’aurait pu se réaliser sans le courage d’un Roi, soucieux d’égalité entre tous ses sujets, des deux sexes. Un tournant que les différentes associations féministes attendaient il y a plusieurs années. Depuis 1993, année qui a connu une première réforme de la Moudawana, elles n’ont cessé de réclamer d’avantage de liberté et d’égalité. Cette réforme partielle, qui a essentiellement touché la tutelle légale des enfants, accordée à la mère en cas de décès du père et l’annulation d’autorisation du mari pour que la femme puisse exercer une activité professionnelle, n’a fait qu’aiguiser leur appétit. Les avancées sont là, mais elles sont bien trop minimes.
Les attentes étaient nombreuses. SM le Roi Mohammed VI y a répondu favorablement dès son accession au Trône. «Comment espérer assurer progrès et prospérité à une société alors que les femmes, qui en constituent la moitié, voient leurs droits bafoués», déclarait-il, le 20 août 1999, dans un de ses premiers discours. La situation de la femme était bel et bien au coeur de grandes polémiques et de controverses. Le plan d’intégration de la femme dans le développement, préparé par le gouvernement Youssoufi I, n’allait pas arranger les choses. Les pour et les contre fusaient de partout. Les premiers ont crié leur «oui» haut et fort lors d’une manifestation organisée en mars 2000 à Rabat, alors que les seconds ont affiché leur «non» dans une marche non moins suivie à Casablanca. Les deux manifestations ont de ce fait constitué le point de départ d’une profonde réflexion sur la véritable situation de la femme au Maroc. On a alors appelé à l’arbitrage du Roi. Lequel avait nommé une commission consultative pour la réforme du statut personnel. Nombreux étaient alors ceux qui pensaient que la réforme serait enterrée: la composition de la commission n’invitait guère à l’optimisme et les islamistes, devenus la première force d’opposition parlementaire après les élections législatives du 27 septembre 2002, avaient le vent en poupe. La gestation est difficile. Deux courants, diamétralement opposés, s’entrechoquent. Le premier, incarné par les Ouléma, conservateurs, qui n’entendaient faire aucune concession et ne voulaient nullement s’éloigner du texte religieux, ne donnant qu’une mince marge d’action aux initiatives réformatrices. Et c’est à ces dernières que le second courant s’accrochait. Pour les nombreuses représentantes des associations féministes, il ne pourrait y avoir d’avancées sans un bouleversement total des règles juridiques qui régissent la société marocaine. Au lendemain des attentats meurtriers du 16 mai à Casablanca, une attitude quasi consensuelle, assez générale par ailleurs, militait pour un changement certes, mais un changement en douceur et opéré par étapes. Il était clair que le Maroc se trouvait à la croisée de deux chemins, contraint à faire un choix, entre le modernisme et l’obscurantisme. C’est dans cette conjoncture que le discours royal au sein de l’Hémicycle est intervenu. Le Souverain, en sa qualité d’Amir Al Mouminine, a prôné dans ce sens.
«…L’Ijtihad qui fait que l’Islam (soit) applicable en tout temps et en tout lieu pour doter la famille d’une Moudawana moderne et qui soit compatible avec l’esprit de notre sainte religion », comme l’a souligné SM le Roi dans son discours du 10 octobre 2003. Ainsi, le nouveau code de la famille s’inspire «des desseins de l’Islam tolérant qui honore l’Homme et prône la justice, l’égalité et la cohabitation harmonieuse». L’essence même du rite malékite est toujours respectée, autant que les fondements d’une action réformatrice et moderniste. Amir Al Mouminine a donc procédé d’une manière globale pour que la réforme puisse bénéficier de la plus large et la plus pertinente participation possible des acteurs sociaux, sans pour autant céder aux postures extrêmes. Un consensus qui a été possible après l’intervention royale. Ce texte, approuvé par les députés le 16 janvier dernier, a plassé le Maroc en tête de liste des pays arabes et musulmans en matière d’égalité entre les deux sexes. Les puissances occidentales qui pointaient du doigt les flagrantes inégalités des droits entre l’homme et la femme dans le monde arabe, n’auront plus de raisons de le faire pour le Maroc. Les «bravos» ont fusé de partout. Les organisations et associations féministes se sont mises à parler de «modèle de démocratie». Cinq ans après son intronisation, SM le Roi Mohammed VI, dans un discours historique devant les représentants de la nation, émaillé de versets coraniques et de références à la Chariâ, mais profondément ancré dans une logique progressiste et moderniste, a mis fin à une longue hésitation quant à l’amélioration de la condition des femmes marocaines. Ce projet historique initié par le Souverain a rendu espoir aux femmes marocaines, étant donné que ces nouvelles réformes constituent un nouvel acquis qui met notre pays sur la bonne voie de l’édification d’une société marocaine moderne et harmonieuse. Les femmes, tant en milieu urbain que rural, quels que soient leur âge et leur niveau d’instruction, ont de ce fait accédé à un statut digne, leur permettant de défendre leurs droits légitimes face à toute forme d’injustice ou de violence, ce qui se ressentira assurément sur la cellule familiale tout entière.
En prenant position pour ces dernières, sans pour autant s’éloigner des préceptes de l’Islam, S.M le Roi Mohammed VI a su gérer une situation qui menaçait de se muer en crise. Une clairvoyance qui tranche avec un obscurantisme qui n’a pour visées que de réduire les efforts de modernisation et de développement de tout un pays.

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