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Métiers : Ces artisans d’intérieur à la pâte originale

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Le zellige est un produit spécifiquement artisanal de par la modestie de son origine et l’habileté dont il faut faire preuve pour le travailler. Les pièces, créées chacune avec amour, constituent un puzzle artistique des plus remarquables. Elles sont petites mais résument à elles seules toute la richesse de l’artisanat marocain. Ces pièces que l’on trouve partout dans les demeures marocaines, recouvrant le sol, sur les murs ou les colonnes, sur des fontaines ou sur les tables, témoignent également de la beauté de l’architecture marocaine. Le zellige est en effet la forme d’art le plus typiquement marocain et fait appel à la technique de la terre cuite émaillée. Il s’agit en fait de carreaux de terre cuite de 10×10 centimètres recouverts d’émail. Pour ce qui est de la matière première de ces merveilles multicolores, c’est de l’argile, entièrement travaillée à la main. Découpés, les carreaux subissent deux cuissons dans un four de briques où la température s’élève jusqu’à 900°C. La deuxième cuisson est destinée à fixer la couleur. Les maâlems zellayjia font leur possible pour préserver la palette de couleurs authentiques obtenues localement ; le vert est, par exemple, réalisé à partir d’un mélange de cuivre oxydé obtenu en brûlant des radiateurs de voiture usagés. Le « faytur », fabriqué à partir des noyaux et de la chair des olives, constitue le carburant traditionnellement utilisé pour la cuisson. Après ces deux cuissons successives qui participent au renforcement de la solidité du carreau, celui-ci est taillé à la main à l’aide d’un outil métallique finement aiguisé appelé « Menqach » et qui contraste avec la délicatesse des pièces obtenues. Le tailleur de zellige est assis, les bras en appui sur les genoux devant un socle sur lequel est disposée une tablette de métal ou de marbre. D’un mouvement continu et précis, il détache le fragment dessiné au préalable sur le carreau émaillé. Grâce à la plaque de métal ou de marbre, le zellige ne s’écrase pas et les cassures sont nettes. Les plus petits morceaux (frames) sont finalement taillés en biseau pour donner sur l’envers une plus grande surface de prise du mortier. La forme la plus courante est le carré dont les dimensions peuvent varier : 10 x 10 cm, 5 x 5 cm, 3 x 3 cm ou même 2 x 2 cm. D’autres formes sont possibles, mais l’épaisseur est toujours de 1,2 cm. En tout, 360 formes sont disponibles au Maroc.
Ces dernières années, un autre art a émergé pour rendre nos intérieurs beaucoup plus raffinés. Tadelakt, puisque c’est de cette technique qu’il s’agit, est ancestral, mais allié à de nouveaux matériaux, elle permet de réaliser des intérieurs contemporains. En arabe, Tadelakt veut dire caresser, masser. L’enduit est patiemment «caressé» avec un galet de pierre dure puis ensuite « massé » avec du savon noir. « Seule la chaux de la région de Marrakech procure les propriétés d’étanchéité et de profondeur à cet enduit très particulier », estime ce maâlem marrakchi, qui a pratiquement fait le tour du monde grâce à son art.
Cette chaux unique qui permet de réaliser le tadelakt est d’abord appliqué sur le support puis resserré au fur et à mesure de sa prise. Elle est ensuite longuement « polie » avec la pierre et le savon noir. Lorsque le savon noir est appliqué, une réaction chimique se produit, qui la rend hydrofuge. C’est l’enduit traditionnel des hammams et salles de bains des ryads. Son aspect doux et fin avec des ondulations dues au travail du galet, son étanchéité qui permet de l’utiliser jusqu’à en faire des baignoires et des lavabos lui confère des possibilités de décoration inégalées. La rusticité de fabrication de tadelakt, sa minéralité impure, ajoutées au processus d’application : ferrage au galet et pénétration du savon noir pendant la carbonatation de surface, concourent à lui donner une beauté, un toucher et une imperméabilité inégalable.
La force du zellige ainsi que le tadelakt est de s’adapter à des créations contemporaines sans céder à la modernisation de leur facture. Le génie des maâlems qui passent tout leur temps à créer ces décors ancestraux est d’user de l’intensité de ces matériaux en les adaptant à des concepts en matière de décoration pour embellir les intérieurs des demeures marocaines. Ces dernières peuvent prendre alors des allures de modernité confortable et agréable qui sied à un style de vie contemporain. Un style qui s’exporte très bien à l’étranger. Les différents motifs du zellige marocain ainsi que l’extrême beauté du tadelakt marrakchi ont très bien trouvé leur place dans les demeures les plus somptueuses à Paris, Londres, Washington ou à Dubaï. Comme quoi, la beauté n’a pas de nationalité.

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