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Mohamed Mbarki : «L’Oriental connaît un développement impressionnant»

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ALM : L’Agence de l’Oriental est opérationnelle depuis mai 2006. Quel bilan faites-vous de ses activités ?
Mohamed Mbarki : Nous avons une feuille de route qui est l’Initiative royale de développement de l’Oriental. Ce document fondateur, oriente, mais offre une grande liberté d’action. Notre Conseil d’administration présidé par le Premier ministre adopte nos programmes d’actions contribuant aux priorités stratégiques du développement économique et social de la Région, dans le respect de la cohérence des initiatives et de leur mise en synergie qu’induit l’Initiative royale, et selon ses priorités. Nous présentons également régulièrement nos réalisations et nos programmes d’intervention à notre Souverain, puisque Sa Majesté le Roi, que Dieu l’assiste, honore la Région de ses visites régulières – 20 visites depuis son accession au Trône  – ce qui nous offre la chance exceptionnelle  de lui soumettre notre action sur le terrain même où elle s’exerce. Dans de telles conditions nous vivons, on le comprendra, avec une certaine exaltation les missions confiées à l’Agence, et bien entendu notre bilan s’en ressent très positivement. La presse parle plus volontiers des grands programmes structurants, qui sont impressionnants, à la fois par leur visibilité, par le volume des investissements engagés, et par leur impact massif. Mais je voudrais aussi qu’on retienne dans notre bilan un impact tout aussi massif en nombre de personnes concernées : c’est celui de nos interventions de proximité. Les bénéficiaires ne font pas la une des journaux ; ils sont anonymes, c’est Madame ou Monsieur tout-le-monde comme on dit. Mais c’est le moyen unique et fort de pratiquer l’inclusion sociale, de mettre en œuvre l’INDH, d’associer chacun au développement économique et social en cours dans la Région et d’en partager les fruits avec tous. Nous allons au contact direct des habitants de la Région, comme par exemple avec la caravane Proximité & Dialogue créée en 2009 et qui sera reconduite, et même étendue en 2010. Nous nous appuyons sur la société civile à travers ses associations et ses coopératives rurales et nous les soutenons dès lors que leurs projets et leurs démarches vont dans le sens du développement. Notre soutien à la création des activités génératrices de revenus et d’emplois illustre bien cela. Ainsi nous subventionnons en quelque sorte le microcrédit grâce à une série d’instruments mis en place en coordination avec la Fondation Banque Populaire ; nous pouvons ajouter une somme au microcrédit, qui peut atteindre presque 60% du montant global accordé. Cette contribution est remboursable mais sans intérêts. Je voulais ici développer cette part de nos activités, car c’est un volet de notre bilan dont on parle peu alors qu’il est crucial. C’est une façon de vous dire aussi que notre bilan est multiforme. Je pourrais développer aussi nos démarches pour valoriser, enrichir les ressources immatérielles de la Région car elles sont décisives. Et bien d’autres aspects qui ne sont pas obligatoirement spectaculaires malgré leur impact ressenti sur place.

Quels sont les atouts essentiels qui vous permettent d’attirer des investisseurs aussi bien étrangers que nationaux ?
L’Agence intervient aux côtés d’autres acteurs, en parfaite coordination avec eux, en amont pour renforcer l’attractivité des territoires de l’Oriental, et en aval pour la promouvoir. L’Agence a participé très activement au pilotage, et même co-financé les études avec le ministre de tutelle, qui ont abouti à la définition de l’offre territoriale faite aux investisseurs industriels par exemple au sein des trois premiers sites d’accueil: la Technopole d’Oujda, le Parc Industriel de Selouane et l’Agropole de Berkane. Cet exemple illustre la volonté de l’Agence d’investir dans la définition, et la faisabilité des projets qui concourent au développement régional. Ce que j’appelle l’aval, c’est la valorisation des atouts qui font l’attractivité, et en premier lieu la compétitivité. A l’étranger, la Région doit d’abord se faire connaître en tant que telle, avec ses spécificités et le rappel des atouts qui sont communs à l’accueil des investissements dans tout le Royaume. Au plan national, il s’agit d’abord de faire mieux apprécier l’Oriental, c’est-à-dire de pratiquer une mise à niveau de l’image qui corresponde à la réalité d’aujourd’hui et à l’horizon que nous dessinons à travers les orientations de l’Initiative royale. Les grandes réalisations d’infrastructures sont décisives. Elles constituent des atouts essentiels, comme la voie ferrée qui relie désormais Nador au réseau ferroviaire national, les trois aéroports internationaux (Oujda, Nador et bientôt Bouarfa), les dessertes en télécommunications, l’autoroute jusqu’à Oujda d’ici quelques mois, et les voies rapides dédoublées, les hôpitaux, tous mis à niveau car la santé publique est aujourd’hui un facteur d’attractivité, tout comme la disponibilité des ressources humaines bien formées, etc. C’est un portrait nouveau, en rupture avec l’ancienne image de marque de la Région, que l’Agence met en avant auprès des investisseurs et nous savons que nombre d’acteurs viennent en chercher le détail et la confirmation dans  notre site www.oriental.ma, qui, au passage, est très visité. A l’étranger, nous répondons davantage à des attentes en termes d’avantages comparatifs et compétitifs. Nous valorisons le positionnement géostratégique de la Région, euro-méditerranéenne et maghrébine à la fois, le haut niveau des infrastructures et de l’offre de connectivité en particulier, qui est immédiatement ressenti depuis que l’offre de la RAM a été décuplée sur les vols intérieurs, Nador désormais inclus, et les dessertes internationales considérablement renforcées. Plus personne ne voit l’Oriental comme une Région enclavée, tout au contraire, et nous valorisons cela.

L’Oriental connaît aussi des handicaps. Quelles sont vos actions pour donner à cette Région la place qu’elle mérite?
Les handicaps sont de deux genres. Il y a d’abord un handicap né du disfonctionnement de ce que l’on peut appeler l’économie frontalière. Ceci a donné naissance à diverses activités informelles. Puis il y a un autre handicap qui est celui de l’image. L’Oriental a vécu pendant une longue période avec l’image d’une Région frontalière vouée à la contrebande et aux activités informelles, mais aussi l’image d’une Région lointaine, difficile d’accès, qui était en attente d’une solution maghrébine. Pour lutter contre ces deux handicaps, l’Agence a mis en place une politique de marketing territorial très professionnel. Une communication très ciblée afin de faire connaître la Région dans sa réalité, c’est-à-dire son potentiel, son rôle dans l’histoire et ses promesses d’avenir. L’Agence participe à travers sa stratégie de marketing territorial à l’ensemble de cette action de revalorisation d’image. Nous sommes présents dans tous les forums et dans toutes les réunions où cet enjeu se joue. Cette action pour la revalorisation de la Région doit passer également par la mobilisation des acteurs. Pour se développer, une Région a besoin de générer de la confiance. Cette confiance doit impliquer également ses propres habitants. Il faut que les acteurs soit mis en confiance et soient fiers de leur Région.

Comment sont structurés le Plan Maroc Vert et le Plan Halieutis dans la région de l’Oriental ?
La Région de l’Oriental est une région agricole. Et en tant que telle, elle a un intérêt particulier pour le Plan Maroc Vert auquel elle a participé depuis l’origine. Dans la Région de l’Oriental, il y a tous les types d’agriculture. L’agriculture destinée à l’export par l’intermédiaire des zones irriguées à Berkane et à Nador. Elle a également un secteur d’élevage très important. L’agriculture en terres non irriguées est essentielle aussi dans la Région, notamment les produits du terroir (les plantes médicinales, aromatiques, les truffes, les nèfles, l’agriculture oasienne, les dattes..). En ce qui concerne le Plan Halieutis, la Région de l’Oriental est traditionnellement une Région de pêche artisanale, qui vit les répercussions de la diminution des produits de pêche en Méditerranée en général, et dans cette partie de la Méditerranée en particulier. Ce n’est pas une Région de pêche importante comme le sont les autres Régions concernées par le Plan Halieutis. L’Oriental n’a pas encore élaboré la régionalisation du Plan Halieutis tel qu’il est envisagé au niveau national, mais elle en a toutes les potentialités tant sur le plan de la pêche artisanale qu’en matière d’aquaculture.

La région connaît une forte dynamique pour l’infrastructure et les zones industrielles. Quels sont les chantiers de la région dans ces deux secteurs?
Comme je l’ai déjà souligné, il s’agit d’infrastructures routières, aéroportuaires, ferroviaires, sanitaires, celles relatives à l’eau, l’électricité et  la formation des ressources humaines. Ce sont des infrastructures techniques, lourdes mais basiques. Pour ce qui est des zones industrielles, le Plan de développement industriel de la Région de l’Oriental a conclu à la réalisation de trois zones industrielles. Une première dans la province de Nador (Selouane), en cours de réalisation. Elle comportera un parc industriel, incluant un incubateur d’entreprises pour les jeunes entrepreneurs, réalisé en partenariat avec la Chambre de commerce et le ministère de l’Industrie. Une deuxième zone industrielle sera réalisée dans la Province de Berkane. Il s’agit de l’Agropole. C’est le deuxième au Maroc après celui de Meknès. Ce projet a été présenté à Sa Majesté le Roi, que Dieu l’assiste. Il est aujourd’hui en cours de finalisation. La troisième zone est la Technopole d’Oujda, qui va comporter entre autres une Université technologique, des showrooms d’exposition et un parc industriel dédié aux industries propres et à la production d’éléments liés aux énergies renouvelables. Pour les projets futurs, ils tournent autour de l’indentification de nouveaux secteurs dans des domaines où la Région n’a pas l’habitude d’être citée, l’aéronautique notamment.

Quelle est la place du tourisme et des services?
Dans l’Oriental, le tourisme est un secteur nouveau. La Région l’a découvert grâce à ses potentialités naturelles. Et c’est ainsi qu’est née Mediterrania Saïdia, la première station du Plan Azur. Elle est aujourd’hui fonctionnelle avec tous les problèmes qui sont ceux des réalisations pionnières. Cette station va vivre le problème des stations méditerranéennes, c’est-à-dire une forte saisonnalité. Cette année, nous ferons en sorte que la période de fonctionnement de la station Mediterrania Saïdia s’élargisse. Il y a tout un travail en cours par  les gestionnaires du projet l’aménageur en premier lieu, en partenariat avec  le ministère du Tourisme, la wilaya de l’Oriental, le CRI… avec la mise en place d’un comité d’animation et de règlement des questions en suspens de manière à ce que la station puisse arriver à un fonctionnement optimal. Il y a aussi de nouveaux projets, principalement Marchica Med à Nador. Un projet très ambitieux et novateur. C’est le projet de développement d’une zone touristique autour de la lagune de Marchica qui est l’une des plus importantes lagunes de la Méditerranée. Enfin, nous développons un tourisme dit «de niche» qui concerne les gens qui ont l’envie de découvrir l’Oriental profond. Je suis très optimiste à ce niveau là.

Comment se développe le secteur de l’immobilier dans la région ?
Le secteur de l’immobilier se développe avec une forte croissance. La preuve en est l’évolution d’Al Omrane et des promoteurs privés dans la Région de l’Oriental. L’immobilier est un secteur qui concerne l’économique, le moyen et haut standing et aussi tout ce qui est résidences touristiques, etc. Il a permis le développement d’un secteur privé très dynamique. Conséquence : on ne trouve plus aujourd’hui de main-d’œuvre locale ! L’essentiel de la main-d’œuvre vient des autres Régions du Maroc.
   
Comment l’Agence de l’Oriental compte-t-elle participer à l’élaboration de la Charte nationale de l’environnement et du développement durable ?
Par tous les moyens qu’elle pourra mobiliser. La Charte de l’environnement est d’abord un objectif noble, universel, à l’honneur de notre pays. C’est également une stratégie d’action. Pour insuffler plus de compétitivité à la Région, nous sommes en train de mener une action dynamique et générale sur la dépollution de zones côtières, notamment Nador, Mais qui concerne l’ensemble du littoral de l’Oriental. L’Agence dispose d’une convention avec la Fondation Mohammed VI. Elle a un partenariat avec les différentes autorités gouvernementales, tant au niveau de la lutte contre la désertification et la protection des espèces qu’au niveau du traitement de la régulation de tous les dysfonctionnements dus au changement climatique rapide : le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts, les Agences de bassins, le secrétariat d’Etat chargé de l’Eau. L’Agence est très impliquée aussi bien dans l’élaboration des stratégies que dans l’action et l’intervention sur des projets concrets, notamment au nouveau traitement des déchets solides. Enfin, elle appuie les projets futurs de développement des énergies renouvelables, et participe avec le C.D.E.R au développement des campagnes sur l’efficacité énergétique.

De quelle manière l’ouverture des frontières avec l’Algérie peut-elle promouvoir l’émergence économique de cette région ?
Je considère que la fermeture de la frontière terrestre entre le Maroc et l’Algérie est affligeante au 21ème siècle. C’est un anachronisme qui ne peut avoir aucune justification. Elle pénalise les deux économies et encore plus gravement les deux régions frontalières de part et d’autre. En plus, la fermeture des frontières favorise toutes les activités informelles et toutes les perversions qui les accompagnent. Elle constitue un terreau pour le développement de l’immigration clandestine, du trafic de drogue… et les activités terroristes recherchent ce type de situation pour favoriser les réseaux mafieux. La fermeture des frontières est une situation extrêmement douloureuse surtout pour les familles. C’est aussi un grand problème humain. L’ouverture de la frontière fera émerger l’économie de la Région et développera aussi l’économie régionale de l’autre côté de la frontière, chez nos voisins. C’est un acte de civilisation, en conformité avec les impératifs du monde d’aujourd’hui.

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