L’ancien Premier ministre français Michel Rocard accuse le Premier ministre israélien Ariel Sharon de «produire de l’anti-israélisme dans le monde entier» dans une longue lettre ouverte à Sharon publiée lundi dans le journal français «Le figaro».
«Vous êtes en train, monsieur le premier ministre, de produire de l’anti-israélisme dans le monde entier, et les gens de ma sorte, qui combattent l’antisémitisme depuis leur plus jeune âge, sont impuissants à endiguer le torrent de colère et de haine auquel vous avez ouvert les vannes», écrit M. Rocard. «Vous faites une guerre que vous ne pouvez pas gagner», poursuit l’ancien premier ministre français. «Chaque action de Tsahal crée une dizaine de nouveaux terroristes (….) or les palestiniens sont deux millions. (….) combien vous faudra-t-il en tuer? plusieurs centaines de mille? un demi-million?» demande-t-il. M.Rocard a suggéré au premier ministre israélien que la communauté internationale ne le permettra pas.
S’adressant «au chef des gouvernants d’Israël» et non à Sharon «personnellement», M. Rocard ajoute : «vous avez choisi la force, vous auriez pu ne pas le faire. Mais cela a un prix. (….). Le premier élément à payer, le plus immédiat, est la destruction complète, c’est acquis maintenant, de tout espoir». L’ancien premier ministre socialiste reproche à Sharon de ne pas avoir tiré les leçons des guerres perdues par «les dominants» comme la France en Indochine et en Algérie, les Etats-unis au Vietnam et l’Union soviétique en Afghanistan, qui avaient longtemps refusé de négocier avec leurs adversaires.
«Où avez-vous vu dans l’histoire qu’un chef de guerre puisse choisir son adversaire?» demande encore M. Rocard en accusant Sharon, à défaut de vouloir tuer le président de l’autorité palestinienne Yasser Arafat, « en tout cas, vous vous employez à le paralyser, à l’humilier et à essayer de l’exiler».
«La démesure de vos calculs sur l’emploi de la force a de quoi inquiéter une humanité qui a besoin de vivre en paix», conclut M. Rocard qui dit comprendre les «motivations» de Sharon concernant la sécurité d’Israël mais qu’il questionne simplement sur «les choix stratégiques» du premier ministre israélien pour y parvenir.