Le secrétaire d’Etat américain Colin Powell a entamé lundi au Maroc une délicate mission diplomatique, qui doit le conduire en Europe et au Proche-Orient, pour tenter de mettre un terme à l’escalade de la violence dans les territoires palestiniens et en Israël. Powell devait s’entretenir à Agadir, avec S.M.le Roi Mohammed VI, avant de se rendre à Casablanca pour rencontrer le Prince héritier saoudien, Abdallah Ben Abdel Aziz, en visite privée dans le Royaume. La tâche promet d’être fort difficile, d’autant que les deux interlocuteurs de Powell viennent de réitérer, au cours de conversations téléphoniques dimanche avec le président de l’autorité palestinienne Yasser Arafat, leur soutien sans faille à la cause palestinienne.
Le Maroc a par ailleurs été, dimanche, le théâtre d’une manifestation pro-palestinienne géante qui a réuni d’un millions de personnes dans les rues de la capitale. Powell s’est lui-même montré très prudent sur les résultats escomptés de sa tournée. « Je ne reviendrai pas de ma mission avec un traité de paix en mains (…), je ne suis même pas sûr d’obtenir un cessez-le-feu », avait-il déclaré avant son départ de Washington. Le Premier ministre israélien Ariel Sharon ne lui a pas facilité la tâche en annonçant, lundi, que l’offensive en cours de l’armée israélienne dans les territoires palestiniens se poursuivrait « jusqu’au terme de sa mission ». Il brave ainsi ouvertement les appels répétés de la communauté internationale, et du président George Bush, pour un retrait immédiat des territoires palestiniens.
Les palestiniens ont réagi très vivement à ces propos, le chef négociateur Saëb Erakat y voyant « le discours le plus désastreux (qu’il ait) entendu ». Il a aussi jugé que l’établissement de zones de sécurité en Cisjoordanie signifiait « la fin du processus de paix, la fin des accords d’oslo et la fin de l’autorité palestinienne ».
Le secrétaire général des nations Unies, Kofi Annan, a de son côté « imploré » Israël de répondre à l’appel au retrait des territoires palestiniens lancé par Bush. « Le monde entier, y compris ses amis et alliés, demande à Sharon de retirer ses troupes », a dit Annan en marge de la deuxième assemblée de l’ONU sur le vieillissement qui se tient à Madrid.
Un communiqué diffusé lundi par l’agence MAP, avant même le début des entretiens de Powell avec S.M. le Roi Mohammed VI, a souligné la fermeté de la position officielle marocaine. Le Roi du Maroc, qui préside le comité Al Qods (Jérusalem) issu de l’organisation de la conférence islamique (OCI), « a réitéré le soutien total et inconditionnel du Maroc, Roi, gouvernement et peuple, au peuple palestinien et à sa direction combattante dans l’épreuve qu’ils endurent », a rapporté l’agence officielle.
Le Prince héritier saoudien Abdallah Ben Abdel Aziz, qui doit s’entretenir avec le chef de la diplomatie américaine en fin de journée lundi à Casablanca, a présenté un plan de paix pour le Proche-Orient, qui a été adopté lors du Sommet arabe tenu les 27 et 28 mars à Beyrouth. Après des réticences, Washington a apporté son soutien à ce plan, qui propose une normalisation israélo-arabe en échange notamment d’un retrait d’Israël sur ses frontières de 1967.
Le Maroc, l’un des alliés traditionnels des Etats-Unis dans le monde arabe, soutient aussi ce plan. à l’issue de l’étape marocaine, Powell se rendra au Caire où il rencontrera le président égyptien Hosni Moubarak. Puis il ira à Madrid où il s’entretiendra avec son homologue russe Igor Ivanov, avec Annan et avec des responsables européens, dont le haut représentant de l’union européenne pour la politique extérieure, Javier Solana.
Au cours de ces rencontres, le secrétaire d’Etat américain compte obtenir un soutien international, notamment de la part des alliés arabes des Etats-Unis, avant l’étape cruciale de Jérusalem dont le programme n’est pas connu officiellement.
• Dominique Pettit (AFP)