Le désaccord qui a éclaté au grand jour entre le premier ministre tony Blair et le président George W. Bush au sujet du dirigeant palestinien Yasser Arafat illustre les limites de l’influence de londres sur son « grand frère » américain.
« Désaccord avec les Etats-Unis sur un départ d’Arafat », titrait mercredi le Daily Telegraph, « Blair en désaccord avec Bush sur Israël », résumait l’independent, « le premier ministre refuse d’apporter son soutien à l’appel des Etats-Unis au remplacement d’Arafat », affirmait le Times, tandis que pour le Daily Mirror, « le caniche (Tony Blair) riposte et mord ». Visiblement déçu par l’appel de George Bush au départ de Yasser Arafat, Tony Blair avait tenu la veille à marquer sa différence. « Nous avons toujours dit qu’il revient au peuple palestinien de choisir son dirigeant », avait dit son porte-parole.
Le ministre britannique des Affaires étrangères Jack Straw était allé plus loin aux communes en prévenant que londres « traiterait avec le président Arafat s’il était réélu par l’autorité palestinienne ». Dans l’avion l’amenant à Kananaskis (ouest du Canada) pour participer au sommet du G8, M. Blair, qui devait y rencontrer M. Bush en tête à tête, a tenté de minimiser leur désaccord.
« Ma propre opinion sur les défauts du président Arafat est très claire », a-t-il déclaré. « Ce qu’ils (les américains) sont en train de dire est que nous ne pouvons jouer pleinement notre rôle (au Proche-Orient) que si tout le monde est su la politique intérieure et Israël, a-t-il expliqué. Le reste du monde n’a pas vraiment son mot à dire ».
Dans ce contexte, « les Britanniques sont en train de se démarquer assez clairement de la politique américaine, reconnaît-il. Mais ils le font de façon non conflictuelle? ils ne veulent pas d’une brouille avec Washington à ce sujet ». « Il y a une profonde frustration » au sein du gouvernement britannique, affirme pour sa part William Wallace, spécialiste des relations transatlantiques à la London School of Economics.
« Premièrement, parce que les américains ne sont pas prêts à tirer les leçons de l’expérience britannique en Irlande du Nord où (Londres) a eu affaire à deux communautés hostiles, a-t-il souligné. Et deuxièmement, parce que la politique étrangère américaine a été prise en otage par des lobbies et se montre incapable d’avoir une approche équilibrée sur le Proche-Orient ».
Pour Eugene Rogan, la suite des événements devrait pourtant donner raison au plus proche allié des Etats-Unis et, de façon plus générale, aux Européens. « Si des élections ont finalement lieu en Palestine, une réélection d’Arafat ne fait pas de doute, a-t-il estimé. Les américains devront alors changer de position ».
• Indalecio Alvarez (AFP)