Dans sa dernière missive portée par son postier favori, Al-Jazeera, il développe, à travers cette équation, l’esprit de la loi du talion : Œil pour œil, dent pour dent. Ben Laden est un vrai Sphinx. Il ne cesse de renaître de ses cendres. Il a fini par donner un sens moderne à la notion christique de résurrection. Il est donné mort un jour pour renaître aussitôt le lendemain dans le tourbillon d’une salle de rédaction. Cette communication diabolique et efficace nargue pour mieux user les nerfs de l’ennemi. Depuis bientôt dix ans, Ben Laden est planté comme un totem dans notre imaginaire. Par télévision interposée, il fait montre d’une vraie ubiquité. En bon manager d’un consortium de la terreur, il a fini par imposer son nom comme une marque déposée. Une franchise. Il en est devenu le général d’une armée de l’ombre où l’allégeance est aveugle. Le problème, c’est qu’il a aujourd’hui une succursale au Maghreb. La menace est donc à nos portes, nous autres Marocains. En habile tacticien, Ben Laden a compris que les territoires occidentaux sont de plus en plus sanctuarisés. Après avoir provoqué la terreur au cœur de New York, Londres ou Madrid, il réalise bien que la France, par exemple, est un territoire sous haute surveillance puisque aucun attentat ne s’y produit depuis 1995. Les œuvres sanglantes de Kelkal n’avaient, à l’époque, aucun lien avec la nébuleuse d’Al Qaïda. Donc, pour pouvoir continuer à défier cette France engagée en Afghanistan et dont le Parlement a voté la loi sur la burqa, Ben Laden a choisi de se déployer sur des terrains plus perméables. Le kidnapping des journalistes français en Afghanistan, l’assassinat de l’humanitaire Michel Germaneau, le rapt du personnel d’Areva sont tout autant d’actions qui s’inscrivent dans la nouvelle doctrine d’Al Qaïda. Le terrorisme se joue mieux à domicile. Chez les musulmans. Les citoyens d’un pays qui est dans le collimateur du consortium terroriste ne seront plus en paix ni dans les montagnes afghanes, ni dans les ruelles de Karachi et encore moins dans la vacuité du désert du Sahel. Nous avons donc une annexe du terrorisme à nos pieds, désormais célèbre avec l’acronyme AQMI. De fait, le conflit sur le Sahara marocain ne peut plus être considéré comme une simple affaire régionale. Puisque la lutte contre le terrorisme est une question planétaire qui concerne tout un chacun, la meilleure façon de lutter efficacement contre le terrorisme au Sahel rend impérieux la résolution du problème entre le Maroc et l’Algérie sur la question de nos provinces du Sud.