France : Michelle Alliot-Marie, une discrétion institutionnelle

Personne ne s’attendait en réalité à ce que Michelle Alliot-Marie se jette, après sa nomination au poste à la fois exposé et convoité de ministre des Affaires étrangères, dans les médias pour annoncer de grands bouleversements dans la diplomatie française. Mais personne non plus ne s’attendait à ce qu’on passe aussi brusquement d’une diplomatie et de l’affichage des ego telle qu’elle avait été pratiquée goulûment par Bernard Kouchner à une diplomatie de fouine apeurée telle qu’elle se profile avec MAM. Une des illustrations les plus parlantes de la nouvelle donne au Quai d’Orsay est l’épisode qui est arrivé récemment avec Georges Mitchell, l’envoyé spécial de Barack Obama au Proche-Orient. De passage à Paris après une escale à Bruxelles et une tournée au PO, il était là pour rencontrer Michelle Alliot-Marie, l’informer des derniers développements du dossier de la paix dans cette région. Et là où son prédécesseur Bernard Kouchner aurait convoqué caméras et micros pour faire la jolie pause d’un vieux beau à la coquetterie résistante, Michelle Alliot-Marie se contenta de rencontrer Georges Mitchell dans une totale discrétion. Et même quand récemment elle avait reçu au siège de son ministère son homologue marocain Taïeb Fassi Fihri venu parler avec elle de l’inquiétante situation qui prévaut au Maghreb suite à la jonction qui semble se faire entre les milices armées du Polisario soutenu par l’Algérie et les brigades de l’Aqmi, la rencontre aurait presque passé inaperçue s’il n’y avait pas les moyens de la télévision marocaine pour l’éclairer. La facilité qui réconforte est de dire que cette attitude est le fruit d’une impuissance de son service de communication, sans doute écrasé par les sévères coupes budgétaires qui l’ont entaillé au risque de passer par pertes et profit de nombreuses occasions censées rehausser le prestige et la lisibilité du projet diplomatique français. Mais la réalité est que Michelle Alliot-Marie a choisi un style d’être et une manière de faire. Ce choix est sans doute la conséquence de deux péchés originels. Le premier touche à la genèse même de sa nomination. Avec le recul, il est devenu de notoriété publique que Michelle Alliot-Marie n’a jamais formulé un acte de candidature et de désir pour ce poste de ministre des Affaires étrangères. Sa nomination s’est avérée être le fruit d’un jeu de chaises musicales plus proche du monopoly politique que d’une stratégie et un casting mûrement réfléchi. Et voilà que MAM faute de mieux, se retrouve à consoler sa frustration de ne pas avoir eu le poste de François Fillon à Matignon, comme la rumeur à un moment l’a évoqué. Le second facteur qui pourrait expliquer cette retenue excessive est sa volonté de rompre avec le style de Bernard Kouchner qui avait tout investi dans la com’ et la posture. D’autant que Michelle Alliot-Marie sait mieux que quiconque, pour avoir fréquenté de près Nicolas Sarkozy, que le segment diplomatique français est totalement pris en charge par l’Elysée et que cette situation n’est pas prête de changer. Il est moins dangereux politiquement pour Michelle Alliot-Marie de communiquer dans les pages de Paris Match sur son prochain mariage en 2011 avec son compagnon, Patrick Ollier ministre chargé des Relations avec le Parlement que de proposer une idée d’action diplomatique qui sortirait de l’orthodoxie élyséenne.