Même aux plus délurés des observateurs, la nouvelle donne ne leur a pas échappé. Dominique de Villepin l’enfant terrible de la droite, l’ennemi intime de Nicolas Sarkozy est en train de changer de posture, d’arrondir son verbe à l’encontre du président de la République. L’homme qui disait il y a encore quelques courtes semaines, avec le fracas que l’on sait, que Nicolas Sarkozy est un problème pour la France, est en train de se métamorphoser sous le regard souvent incrédule de l’opinion.
Cela s’est sans aucun doute beaucoup vu ces derniers temps car Dominique de Villepin est en train de nourrir à sa manière une omniprésence dans les médias. Il a récemment participé à de nombreuses émissions de télévision parmi les plus visibles et les plus cotées. Et là où la logique militante, pour ne pas dire revancharde de Dominique de Villepin, voudrait qu’il poursuive son pilonnage de la gouvernance de Nicolas Sarkozy, il semble avoir levé le pied jusqu’à soutenir bruyamment le feu vert donné par la présidence de la République à l’opération militaire destinée à sauver les deux jeunes otages français exécutés au Niger quand une partie de l’opposition demande à examiner la pertinence politique et militaire d’une telle décision. Il y a donc forcément un processus de réconciliation entre les deux hommes qui est à l’œuvre et dont Jean-François Copé, le patron de l’UMP, revendique la paternité. Les deux hommes, Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy, auront dans les jours qui viennent l’occasion d’en vérifier l’ampleur puisque une rencontre entre eux est programmée à l’Elysée.
Il est vrai que pour ne pas trop déstabiliser son premier cercle, notamment celui qu’il avait mobilisé pour piétiner avec une rare férocité Dominique de Villepin, Nicolas Sarkozy a tenu à faire savoir que cet entretien inédit entre dans la série de rencontres qu’il s’était programmées avec les anciens Premiers ministres pour les consulter sur l’agenda de la présidence française du G20. Mais personne n’est dupe que cette rencontre est censée casser la relation glaciale entre les deux hommes et lancer le processus de réconciliation et de rapprochement. De son côté, Dominique de Villepin jure qu’il ne parlerait avec le président de la République lors de ce tête-à-tête que des enjeux internationaux de la présidence française du G20 et qu’il éviterait d’éviter d’évoquer toutes les questions de politique intérieure. Mais là aussi, le nez en bois a tendance à s’allonger. Le secret d’un tel virage de Nicolas Sarkozy, lui qui avait rêvé à haute voix de pendre Dominique de Villepin sur un croc de boucher, est à trouver dans sa préparation active de sa candidature de 2012 et son obligation de dégoupiller les écueils domestiques dont un gros champignon est formé par l’insurrection et la capacité de nuisance de Dominique de Villepin et de ses fidèles. Sans doute à contrecœur, Nicolas Sarkozy se doit de stabiliser sa famille politique avant de pouvoir prétendre élargir l’éventail de sa séduction à d’autres groupes de la droite, comme les multiples Centres (Hervé Morin, Jean-Louis Borloo ou François Bayrou) qui menacent tous de prendre le maquis. Nicolas Sarkozy sait que par les temps qui courent à accrocher l’allégeance d’un homme comme Dominique de Villepin à son tableau de chasse, désarmer son hostilité et assurer son retour au bercail est un cadeau électoral d’une inestimable qualité.