Culture

A la une : Bonne fête quand même

Ce 13 mai coïncide avec la Journée nationale de théâtre. L’ambiance se prête donc à la fête. L’occasion pour les gens de théâtre, professionnels et amateurs compris, d’échanger les meilleurs vœux, que sais-je, des faire-part, des bouquets de fleurs, et tout. D’autres, admirateurs, se joindront à ce bel élan pour souhaiter « bonne fête » aux gens de scène. Ces derniers n’auraient pas démérité un geste pareil, si simple soit-il.
Mais au-delà des protocoles de rigueur, des laïus officiels aussi sur la place qu’occupe le théâtre dans la politique du Département de la Culture, des envolées lyriques et autres baratins sur « le plus beau métier du monde», que peut-on alors fêter ?
A cette question, les professionnels de la scène répondent par une batterie de reproches. En ligne de mire, l’absence supposée d’une politique théâtrale. En effet, la lettre du défunt Roi Hassan II intimant aux (défuntes) communes locales l’instruction de consacrer 1% de leurs budgets est restée lettre morte. Hassan Nafali, président du Syndicat national des professionnels de théâtre, y voit la principale cause de la crise. Saâdia Ladib, comédienne, est plus explicite. Elle s’interroge, la mort dans l’âme, sur l’état piteux des salles de spectacle. «Les élus ne font rien pour investir dans l’infrastructure théâtrale », proteste-t-elle. « Ce que l’on présente comme salles de spectacle ne peuvent même pas servir de salles de conférences, sachant que la plupart de ces salles pèchent par des défauts architecturaux », martèle-t-elle. Ce qui a été à l’origine de plusieurs incidents de scène, Latéfa Ahrrare, qui s’est cogné il y a quelque temps le pied contre une poutre à la salle Bahnini à Rabat, en a payé les frais. A défaut de couverture sociale, elle a dû débourser de sa propre poche pour s’acquitter des frais d’hospitalisation.
Le manque d’équipements, pour ne pas dire d’entretien (entretenir quoi ?), en rajoute au calvaire des gens de scène.
« Idéaliste », Driss Rokh, comédien-metteur en scène, irait jusqu’à réclamer la création d’une académie de théâtre. « Dans cinquante ans », dirait un autre, réaliste.
Autre son de cloche. Pour Nora Skalli, comédienne, la crise ne doit pas être réduite à sa stricte expression politique. Les gens de théâtre aussi sont comptables de la débâcle présumée du théâtre marocain. Ces gens-là, en tout cas la plupart d’entre eux, sont appelés à balayer devant leur jardin. Selon l’artiste, la crise, si crise il y a, est d’ordre imaginatif.
En créant le Fonds d’aide au théâtre, le ministère de la Culture se serait acquitté de l’obligation de moyens, c’est maintenant au tour des gens de scène d’honorer l’obligation de résultat. « La balle est dans notre camp », reconnaît Zoubir Ben Bouchta, auteur dramatique. « L’aide au théâtre ne doit pas être conçue comme une forme d’assistance sociale, elle doit avant et après tout profiter au théâtre. Or, après la création du Fonds, il s’est avéré que les troupes étaient moins préoccupées par le théâtre que par les sous qu’il rapporte », dénonce-t-il. Nora Skalli relève à ce propos un cas gravissime. « Nous avons maintenant plus de troupes qu’il n’en faut, la création de troupes est devenue une mode. Et cette logorrhée répond moins à un besoin qu’à un objectif inavoué de bénéficier des subventions de l’Etat », dévoile-t-elle.
Bonne fête, quand même…

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