C’est peut-être Josep Maria Carbonell, l’actuel président du RIRM, et président du Conseil de l’audovisuel de Catalunya, qui a donné l’image la plus expressive en comparant l’ambition et la mission de régulation des contenus des médias audiovisuels à celle, hypothétique, de qui voudrait réguler les performances des animateurs de la célèbre place populaire de Jamaa El Fna, à Marrakech.
A la place Jamaa El Fna, «à la tombée du jour, on peut retrouver les conteurs d’histoires. Même si on ne connaît pas l’arabe ou l’amazigh, c’est un spectacle fascinant qui fait partie, en outre, du patrimoine immémorial de l’Humanité. Autour de cette table nous voilà, maintenant -Carbonell s’exprimait à l’ouverture de la 9 ème réunion du RIRM à Marrakech- les régulateurs des conteurs d’histoires de nos pays».
«En effet, a expliqué le président catalan, sur nos écrans, sur nos postes radio, ce sont des conteurs d’histoires qui arrivent, chaque jour, dans nos salons. Comme à Jamaa El Fna, on voit sur nos écrans des groupes de musique, des saltimbanques…et, aussi, des charmeurs de serpents. Mais, à la différence de la place marocaine, on voit et on entend, aussi, bien trop souvent, des mensonges, des fausses vérités, des débats qui nourrissent le discours de la haine. Nous en souffrons, trop souvent, les conséquences sont pénibles. Et voila notre responsabilité en tant que régulateurs…».
Et voila aussi une belle image pour décrire la délicatesse de la tâche des instances de régulation des contenus audiovisuels !
Les responsables des quinze institutions de régulation méditerranéennes, représentant une douzaine de pays de la région, très majoritairement de la rive nord, réunis pour la 9 ème édition des réunions annuelles du RIRM, ont tous illustré cette délicatesse et ce dilemme, chacun à sa manière et selon l’état du secteur chez les uns et les autres, mais tous en butte, au quotidien, avec les problématiques de la régulation de ce qui est, au regard de la liberté des médias audiovisuels, dans les logiques de la libéralisation du secteur, très réfractaire aux entraves et à ce qui peut être assimilé à un bridage de liberté.
Les grandes lignes du programme de la réunion de Marrakech renvoient à quelques unes de ces problématiques les plus sensibles : éthique et protection du jeune public, pluralisme politique sur les médias audiovisuels, régulation des contenus audiovisuels satellitaires, convergences technologiques et régulation…etc. Quelques beaux casse-tête pour des instances dont le rôle est loin d’être purement intellectuel ou consultatif.
Ce sont bel et bien les gendarmes et les arbitres des secteurs audiovisuels de leurs pays respectifs, qui veillent sur le respect des règles du jeu quand ils ne sont pas également à l’origine de l’édiction même de ces règles.
En tout cas, pour notre instance à nous, – relativement jeune eu égard à ses quatre ans d’exercice effectif -, la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA), organisatrice de la réunion de Marrakech et future présidente du Réseau pour 2007-2008, c’est d’abord le grand séminaire d’échanges d’expériences, de confrontation de son bilan – somme toute honorable à maints égards – sur ces différentes questions en débat, d’affirmation de son positionnement parmi un panel d’instances dont l’existence même signifie un stade évolué de la gouvernance démocratique du champ audiovisuel.
Mais, côté rive sud de la Méditerranée, notre HACA fait figure d’une exception. Un déséquilibre que le président Ahmed Ghazali rêve de combler en invitant divers organismes en charge du secteur audiovisuel dans les pays du Sud (Liban, Tunisie, Egypte, Autorité palestinienne, notamment), à Marrakech en tant qu’observateurs, dans l’attente de la réunion des conditions objectives dans ces pays pour devenir membres du réseau à part entière. La Jordanie a d’ores et déjà franchi le pas. Son instance de régulation a postulé pour adhérer au RIRM et la réunion de Marrakech devrait valider cette candidature à l’occasion de son actuelle session. En attendant de nouvelles recrues…














