Je vous préviens d’emblée que ce billet risque d’aller dans tous les sens. Il faut dire que moi-même, en ce moment et même bien avant, je ne sais plus tout à fait où j’en suis.
La droite, la gauche, le centre gauche, le centre droit, l’extrême droite, l’extrême gauche, tout ça n’a plus beaucoup de sens pour moi, et j’ai même l’impression que c’est un peu le cas pour tout le monde.
Enfin quand je dis tout le monde, je voudrais dire tout le monde ici, chez nous, dans ce plat pays monocolore qui est devenu le nôtre. Je crois qu’on ne distingue plus que deux choses: le haut et le bas. Je veux dire par cela : ceux et celles qui caracolent constamment vers le haut, et celles et ceux qui dégringolent tout le temps vers le bas. Les bienheureux célèbres Marocains d’en haut et les malheureux fameux Marocains d’en bas. Ceux qui sont à droite et ceux qui étaient à gauche, je ne connais pas.
Plutôt, je ne les reconnais plus. C’est vrai, on nous a toujours dit qu’au Maroc, il n’y a jamais eu véritablement une droite au sens philosophique et idéologique du terme, c’est-à-dire des gens qui ont une vision politique et économique qu’on appelle libérale, mais qui est surtout capitaliste, et qui assument leur libéralisme et surtout leur capitalisme, sans rougir. Justement, parlons des rouges.
Je vais commencer par eux, parce que si j’en crois nos historiens, le Parti Communiste Marocain, PCM pour les adeptes, est le premier parti de gauche qui a vu le jour dans notre pays. On nous raconte, et c’est sûrement vrai, que ce parti a subi les pires répressions, malgré le soutien moral, et nous dit-on, financier, de Moscou, la mère de tous les cocos. Au fil des années, ce parti, d’abord interdit car subversif, puis banni, puis toléré, puis approché, a évolué gentiment pour devenir un parti crédible, reconnu, légal et même, aujourd’hui, gouvernemental. Pardon, j’ai oublié : et toujours de gauche… nous dit-on.
Passons maintenant aux roses, nos frères socialistes. Eux, c’est encore plus compliqué. Ils ne prétendaient pas être de gauche, ILS SONT LA GAUCHE. C’était toujours ça ou rien. C’était à prendre ou à … les laisser tranquilles. Et si on n’était pas d’accord, «la terre du Bon Dieu est grande», comme disait l’autre. Et, bien sûr, il y a les autres, les vrais, les meilleurs. Les «gauchistes» comme les désignaient péjorativement leurs ennemis du clan de la gauche «normale».
Que sont-ils devenus ceux-là ? Et bien, rassurez-vous, ils sont toujours là. Oh non, pas tous. Chez eux aussi, au fil du temps, il y a eu des fugues, des défections, des fuites, mais aussi, disons-le, des trahisons. Certains d’entre eux sont passés du côté de la rose, mais il y a encore quelques-uns et quelques-unes qui sont toujours là, accroché(e) s aux lilas, et qui résistent avec des idées souvent généreuses mais parfois franchement poussiéreuses. Exit la gauche au Maroc ? Sincèrement, je ne saurais vous répondre.
Mais, ce que je pourrais vous dire, c’est que la gauche qui était du côté de toutes les causes nobles du globe, la gauche qui défendait le prolétaire et le paysan, la veuve et l’orphelin, le Vietnamien et le Palestinien, la gauche qui voulait libérer la femme du joug de l’homme et l’homme du joug du loup, la gauche qui nous faisait rêver du Grand Soir qui, on le sait aujourd’hui, n’arrivera jamais, cette gauche-là, je crois, hélas, qu’elle n’existe plus. A la place, on a plus des professionnels du mot, du verbe et… du hors sujet.
La gauche renaîtra-t-elle de ses cendres? Je ne sais pas. En attendant, les gens d’en haut et les gens d’en bas risquent de rester chacun à sa place. C’est mieux comme ça, me dira-t-on, et on a peut-être raison.
En attendant, je souhaite à tous les nostalgiques de la gauche authentique, un très bon week-end. Quant aux autres…
Un dernier mot pour rigoler un peu sous forme de devinette : qu’est-ce qui est mieux : un siège de chef de groupe parlementaire ou un poste d’ambassadeur ?