Chroniques

Point de vue: Le danger de ghettoïsation urbaine

© D.R

J’étais invité jeudi au séminaire Al Omrane – CDG où je devais parler de «mixité sociale»  devant une assemblée de techniciens de haut niveau… Je souhaitais leur faire partager – et ici vous faire partager – le constat et les conclusions de mon expérience de terrain, que j’ai retranscrite dans mon livre «De l’autre côté du soleil»  dont le titre à lui seul est un slogan : «La question de notre avenir est dépendante de ce que la société fera pour que notre jeunesse trouve sa place – toute sa place – dans le projet de société que nous devons construire tous ensemble.

La jeunesse a le pouvoir d’appuyer sur l’accélérateur pour contribuer au développement et au progrès du pays si elle est concernée, impliquée, intégrée, elle sera, a contrario, l’épine dans le pied de toute avancée si elle est marginalisée, méprisée, reléguée à un rôle de figurante.

La grande partie de cette jeunesse vit dans les quartiers populaires de nos villes, ces quartiers sont la proie de trois fléaux principaux, étroitement imbriqués : chômage, désœuvrement, exclusion… et de leurs dégâts collatéraux que sont les conduites déviantes, drogue, alcool, délinquance, embrigadement, mirages de l’immigration…

Le risque de ghettoïsation urbaine ne nous épargne pas ! Cette jeunesse est différente de la génération des parents, en ce sens que ses repères, ses références, sont tous liés au quartier où le plus souvent ils sont nés.

Si les parents se définissaient de par leur région d’origine, les jeunes, eux, sont ouled l’Hay, ouled Derb : leur langage, leur mode vestimentaire, leurs goûts musicaux… en sont le fruit. Le terme de «cultures urbaines» n’est ici pas un vain mot.

L’un des problèmes rencontrés par les générations actuelles est bel et bien celui de l’identification. Tout adolescent, dans sa construction identitaire, a besoin d’exemples, de modèles. Et là aussi, chez nous, le bât blesse. Où sont les icônes ?

Les jeunes sont laissés à eux-mêmes et les «modèles» de réussite qui leur sont accessibles sont ceux du dealer ou du plus «débrouillard» dans le sens de celui qui vit de l’argent facile ! Les inégalités sociales liées aux inégalités territoriales produisent une jeunesse qui, si elle est reléguée durablement aux marges, sera de plus en plus dans l’incapacité de progresser et de contribuer au progrès de la société.

L’école ne transmettant plus de savoir, la famille ayant de plus en plus de mal à transmettre de valeurs, les partis politiques n’offrant pas ou peu d’encadrement, les associations de terrain souffrant de manque de moyens… Que reste-t-il à ces jeunes pour se forger ?

Le Web et les réseaux sociaux, la rue ? Ces jeunes, lorsqu’ils veulent parler du quartier dans lequel ils vivent, emploient souvent l’expression «mora chems», «de l’autre côté du soleil»…

Rarement en si peu de mots un sentiment d’exclusion a été ainsi exprimé, de là d’ailleurs le peu d’amour, le peu de considération et le manque de confiance en eux-mêmes de ces jeunes, comment faire donc pour que ces jeunes se projettent dans l’avenir ? Tel est l’enjeu à court et à long termes ! Or notre société ne leur apprend qu’un «chacun pour- soi» suicidaire… Danger !»

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