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Une charte pour la démocratie locale

Le Parlement a voté, lundi 26 août en séance plénière, le nouveau projet de la charte communale. Un texte qui se veut ambitieux par rapport à celui de 1976 qui a régi jusqu’ici les collectivités locales au Maroc. Le bilan de ces entités est, de l’avis de tous, désastreux, très en retrait par rapport aux aspirations du pays et des citoyens. Il n’y a qu’à voir l’état des cités, des villes et du monde rural pour se rendre compte de l’ampleur des insuffisances. Un véritable gâchis. Pour justifier le naufrage des communes, les élus ont souvent accusé les dispositions de la charte de 1976, dénonçant tantôt la tutelle contraignante du ministère de tutelle tantôt l’insuffisance des moyens financiers alloués aux municipalités. En fait, les membres du conseil, à commencer par le président, se sont accommodés largement de cette situation dont ils ont tiré, en complicité avec l’autorité locale, un profit personnel en termes de passation de marchés, de signature d’autorisations et d’accumulation de privilèges. Un non-dit pourtant omniprésent. Preuve : les candidats déboursent beaucoup d’argent dans l’achat des voix et ceux qui veulent être présidents se fabriquent des majorités à coups de millions lourds. Et dire que les édiles veulent s’affranchir de la tutelle du ministère de l’Intérieur. Satisfaire une telle revendication reviendrait à aggraver le cas des communes.
Dans la nouvelle charte communale, le législateur a juste consenti un allègement du contrôle de la tutelle, passé d’un contrôle a posteriori à un contrôle a priori, en misant sur l’esprit de responsabilité des élus. Dans ce sens, ceux-ci ont vu leurs prérogatives étendues ou clarifiées. Aussi ont-ils été érigés en force de propositions sur les politiques et les projets relatifs aux domaines économique, social et culturel… Quant aux comptes administratifs, ils ne seront plus bloqués en cas de refus de leur vote par les membres du conseil. Pour débloquer la situation, le ministre de l’Intérieur, le wali ou le gouverneur interviennent en soumettant le compte de la discorde à l’arbitrage de la Cour régionale des comptes.
Autre innovation, le président doit être lettré. Minimum requis: le certificat d’études. Savoir lire et écrire. Quant aux conseillers, ils peuvent être analphabètes, cela ne semble pas déranger outre mesure. Par ailleurs, le fameux article 7, la règle des 2/3 qui destituait les présidents après 2 ans d’exercice, a disparu de la nouvelle loi. Ce changement a été salué comme un grand pas en avant de nature à assurer une stabilité au conseil communal et à mettre fin à la valse des étiquettes. Désormais, le poste de président est incompatible avec ceux de président du conseil préfectoral et de président du conseil de la région. La modification de taille reste sans conteste l’instauration du principe de l’unité de la ville et la suppression de la communauté urbaine. Cette initiative s’inspire du modèle français : la loi PLM (Paris, Lyon, Marseille).
Une loi qui instaure une mairie centrale (le conseil de la ville) et des mairies d’arrondissement. Dotées d’une autonomie budgétaire, ces dernières, qui ont en plus un rôle consultatif, sont chargées surtout de la création et de la gestion des équipements de proximité (jardins de moins d’un hectare, maisons de jeune, salles de fêtes…) Ces structures seront créées dans les villes de plus de 750.000 habitants, comme Casablanca , Agadir et Marrakech…
Il est vrai que le gouvernement s’est pris un peu en retard dans la préparation du nouveau projet de la charte communale. En effet, on ne présente pas au Parlement un texte de cette envergure en fin de législature.
Les amendements nécessaires furent apportés surtout par les conseillers de la deuxième Chambre. Cependant, toute réforme ne vaut que par l’efficacité des hommes chargés de la faire vivre sur le terrain. D’où la responsabilité immense des partis politiques dans le choix des candidats lors des prochaines communales en jouant le rôle central de filtre des élites locales et nationales. Celles qui, au-delà des dispositions de la réforme, sont prêtes à servir la collectivité au lieu de se servir. Les partis politiques ont d’ailleurs une responsabilité non négligeable dans la dérive communale. Une fois le candidat élu, le parti le perd de vue. Aucun encadrement ne lui est fourni, aucune formation ne lui est dispensée en termes de gestion et d’action sur le terrain.
Pour que les futurs conseils communaux ne soient pas une pâle copie des précédents, les partis doivent changer leurs méthodes de travail et revoir leur mode de désignation des candidats. Ailleurs, la démocratie locale est considérée comme un moyen d’ascension politique.
Au Maroc, elle est perçue principalement comme un instrument de promotion sociale, pour ne pas dire d’enrichissement illicite. L’objectif final, à travers la refonte de la charte de 1976, étant d’arriver à une commune gérée comme une entreprise privée avec des procédures souples et une obligation de résultat.

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