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Dayet Aoua : La pauvreté et le froid affaiblissent la santé des habitants

© D.R

La population n’hésite pas à s’exprimer sur ses besoins

Dès l’arrivée à Dayet Aoua, à quelques kilomètres de la ville d’Ifrane, le visiteur ne peut être insensible au froid glacial qui y règne. En ce moment-là où le mercure affichait 8 degrés, vendredi dernier vers 10 heures, une forte pensée va aux habitants. A côtoyer ceux-ci, la souffrance se voit déjà sur les yeux. Leur adresser la parole laisse voir la partie cachée de l’iceberg.

Le manque d’équipements et d’hôpitaux pointé du doigt

«Il y en a ceux qui sont malades, mais n’ont pas de quoi acheter des médicaments et se déplacer au grand hôpital qui se trouve assez loin. J’en fais partie», déclare une vieille dame rencontrée au centre de santé rural de 2ème niveau de Dayet Aoua. L’occasion étant le lancement, sur Hautes instructions du Souverain, de l’opération «Riaya» (Soin) 2018-2019, par le ministère de la santé. Cette rencontre a également permis aux citoyens locaux d’exprimer leurs doléances. «Cet hôpital est tantôt ouvert, tantôt il ne l’est pas. Aussi, nous n’avons pas accès aux médicaments. Nous attendons les démarches de notre Roi et des responsables», précise notre interlocutrice.
Outre cette dame, les personnes présentes sur place sont unanimes à dire qu’elles sont obligées de parcourir de longues distances pour se faire soigner. «Si nous avons besoin de soins, nous devons partir à Fès. C’est loin pour nous. Il y en a ceux qui n’ont pas les moyens de prendre le transport», enchaîne l’interlocutrice. Et ce n’est pas tout ! Selon ses dires, tout comme d’autres pairs, «c’est pour la première fois que les responsables se rendent à cette contrée du pays». Pire encore, cette femme est dans un état d’indigence extrême. «Je n’ai même pas de quoi faire le Ramed», enchaîne-t-elle en rappelant s’être fait opéré de la vésicule biliaire et de la tête. «Ceux qui ont des pistons peuvent avoir des médicaments. Pour ma part, je prends mon mal en patience», révèle-t-elle.

De la souffrance des femmes enceintes et des enfants

A leur tour, les enfants souffrent dans cette localité comme le précise une autre interlocutrice. «Quand nos enfants ont de la fièvre et que le médecin n’est pas là, nous ne savons pas à quel saint nous vouer», martèle-t-elle.
De même, les femmes enceintes à terme ont des problèmes pour accoucher. «Ici, il n’y a que deux infirmières. La nuit, il n’y en a pas. Et quand l’une est absente, elle n’est pas remplacée par une autre. Pour partir à Azrou ou Meknès, une femme enceinte doit débourser 100 à 200 DH pour être transportée par ambulance», détaille notre deuxième interlocutrice. Selon ses dires, les ménages qui ont les moyens partent dans des cliniques à Azrou et Fès, tandis que d’autres meurent. «Parfois, il n’y a pas de médecin ici, mais quand il est là, il offre des médicaments», tempère-t-elle. Sans mâcher ses mots, la dame ne manque pas de s’exprimer sur ses besoins et ceux de la population. «Tout ce que nous voulons c’est que l’hôpital soit bien équipé et doté d’une ambulance. Ainsi, les enfants et ceux qui n’ont pas les moyens peuvent être soignés ici. Nous aimerions aussi que les femmes puissent accoucher dans de bonnes conditions. C’est tout ce que nous voulons», exalte-t-elle. En plus de ces conditions, celles climatiques empirent la situation.

Un dépôt de bûches fort sollicité

Les interlocuteurs ont également été unanimes quant au manque de moyens pour faire face à la vague de froid qui sévit dans la contrée. Seuls ceux qui ont les moyens peuvent acheter des bûches. «En ce temps de froid, nous sommes en manque de bûches. Nous avons besoin d’un dépôt pour pouvoir en acheter», indique un agriculteur souffrant de diabète. «Pour faire des analyses, on me demande ici de partir à Ifrane ou Fès», ajoute-t-il. A propos des bûches, il précise que le kilo est à 1 DH 20 ou 1DH 30 à Azrou sans compter le transport. «La tonne revient à 1.500 DH. Ceux qui n’ont pas les moyens meurent à cause du froid», explicite-t-il. Un autre interlocuteur, qui indique que le médecin et sa femme viennent en aide aux malades selon les moyens disponibles, précise à son tour que la population locale n’a pas les moyens d’acheter des bûches. «Il faut partir à Azrou pour s’en approvisionner à 1.300 DH la tonne et ajouter 200 à 300 DH pour le transport. C’est trop pour nous.

Une tonne nous permet de nous réchauffer pour un seul mois à peine. Pour nous chauffer, nous avons besoin de quatre tonnes pour l’année», détaille-t-il. Notre interlocuteur a également une pensée pour ses pairs. «En cet hiver, il y en a ceux qui ne travaillent pas pendant une semaine à deux à cause des intempéries. Donc ils n’ont pas de quoi acheter même de la farine, de l’huile. Les habitants souffrent ici. Nous prenons notre mal en patience», se lamente-t-il. Faute de moyens, les habitants sont en dilemme. S’approvisionner en bûches ou en nourriture? «La priorité est donnée à la farine», rétorque-t-il. Vu le prix cher des bûches, la population a recours aux couvertures et à l’eau chaude pour se chauffer les pieds. «Mais nous risquons de tomber malades. Nous aurions aimé pouvoir nous approvisionner en bûches à proximité. Nous avons aussi besoin de subventions pour le chauffage», assure une interlocutrice. Elle indique que les enfants ont souvent des angines, de la fièvre, de la toux et les pieds qui enflent à cause du froid et faute de chauffage. «Les enseignants demandent aux enfants, qui marchent pendant une heure voire plus pour arriver à l’école, de ramener les bûches alors que nous n’en avons pas», tient-elle à préciser.
Si d’aucuns ont besoin de chauffage, d’autres ne disposent pas d’éclairage. C’est le cas d’une dame, de la région de Tichaou, rencontrée lors de l’événement. «Nous n’avons pas d’électricité. Nous utilisons des bougies et du gaz pour l’éclairage», révèle-t-elle avec amertume.

Données chiffrées

Cela étant, une caravane médicale multidisciplinaire a, selon le ministère de la santé, été lancée le même jour au centre de santé de Dayet Aoua, en faveur d’environ 2.000 bénéficiaires issus des douars Dayet Hachlaf, Dayet Ifrah, Amkaidou et Afegfag. Cette initiative, qui se poursuit jusqu’au 30 mars, profitera à 5 provinces de la région, à savoir Taounat, Sefrou, Boulmane, Ifrane et Taza. Cette opération est marquée par le lancement de plus de 400 opérations d’unités mobiles et plus de 50 caravanes médicales multidisciplinaires, outre la mobilisation de plus de 400 cadres et professionnels de la santé. En outre, une enveloppe budgétaire supplémentaire de plus de 1,5 million de dirhams a également été allouée aux médicaments. Pourvu que cela dure.

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