L’association Alternatives, fondée par Abdelali Benamour et présidée par Driss Benali, vient de publier un long Manifeste intitulé « Pour un Maroc émergent ». Pour les rédacteurs de ce document, « l’action politique doit répondre à la question fondamentale: comment faire du citoyen l’acteur principal de la démocratisation du pays? ».
L’association, tout en remarquant que le système des partis politiques « est complètement désarticulé » et que « la montée de l’extrémisme traduit une sorte d’ébranlement souterrain », propose plusieurs axes de réformes.
Mais le plus important concerne sans doute l’institution monarchique. Partant du postulat que « le Maroc annonce son attachement aux valeurs des droits humains et de la démocratie », l’association « Alternatives » se demande si nous sommes réellement dans un système démocratique. La réponse des rédacteurs du Manifeste est clairement négative. Sur la ligne de mire: la relation entre l’Etat la religion.
« Alternatives opte clairement pour la séparation entre le champ politique et le champ religieux », sans pour autant s’opposer à l’idée de faire de l’Islam une religion d’Etat inscrite dans la Constitution. Toutefois, « les règles et les normes doivent être laissées à une autorité religieuse présidée par le Roi, indépendante du pouvoir politique et agissant par exhortation et non par coercition ». Elle ne pourrait donc donner aucun ordre au gouvernement.
Alternatives propose que cette autorité religieuse soit composée « de représentants des Ouléma sortis des institutions religieuses comme la Karawiine et Dar Al Hadith Al Hassania, comme elle doit faire appel à des personnalités universitaires au fait des questions religieuses ».
En plus de cette mission purement spirituelle, les pouvoirs du Monarque doivent se rapporter à l’arbitrage politique et à la préservation de l’unité nationale (sécurité interne et défense nationale). En clair, Alternatives appelle, pour l’atteinte de ces objectifs, « une révision de notre système institutionnel », c’est-à-dire la Constitution.
C’est justement le deuxième volet du Manifeste. Une fois que le politique et le religieux seront séparés, Alternatives ne voit aucun mal à ce que des partis politiques soient de tendance islamiste. Effectivement, « certains estiment qu’aucun parti ne doit s’arroger le qualificatif de musulman »… mais « à partir du moment où on passe à une certaine forme de laïcité, cette vision devient caduque », peut-on lire sur le Manifeste.
En somme, Alternatives propose un schéma institutionnel où non seulement le Roi, mais également la religion, serait à la merci des partis politiques. Un schéma difficilement réalisable et ce pour au moins deux raisons.
Tout d’abord, car les clivages ethniques et régionalistes ne sont pas totalement maîtrisés au Maroc. Et ensuite car les partis politiques eux-mêmes sont aujourd’hui incapables d’assumer une telle responsabilité. Surtout que le Manifeste d’Alternatives se garde de donner un « calendrier » d’exécution de ces multiples réformes.