Le PJD (parti de la Justice et du développement) a pris une longueur d’avance sur le reste des formations politiques. Autant le parti de Abdelkrim Al Khatib se manifeste bruyamment sur la scène nationale, quitte à faire feu de tout bois, autant les autres brillent par un silence qui ne fait que s’épaissir.
C’est cette absence, voire démission des structures partisanes classiques qui confère du relief à la moindre initiative des islamistes, qui savent communiquer sur chacun de leurs faits et gestes, chacune de leurs activités et réunions. Ainsi de celle du secrétariat général du parti du 13 mars pour “étudier les derniers développements intervenus sur la scène politique“. À cette occasion, le PJD a dénoncé l’exclusion dont ses activités sont victimes de la part des médias publics et leur instrumentalisation pour porter atteinte à son image. Par ailleurs, le parti a marqué le coup en s’élevant contre le comportement jugé inacceptable du ministre de la justice à l’encontre du président de son groupe parlementaire lors de la réunion le 11 mars de la commission de la justice, de la législation et des Droits de l’homme. Les membres du secrétariat général ont réaffirmé la position du parti de retirer le projet relatif à la lutte contre le terrorisme, actuellement soumis à l’attention de la Chambre. “ L’approbation de ce texte représentera un vrai recul en matière des droits de l’homme dans notre pays”, estiment les intéressés.
Les responsables du PJD ont dit tout le bien qu’ils pensent de ce projet qui ne cadre pas évidemment avec leurs intérêts. Et pour cause… Ils se sentent visés par un tel dispositif musclé qui hisse le Maroc au rang des pays résolument engagés dans la lutte anti-terroriste mondiale. Le PJD a quelque raison de s’inquiéter étant donné qu’il est soupçonné sinon d’accointances du moins de sympathie avec les réseaux de la Salafia Jihadia qui ont essaimé ces dernières années à travers le territoire national. Cette nébuleuse continue de faire parler d’elle depuis que certains de ses adeptes furent incarcérés pour leur implication dans des assassinats de citoyens innocents. Pour le PJD, la Salafia Jihadia n’est qu’une fabrication des autorités visant à porter atteinte à l’image de l’ensemble du mouvement islamiste au Maroc. Une chose est sûre : le PJD s’empresse de se présenter en victime ou de verser dans la fuite en avant à chaque fois qu’il se sent dans le collimateur des pouvoirs publics.
Cette stratégie sert les objectifs du parti dans la mesure où elle lui permet de se fortifier et d’avancer ses pions dans la société, lentement mais sûrement.
La deuxième guerre du Golfe qui s’annonce est une aubaine pour les amis de Mustapha Ramid. D’abord, parce qu’elle va leur permettre, au-delà de la dénonciation de l’agression américaine contre le peuple irakien, de récupérer la colère de la rue à travers des manifestations de solidarité. Ensuite, parce que l’attaque contre l’Irak est de nature à renforcer son poids électoral dans la perspective des communales prévues en juin prochain. D’ailleurs, le PJD se prépare activement à ces échéances où il compte réaliser un meilleur score.
En attendant, la machine islamiste est en branle, fonctionnant dans tous les sens sans discontinuer. Alors que les hommes d’El Khatib font de la politique spectacle sous la coupole, le MUR (Mouvement unicité et Réforme) de Ahmed Raïssouni, lui, poursuit dans l’ombre son action de “conquête” de la société. Ce mouvement qui contrôle en vérité le PJD, chapeaute en plus des centaines d’associations implantées dans plusieurs villes du pays (quartiers déshérités) qui, sous couvert d’activités culturelles, sportives et éducatives, fait de l’activisme social à la manière islamiste pour recruter massivement parmi l’armée des déshérités. Comment ? Ils assistent les familles dans le besoin, paient les médicaments, les enterrements, les livres scolaires. En un mot, ils se substituent à l’État. C’est tout le danger de l’islamisme qui profite de la frustration de la misère du grand nombre, mais aussi de la démocratie et de la liberté d’initiative, dans l’espoir d’arriver un jour à leurs fins…