Culture

Respect, Mrs Franklin

© D.R

Cette crise sanitaire nous aura privés pendant un an de cinéma et il faudra du temps pour retrouver tous les trésors qui sont restés dans cette malle- là.

Parmi ces pépites de la rentrée, le cinéma Megarama met à l’honneur Respect, un biopic, consacré à Aretha Franklin. Vous pourrez dire que la réalisatrice sud-africaine Liest Tommy ne prend guère de risque en choisissant l’icône, la diva, cette reine de la pop musique qu’est Aretha Franklin. Pourtant, choisir ce sujet n’est pas forcément chose simple: à se frotter au soleil, la chute peut être terrible. Tommy ne fait d’ailleurs pas l’erreur de tout vouloir dire sur Franklin. Consciente qu’il était impossible de résumer cinquante ans de carrière en un film de 2h15, la réalisatrice et les producteurs ont décidé de s’attarder sur les années 1950 à 1970 de la vie d’Aretha Franklin. Des décennies qui ont vu son apogée mais qui sont aussi les plus torturées de sa vie, entre violence conjugale et crise existentielle, la chanteuse s’écroule parfois face contre terre, littéralement. En cela, le film est sensible et ne se contente pas d’être une bonne bande originale, qui reproduirait maladroitement les bons concerts et les tournées.

Préparez-vous à chanter

Bien sûr, oui, vous verrez et entendrez de la très bonne musique, qui vous fera avoir des étoiles dans les yeux et des papillons dans le ventre. Cette musique venue du gospel, pour aller vers la soul, si caractéristique d’Aretha Franklin. Le titre du film est aussi une des merveilles acoustiques que vous ne pourrez vous empêcher de fredonner des heures durant, «just a little bit». Le titre est originellement une chanson d’Otis Redding mais, comme pour les grands gospels, Aretha Franklin a ce talent, ce don incroyable de tout sublimer pour redéfinir son rythme.

Ce qui fait une star

Le film est aussi une réflexion philosophique. Lors de son vingt-cinquième anniversaire, la vedette confesse qu’elle ne sait pas qui elle est et qu’elle s’interroge sur cette question universelle : «qui suis-je ?». Ce questionnement, qui la ronge, au plus profond de son être, est ce qui la distingue d’une simple choriste, comme ses soeurs. Elle n’est pas seulement talentueuse. Elle est habitée par la musique, qu’elle fait sienne : c’est cela qui la différencie d’une starlette, issue d’un radio-crochet ou fabriquée par un père, un mari ou un producteur avide d’argent et de gloire.

Hudson incarne impeccablement la diva

Jennifer Hudson arrive subtilement à rentrer dans la peau de la diva. Au jeu du biopic, Hudson est aussi douée que Rami Malek qui interprétait Freddie Mercury en 2018 dans Bohemian Rhapsody. Il faut dire qu’elle aura été dans un dialogue constant avec la vraie Aretha. Scott Bernstein, un des réalisateurs du film, raconte : «On a passé trois heures au téléphone à parler de la façon dont on pourrait raconter son histoire. Ce n’était que le début d’un cheminement qui allait durer quatre ans. On s’appelait tous les deux mois, et elle jaugeait la direction que prenait le film».

Une chanteuse noire engagée pour l’égalité des droits

Outre les grands tubes : Respect (bien sûr), Ain’t No Way, You Make Me Feel Like A Natural Woman ou encore l’incomparable Think où le mot «Freedom» résonne longtemps dans les têtes, comme une puissante libération. Quand le film sera fini, restez assis ! Vous pourrez écouter Here I Am (Singing My Way Home), une chanson originale des auteurs-compositeurs-interprètes Carole King et Jamie Hartman pour Aretha de la part de l’actrice Jennifer Hudson. Restez aussi pour entendre la vraie, l’unique, Aretha dans un de ses derniers concerts, pour Obama. Un diaporama de photos originales accompagnera ces frissons. Au delà de tous ces diamants sonores, le film permet de découvrir l’engagement politique d’Aretha Franklin qui accompagne les grands militants noirs de Martin Luther King à Barack Obama. Le générique nous rappelle en effet que lors de l’investiture du premier président étasunien noir, Aretha Franklin est invitée à chanter. Et, ce n’est pas un hasard. Elle incarne un état d’esprit, une foi typiquement américaine. D’ailleurs, le film s’ouvre au coeur d’un temple et se referme avec un retour dans ce dernier, autour d’un choeur gospel. Prosélytisme ? Non ! Dans ce pays, la foi est constitutionnelle et constitutive d’un peuple, que représente bien la diva de la soul. Elle croit sincèrement et inspire viscéralement, le plus grand des respects.

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