Notre ambitieuse politique de tourisme peut déraper à tout moment. Au lieu de 10 millions de touristes en 2010, si on ne fait pas vraiment attention, on risque de récupérer, à la place de la manne attendue, pas mal d’escrocs. Le risque est patent. Entre commissions et rétro-commissions, intéressements et gratifications, cadeaux et pot-de-vin, notre système – qui n’existe pas encore – de prévention menace de voler en éclats. La porosité de notre administration, la voracité de certains de nos hauts fonctionnaires et le fantastique appétit de gain facile de nos brillants consultants peuvent aboutir à terme à un collapsus total du secteur touristique. Nos six pôles d’excellence de développent touristique peuvent se transformer sans une réelle vigilance éthique et une absolue volonté de transparence en autant d’abcès de fixation de la déprédation la plus honteuse. Ça commence, déjà, à se fissurer sérieusement du côté d’Agadir. Un homme à qui on a donné le bon Dieu sans confession, qui a pénétré sans coup férir notre administration, qui a tissé un réseau d’obligés assez zélés et qui prétend avec panache naviguer comme un poisson dans l’eau dans les hautes sphères de l’État, montre des signes sérieux de faiblesse. Entre le fait de le soutenir contre vents et marées dans une forme épurée de reconnaissance du ventre ou de le lâcher illico presto dans un regain subit de moralité, il y a des nuits d’insomnie et pas mal d’audiences devant les tribunaux en perspective. On peut décider – même si cela est globalement injuste – que nos promoteurs touristiques locaux ne valent subitement plus rien, mais de là à dérouler un tapis rouge à n’importe qui au motif impérieux qu’il vient d’ailleurs, il y a un pas que nous sommes en train de franchir à une vitesse sidérale. L’apparence est cosmopolite. L’expertise est internationale. Le bagout est irrésistible. La rhétorique est mondialisée. Mais, l’investissement est virtuel. Le foncier est local. Et pour finir le financement est domestique. Nos banques, nos entreprises, nos fournisseurs en tout genre finissent, au bout du compte, avec un drapeau planté entre les deux yeux. Du nord au sud du pays, des affaires de ce type émaillent, depuis des années, notre territoire. Ça laisse des banques sur le carreau, foi d’un cadre du CIH. Et ça donne du travail inutile à notre police des frontières qui fiche à la sortie des lampistes et qui voit les gros bonnets se tirer en yacht ou en jet privé. Probablement qu’à Agadir, on n’arrivera pas à ses extrémités parce qu’il y a quelqu’un qui veut honorer son nom, respecter sa signature et protéger le prestige de son groupe. Mais si on est arrivé dans un domaine aussi sensible que le tourisme à ce type de dérapage c’est que quelque part notre système n’est pas encore au point. Il faut vraiment le regretter quand on affiche les ambitions touristiques qui sont les nôtres. Dans les projets d’envergure, 2010 c’est déjà hier.