«La refonte de la gouvernance, première condition de réussite d’un tel chantier, devra être menée de front avec la création de plusieurs entités visant à fluidifier la communication entre les différentes parties prenantes et accélérer les décisions stratégiques»
Débat : «Tourisme : quels nouveaux enjeux et quelle vision pour le Maroc ?» est la question à laquelle a bien voulu répondre le panel constitué de Fatim-Zahra Ammor, ministre du tourisme, Adel El Fakir, DG ONMT, Imad Barrakad, président du directoire SMIT, et Hamid Bentahar, président du Conseil national du tourisme, lors de la conférence-débat organisée avant-hier par le média La Vie Eco.
Pendant plus de deux heures, les orientations stratégiques du secteur qui vient de recevoir une enveloppe budgétaire de 6,1 milliards de dirhams pour mettre en oeuvre sa nouvelle feuille de route, ont été explicitées à une audience représentée principalement par des professionnels du domaine. Les enjeux sont clairs : redorer le blason d’un secteur qui devrait attirer 17,5 millions de touristes, créer 200.000 nouveaux emplois directs et indirects et générer 120 milliards de dirhams de recettes de voyages en devises à l’horizon 2026. Tour à tour, les intervenants ont détaillé une vision commune dont la réussite dans son application est conditionnée par une synchronisation qui manquait auparavant. Fatim-Zahra Ammor, ministre du tourisme, n’omettra pas de le souligner, dès les premières minutes de sa prise de parole en tant que premier intervenant du panel constitué aussi par Adel El Fakir, DG ONMT, Imad Barrakad, président du directoire SMIT et Hamid Bentahar, président du Conseil national du tourisme.
Au slogan «Le Maroc le plus beau pays du monde», au cliché du touriste français à Jamaâ El Fna et à l’offre All Inclusive fortement convoitée et très attractive par le visiteur étranger ou national, une nouvelle stratégie est aujourd’hui bien concrète pour dépasser le cap d’une pandémie qui a mis à plat le secteur pendant deux ans. C’est ainsi que Fadel Agoumi, DG, du Groupe Caractères et modérateur de l’événement, ouvrira le débat. «Quel que soit le prisme, le tourisme se construit son propre circuit. La nouvelle feuille de route devra permettre d’atteindre 17,5 millions de touristes en 2026 », rappellera ce dernier. Il faut dire que l’année 2022 a pu déjà rendre espoir aux professionnels d’un secteur auparavant sinistré. La ministre en charge du dossier s’est engagée, en effet, à affirmer que «cette nouvelle feuille de route permettra de faire du tourisme un vecteur de croissance durable pour le Maroc. C’est un fait, il représente 5% du PIB et emploie 5% de la population active ».
Le trend devrait être renversé, favorablement, grâce à un nouveau mode de gouvernance basé sur la coordination entre les différentes parties prenantes allant des plus concernés aux maillons les plus éloignés géographiquement ou institutionnellement. Fatim-Zahra Ammor en a fait le premier défi à relever. Il conditionnera tous les axes à développer dans le cadre de la nouvelle stratégie engagée par son ministère.
Pour elle, « le bilan lié à l’activité touristique a été mitigé pour une raison évidente de mode de gestion».
Le manque de coordination entre les différentes entités du secteur, le déséquilibre de l’offre touristique dans les différentes régions du Maroc et la non-mobilisation de budget pour accompagner la promotion du secteur représentent pour elle les trois points où la gouvernance a péché. « Et c’est bien suite à ce constat que le plan offensif concocté et rendu public la semaine dernière viendra renforcer la place du Maroc », promet la ministre du tourisme. Le Royaume a été comparé sur le plan concurrentiel à la Croatie, au Portugal, la Grèce, la Turquie qui ont su drainer les touristes. «Le temps est venu de sortir de la torpeur et de jouer dans la cour des grands et atteindre les 26 millions de touristes en 2030», décrètera-t-elle. Car la nouvelle feuille de route retient une offre clientèle repensée. La nouvelle logique commerciale reposant désormais sur 9 filières thématiques et 5 filières transverses. L’offensive du plan stratégique repose également sur un doublement de la capacité aérienne. La refonte de la gouvernance, première condition de réussite d’un tel chantier, devra être menée de front avec la création de plusieurs entités visant à fluidifier la communication entre les différentes parties prenantes et accélérer les décisions stratégiques.
La ministre en fait son fer de lance et détaillera la différente structuration largement médiatisée ces derniers jours par la presse nationale sous voie de communiqué officiel.
Tout compte fait par le timing s’y prête compte tenu de l’impact positif de la Coupe du monde sur l’image du Maroc… Fadel Agoumi s’adressera, cette fois-ci, à Adel El Fakir, DG de l’ONMT, pour une analyse du comportement du voyageur lors de sa décision d’achat. L’homme rappellera les différents canaux par lesquels passent les visiteurs du Royaume en insistant sur le fait que « les plateformes commerciales telles que TripAdvisor et Expedia sont de véritables relais de distribution ». L’écosystème est là…
De son côté, Hamid Bentahar, en tant que président du Conseil national du tourisme, exprimera, d’entrée, sa satisfaction car la genèse de la stratégie a reposé sur plusieurs workshops qui ont permis de faire remonter les visions émanant de toutes les parties prenantes. «Cela fait longtemps que l’on rêvait d’une locomotive et aujourd’hui le ministère est devenu une véritable plateforme pour fédérer toutes les actions», confie l’homme de terrain et fort d’une riche expérience dans le Groupe Accor. Il détaillera, à son tour, les différents axes sur lesquels reposera le développement du secteur comme la connectivité internationale à accroître sur des pays, notamment, tels que le Brésil et l’Argentine qui sont des marchés potentiels, identifiés surtout après la Coupe du monde. L’expert du domaine insistera aussi sur le fait que « le secteur a toujours été à la page en termes de digitalisation en citant l’exemple d’une auberge à Marrakech commercialisée en Australie». Les exemples sont nombreux.
De son côté, Imad Barrakad insistera sur le fait que le Maroc «est un produit unique de par sa position géographique à quelques kilomètres de l’Europe ». Cet atout de taille se trouve valorisé par une offre composée de plusieurs expériences de voyages. Reste que la fidélisation n’est pas systématique. Développer l’offre à travers les différentes filières identifiées devra permettra d’y parvenir. La partie ne fait que commencer. Mais, cette fois-ci, le terrain est balisé avec une visibilité réelle.